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Football: gare à la casse lors du retour sur le terrain

Privés de compétition depuis le 23 février, les joueurs de Super League auront besoin d’une période d’adaptation pour reprendre la compétition. Au minimum quatre semaines selon les spécialistes de la préparation.

28 avr. 2020, 19:59
Yassin Fortune se tord de douleur après une blessure subie lors du match entre le FC Sion et les Young Boys le 24 novembre.

Alain Berset a-t-il une vocation de préparateur physique? Le conseiller fédéral a effectué ses premiers pas dans la carrière en prononçant l’expression devenue culte «aussi vite que possible, aussi lentement que nécessaire». Quelle que soit la paternité réelle de cette citation, elle définit exactement l’exercice d’équilibrisme auquel seront confrontés les responsables de la condition physique des clubs de Super League en cas de reprise du championnat.

«L’augmentation rapide des charges d’entraînement et un calendrier très dense réunissent des conditions propices à un accroissement du nombre de blessures», relève Pierre-Etienne Fournier, chef de service à la clinique romande de réadaptation de Sion et médecin de la sélection suisse A de football.

La menace des tendinites et des déchirures musculaires

La difficulté de l’approche affecte tous les championnats en mal de reprise. Une seule étude guide les spécialistes sur cette situation inédite. Elle remonte à la grève de la ligue nationale de football américain en 2011. «Elle avait duré de mars à juillet. Lors du retour à l’entraînement, les clubs avaient enregistré en deux semaines une fréquence de blessures au tendon d’Achille quatre fois supérieure à la moyenne d’une saison. L’appareil locomoteur a besoin de temps pour s’adapter à des charges de travail de plus en plus intenses.» Les tendinites et les déchirures musculaires constituent les plus grandes menaces d’une reprise en accéléré.

Quel que soit le travail effectué individuellement, les sollicitations diffèrent de celles d’un engagement en match.
Michaël Duc, coordinateur de la médecine sportive à la Clinique romande de réadaptation

Le temps disponible pour opérer une reprise de la compétition n’est pas extensible à l’infini si la Swiss Football League souhaite terminer la saison dans le courant du mois d’août. Les scénarios étudiés prévoyaient une reprise légère des entraînements dès le 27 mai. Cette première date est déjà échue. «La durée idéale serait de cinq semaines», estime Mathieu Degrange, préparateur physique du Servette FC. «C’est un point de vue personnel. La réflexion sur une éventuelle fin du championnat en cours doit intégrer la planification de la saison suivante. Lier les deux périodes est essentiel. Nous devons savoir où nous allons. Enchaîner les treize dernières journées et les dernières rencontres de Coupe de Suisse dans un intervalle très rapproché aura des répercussions sur l’approche de la saison suivante.» 

Le préparateur grenat garde un œil attentif sur l’évolution de ses protégés. Tous les Servettiens bénéficient d’un suivi à distance grâce à des appareils fournis individuellement à chacun d’entre eux. «Je vois toutes leurs séances de travail. Je ne crains pas de découvrir des joueurs en surpoids. Un professionnel est attentif à ce problème aujourd’hui.» Comme avant l’apparition du virus, le passage quotidien sur la balance s’impose désormais dans la majorité des clubs.

Un confinement privilégié pour les joueurs de Super League

Les joueurs suisses ont vécu un confinement privilégié en comparaison de leurs voisins français ou italiens. «Ils ont bénéficié de conditions plus favorables. Il ne faut pas non plus dramatiser. Ils étaient sur leurs deux pieds, ils n’ont pas connu d’inactivité totale pendant deux mois», relève Michaël Duc, coordinateur de la médecine sportive à la clinique romande de réadaptation. «Cette situation confronte quand même tout le monde à une grosse inconnue. Quel que soit le travail effectué individuellement, les sollicitations diffèrent de celles d’un engagement en match. Quand vous évoluez sur un terrain, vous devez intégrer les courses de vos adversaires, celles de vos coéquipiers et la maîtrise du ballon.» Cette montée en puissance s’opère habituellement lors des rencontres de préparation. Les joueurs et les préparateurs en seront privés en cas de reprise de la saison interrompue depuis le 23 février.

S’il n’y a pas eu de sérieux ou pas d’entraînement ciblé, il faudra 4 à 6 semaines pour redonner une homogénéité au groupe.
Nicolas Mathieu, physiothérapeute de l’équipe de Suisse de football

Physiothérapeute de l’équipe de Suisse, Nicolas Mathieu cible un élément vital de la reprise des entraînements collectifs. «Les préparateurs seront confrontés à deux cas de figure. Un groupe comprendra les joueurs dont la motivation intrinsèque est suffisante lors du travail individuel. Des éléments comme Gelson Fernandes ou Vincent Sierro n’ont pas besoin d’encadrement pour se maintenir au top. D’autres doivent le faire sous la direction d’un entraîneur et d’un encadrement. Deux semaines de travail seront nécessaires afin de retrouver une homogénéité qui permette un travail de groupe performant Par contre, s’il n’y a pas eu de sérieux ou pas d’entraînement ciblé durant la pause forcée, il faudra 4 à 6 semaines. Imposer immédiatement des charges de travail élevées entraînera de la casse. C’est certain.»

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