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Baskets interdites sur le Mont-Blanc, le Valais préfère la prévention

Au Mont-Blanc, les coureurs ne sont plus les bienvenus. On y dénonce un effet "Kilian Jornet". Un équipement est désormais imposé pour atteindre le toit de l’Europe, sous peine d’amende. En Valais, où le phénomène dérange aussi, on préfère en appeler au bon sens.

25 août 2017, 22:43
/ Màj. le 26 août 2017 à 05:30
Un équipement est désormais obligatoire pour atteindre le sommet du Mont-Blanc depuis Saint-Gervais.

Il vous en coûtera 38 euros d’amende. 38 euros si, en voulant grimper le Mont-Blanc, vous n’avez pas avec vous, notamment, un bonnet, une veste chaude, un coupe-vent, des chaussures d’alpinisme, des crampons, un kit de sortie de crevasse, un piolet et une corde. Le montant est symbolique mais l’écho de l’arrêté prononcé par le maire de la commune française de Saint-Gervais est fracassant.

Deux traileurs décédés

Pour cause, Jean-Marc Peillex entend lutter contre «les têtes brûlées» face au «refus d’entendre les messages de prévention». En langage plus clair: renvoyer à la maison les coureurs qui veulent conquérir le toit de l’Europe avec leurs baskets et leur équipement léger. Sur les huit alpinistes décédés depuis le début du mois d’août sur les pentes du «Blanc», deux étaient des traileurs. Le second, expérimenté, est mort jeudi, malgré l’arrêté.

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«On consomme la montagne»

Un phénomène qui ne s’arrête pas au Mont-Blanc et aux 20 000 alpinistes qui s’y pressent chaque année. Le Valais, dans une autre proportion, n’y échappe pas. «On n’en parle moins mais on voit ça régulièrement. Si je prends le cas du Pigne d’Arolla, des quantités de gens y vont à la journée, sans se renseigner sur les conditions ou la trace et souvent sans matériel. On consomme la montagne comme on consommerait un apéro», soupire Pascal Gaspoz, guide et sauveteur chez Air-Glaciers.

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L’homme évoque des attitudes inquiétantes en montagne, voire carrément «hallucinantes». «En plein sauvetage, on croise des gens en short, seuls sur des glaciers. C’est délirant.»

Laisser de la liberté

En Valais, les accidents mortels sont restés plutôt rares cet été en montagne. Et de manière générale, on en appelle plutôt au bon sens. Sur les hauts de Zinal, la cabane Tracuit est le point de départ vers le Bishorn, un «4000» qui s’atteint par une voie sur un glacier, un peu comme au Mont-Blanc. Sa gardienne, Anne-Lise Bourgeois, n’observe pas le même phénomène. «Je recommande aux personnes seules de ne pas y aller en les avertissant que le glacier est crevassé. Mais je ne fais pas la police, je crois qu’il faut laisser un peu de liberté aux gens.»

L’équipement ne fait pas tout

Secrétaire général de l’Association valaisanne des guides de montagne, Samuel Schupbach reconnaît que légiférer n’est pas la solution et privilégie la formation. «L’équipement est essentiel mais ça ne fait pas tout. J’ai encore vu récemment sur l’Allalin des gens bien équipés avec la corde attachée directement autour de… la taille, sans baudrier.»

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Le Mont-Blanc semble être dans une autre dimension car même au pied de la montagne la plus convoitée de Suisse, le Cervin, la présidente de Zermatt Romy Biner-Hauser n’évoque pas de problème similaire. «Toutes les personnes qui veulent tenter l’ascension (3500 par été environ) passent par la cabane du fait que nous avons notamment interdit le camping. Le gardien a donc un œil sur l’équipement et peut déconseiller à certains alpinistes d’y aller.»

Un effet Kilian Jornet?

Mais chez nos voisins français, on fait preuve d’un peu moins de philosophie et le ton est carrément monté d’un cran. Le patron du Peloton de gendarmerie de haute montagne, le lieutenant-colonel Stéphane Bozon, est furieux. Dans les colonnes du «Dauphiné», il qualifie ces comportements «de bêtise sans nom, d’inconscience pure».

>>A lire aussi: Kilian Jornet répond en posant nu au sommet du Mont-Blanc

Et de pointer du doigt un «effet Kilian Jornet», du nom de celui qui cumule les records d’ascension sur les montagnes. Le principal intéressé a rapidement réagi, cédant d’abord à la provocation en postant une photo de lui, nu au sommet du Mont-Blanc, se demandant si, en grimpant depuis l’Italie cela restait permis. Quelques jours plus tard, il a distillé ses conseils, affirmant que les compétences et la connaissance priment sur une liste de matériel.

Apparente facilité

«Le problème, c’est que les images de Kilian Jornet au Mont-Blanc laissent penser que c’est facile. On n’est pas dans une face nord agrippé avec des piolets», renchérit Pascal Gaspoz. Et de s’en remettre à la sagesse du montagnard: «Comme sauveteur et comme guide, ce n’est pas ma manière de concevoir la montagne.»

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