Au lendemain des élections, dans une salle bondée, l’assemblée du PLR Valais s’inscrivait hors du temps. A la manière, peut-être, d’un meeting politique à la française. Les discours sont conquérants, les félicitations aux candidats redoublent et l’audience est dévouée. Bref, la ferveur colonise les cœurs et fédère les âmes.

Pourtant, la veille, le PLR accusait un énième recul dans les urnes. De 25,9% en 1991 à 18,8% en 2011, le parti plafonne depuis dimanche à 14,7%.

Sur le papier donc, rien ne justifie les salves d’applaudissements. Oui, la base adoube son poulain, Philippe Nantermod, dans la lutte aux Etats. Mais personne ou presque ne semble s’embarrasser des résultats médiocres du parti sur le plan national. Florian Piasenta, peut-être. A demi-mot, à l’heure de présenter la baisse de l’électorat, le président du PLR plaide pour «une introspection» et «de meilleures punchlines».

L’avertissement, le vrai, viendra de Stéphane Ganzer, député et chef de l’exécutif de Noble-Contrée. «Non, nous n’avons pas fait un score glorieux dimanche. Ce soir, nous ne devons pas nous taper sur le ventre», lance-t-il à l’adresse de l’assemblée. «Nous n’arrivons pas à stopper l’hémorragie. Et pour y parvenir, nous devons réussir notre mue.»

Nous n’arrivons pas à stopper l’hémorragie. Et pour y parvenir, nous devons réussir notre mue.

Stéphane Ganzer, député et président de Noble-Contrée

Silence dans la salle. La prise de parole détonne. Sans sonner faux.

«Rééquilibrer les ailes radicale et libérale»

Reste à définir les contours de cette mue. De l’introspection. Elle s’articule, selon Stéphane Ganzer, autour d’un positionnement plus affirmé sur les thématiques sociales et énergétiques. «Le parti doit rééquilibrer ses ailes radicale et libérale. Aujourd’hui, on constate, hélas, que les bienfaits du libéralisme sont plus difficiles à faire passer auprès des citoyens», appuie-t-il. «On perd également notre lien avec le monde rural et l’agriculture.»

Florian Piasenta conteste un quelconque déséquilibre idéologique au sein de sa fraction. «A l’échelon communal, les sensibilités sont plus radicales. A la députation, c’est un doux mélange alors qu’au National, on peut percevoir une aile plus libérale», souligne-t-il en rappelant que son parti se situe «au centre-droit» de l’échiquier.

Notre message manque de clarté.

Florian Piasenta, président du PLR

Mais si le parti cantonal régresse aux élections fédérales, ce n’est pas par manque de fibre sociale, mais par «manque de clarté de notre message». Il précise: «Nous devons faire comprendre aux électeurs que nous sommes les seuls à défendre tous les entrepreneurs, des PME aux grandes entreprises.»

René Constantin, lui, s’autorise une autre lecture. Aux commandes du PLR Valais entre 2016 et 2020, l’ancien président s’alarme du sort de la section. «C’est la première fois que je vois l’urgence d’un large débat au sein du parti, à l’échelon national et cantonal», relève-t-il d’emblée.

«Un constat d’échec crasse»

L’ancien homme fort du PLR parle sans détour. «Aujourd’hui, je suis désabusé. Si l’on me demande quelles sont les idées phares du parti pour maintenir le pouvoir d’achat, assurer la transition énergétique ou notre stratégie en matière de développement durable, je suis totalement emprunté pour répondre», regrette celui qui se réclame, lui aussi, de l’aile radicale du PLR.

«Nous sommes le parti de l’économie, nous aurions dû nous emparer de ces thèmes plutôt que de parler de fiscalité des grandes entreprises ou de libertés individuelles. C’est un constat d’échec crasse à l’heure où beaucoup de familles peinent à boucler leurs fins de mois.»

De ses mots donc, «retrouver un côté humaniste et populaire doit être la priorité absolue du parti». Le message est limpide. Précisons toutefois qu’il ne s’adresse pas à Philippe Nantermod, parfois décrit comme le chantre du libéralisme, mais bien au PLR et au choix de ses combats.

Retrouver un côté humaniste et populaire doit être la priorité absolue du parti.

René Constantin, ancien président du PLR

Plus mesurée, Natacha Albrecht, deuxième de liste au National, évoque le besoin «d’une réflexion», sans envisager «une refonte complète de la ligne politique». Elle ajoute: «Nous défendons une position claire, mais qui peut être mal comprise par la population. Nous prônons, par exemple, une immigration juste et modérée en fonction du besoin de l’emploi. Ce message, bien que clair et travaillé, manque peut-être de punch pour le combat politique.»

Coincé entre l’UDC et le Centre?

Affiner la communication partisane, c’est aussi ce que défend Florian Piasenta. «Si on ne se fait pas comprendre auprès de l’électorat, on perd des voix à gauche au profit du Centre et à droite en faveur de l’UDC», note le président du PLR.

Ou, comme le résume Stéphane Ganzer, «le parti se retrouve coincé dans un interstice alors qu’on devrait occuper la moitié d’un hémicycle». Et sans terrain de jeu, «une formation politique est vouée à disparaître», ajoute le député.

Nous ne changerons pas de ligne au gré des problèmes qui surgissent.

Philippe Nantermod, conseiller national et candidat au Conseil des Etats

La menace ne déstabilise pas Philippe Nantermod. «Notre but n’est pas de trouver une place de libre, mais de défendre des valeurs», insiste-t-il. De plus, «sans appartenir à une droite néolibérale financiarisée», il rappelle que les notions de liberté et de responsabilité «constituent l’ADN du PLR». Pas de profonde refonte partisane, donc. «Nous pouvons mener notre introspection, réfléchir à nos thématiques et notre proximité avec certains milieux, mais nous ne changerons pas de ligne au gré des problèmes qui surgissent.»

D’une communication plus fine à un recadrage idéologique, le PLR aura de la matière pour débattre à l’interne. Mais avant de fédérer les urnes, le parti devra d’abord accorder les siens.

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