Quel est le village valaisan qui a l'accent le plus fort?
Celui de la Chermignonarde Bertha Bonvin m’a vraiment marqué. Mais l’accent du Saviésan Gérard Debons est pas mal également! De manière plus générale, j'ai été frappé par la variété des accents que vous m'avez fournis. On retrouve des phrasés très différents d’un village à l’autre. La disparition des accents du Valais francophone est loin de s’opérer, et cela est très réjouissant pour votre canton.
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Pourquoi les accents valaisans sont-ils encore si nombreux?
On dit en effet qu’en Valais, chaque village a son propre accent. Ce constat trouve de nouveau son origine dans le patois. A l’époque, le parler de Chermignon n’était pas le même que celui des bourgades voisines. Le patois chermignonard, par exemple, a donc influencé le français de ses locuteurs, ce qui leur a conféré un accent bien particulier. Ce phénomène s’est produit dans d’autres villages, donnant naissance aux nombreux accents que l’on connaît.
D’où viennent les accents valaisans?
Plusieurs facteurs peuvent expliquer l’origine d’un accent. Le plus important tient aux patois, qui ont été parlés durant des dizaines voire des centaines d’années en Valais. Lorsque le français a conquis le territoire cantonal, les citoyens se le sont en quelque sorte approprié en lui donnant une couleur locale teintée de leur patois respectif. Ensuite, ce français a été enseigné dans les écoles. Certains traits caractéristiques des patois valaisans ont été transmis de génération en génération. C’est ce qui explique que de nombreux accents subsistent encore de nos jours en Valais.
Comment «attrape»-t-on un accent?
On naît avec, car l’apprentissage d’une langue se fait à travers l’écoute. En grandissant, un enfant reproduit ainsi le français parlé par ses parents et grands-parents. Si ces derniers s’expriment avec un accent particulier, l’enfant fera de même. Remarquons qu’en général, un enfant ne se rend pas compte de son accent jusqu’au moment où il est confronté à l’accent d’un autre village.
Peut-on changer d’accent?
Je pense que oui. Lors d’un déménagement par exemple, une personne pourra perdre son accent d’origine et prendre celui de son nouveau lieu de domicile. Lorsque je travaillais à l’Université de Neuchâtel et que je rentrais en Savoie, mes parents étaient étonnés de me voir parler avec des traits spécifiques à l’accent suisse. Un locuteur peut également perdre son accent ou le voir se modifier, influencé par son conjoint, son entourage, la radio ou la télévision.
Pourquoi certains accents nous agacent-ils?
Bonne question! Certains sons passent tout simplement mal, alors que d’autres sont plus mélodieux. Mais l’agacement dépend également de la vitesse à laquelle on parle et du timbre de la voix. On peut être perturbé par une personne dont la voix est particulièrement aiguë, sans que son accent ne soit pour autant affreux.
Les accents sont-ils voués à disparaître?
La réponse est double. D’un côté, on note un lissage des accents en Suisse romande, avec des traits de prononciation qui sont en train de disparaître. C’est notamment le cas du «r» roulé, qui disparaît au fur et à mesure que les locuteurs natifs du patois décèdent. La «dictée» prononcée «dictéeye» est encore très courante dans la bouche des Vaudois, alors qu’elle s’est effacée, ces cinquante dernières années, du côté de Neuchâtel.
A l’opposé, d’autres traits de prononciation ont tendance à se maintenir dans l’entier de la Suisse romande. «La différence, à l’écoute, entre les mots «pâte» et «patte» persiste ainsi dans cette région, tandis qu’elle a progressivement disparu en France. Donc disparition des accents d’un côté, maintien de certains phénomènes de l’autre.