Mercredi, 14h02. La délégation valaisanne embarque de Sion, direction Genève et son fameux Salon du livre. C’est jour de fête. L’hôte d’honneur se déplace en première classe ! Dans un wagon spécialement affrété. Emmenés par le chef du Service cantonal de la culture, Jacques Cordonier, des personnalités culturelles, des politiques et des écrivains qui agrémentent le voyage au bout du lac de quelques lectures à haute voix. L’ambiance est conviviale, tranchant avec l’aspect feutré de l’ «upper class» des CFF.

Martigny, Aigle, Lausanne, la délégation s’étoffe au fur et à mesure du trajet. A l’approche de la Cité de Calvin, chacun arbore une petite étiquette à l’effigie du Valais. Pas question de se perdre. Direction Palexpo et le stand valaisan occupant 500 m2 de la gigantesque halle. Si les livres y occupent forcément une place de choix, les produits du terroir ne sont pas en reste. «Le Valais. La culture par nature», on ne saurait trouvé slogan plus juste. Pour cause d'officialités, le stand se dégarnit quelques instants mais il est bien vite à nouveau pris d’assaut. La convivialité règne en maître entre deux poignées de main et tintements de verre. Une atmosphère propice aux confidences...littéraires. On a profité de l’occasion pour demander à six personnalités du canton le lien qu’elles entretenaient avec le livre, objet de toutes les attentions jusqu’à dimanche. Leur auteur fétiche, leur mode de «consommation», leurs premières émotions littéraires, leur rapport aux écrivains valaisans, autant de questions auxquelles elles et ils ont accepté de répondre, levant le voile sur une part de leur intimité.

Damian Constantin

©CHRISTIAN BONZON

L’occasion était trop belle pour le directeur de Valais/Wallis Promotion tout fier de présenter la nouvelle brochure vantant les charmes du canton. «Elle vient de sortir de presse, le hasard fait bien les choses», lance-t-il en souriant. Si les revues spécialisées et les ouvrages professionnels sur le «content management" monopolisent souvent son attention, le natif de Salquenen voit la lecture comme un puissant «anti-stress». Un effet relaxant pourtant seulement garanti par le contact avec le papier. «J’ai besoin de le sentir sous mes doigts." S’il confesse faussement honteux avoir dévoré la saga Harry Potter, c’est à Hermann Hesse qu’il doit ses plus grandes émotions littéraires. «Il fait partie de moi.»

Esther Waeber-Kalbermatten

©CHRISTIAN BONZON

L’agenda d’une conseillère d’Etat laisse peu de temps à la lecture, si ce n’est celle des journaux. «Je lis surtout en vacances quand j’ai l’esprit libre, et souvent je ne peux plus m’arrêter», raconte la ministre de la culture. Qui a glissé dans son sac à main pour Genève l’ouvrage d’une auteur suisse qu’elle apprécie tout spécialement, Eveline Hasler. Mais elle aurait tout aussi pu choisir un roman policier de l’Américaine Donna Leon qui met en scène le commissaire Brunetti. Ou «Purge» de Sofi Oksanen, un opus finlandais sur la soumission des femmes qui a profondément marqué la Haut-Valaisanne attachée à la cause féministe. Autant de livres qui garnissent aujourd’hui sa bibliothèque. Car pas question de renier le papier, la politicienne aime à le caresser.

Gabriel Bender

©CHRISTIAN BONZON

Au panthéon des auteurs du sociologue de Fully figurent en bonne place les Sud-Américains. Garcia Marquez, Sepulveda, Padura, des plumes exotiques qui ravissent celui qui est aussi écrivain. Mais pour la photo, il a choisi de poser avec un essai d’Ivan Illich daté de 1973 vilipendant la culture industrielle. «Dans ce bouquin, il y a tous les arguments contre les JO», lâche-t-il un brin sarcastique. Mais ce que préfère le chroniqueur des «Beaux parleurs» sur les ondes de la RTS, c’est parcourir la presse, suisse ou étrangère. «Même en Turquie, j’ai toujours un journal sur la table !» Et à la question de savoir quel auteur valaisan le séduit spécialement, un nom fuse: Raymond Farquet. La quintessence du sociologue écrivain à ses yeux. «Il a inventé un genre, je suis un peu jaloux.»

Sébastien Gattlen

©CHRISTIAN BONZON

De la Patrouille des glaciers au Salon du livre, c’est un peu le grand écart pour le municipal sédunois en charge de la culture. Tou juste arrivé de Zermatt, le physiothérapeute de formation, dont c’est la première visite au salon, avoue ne pas être un lecteur acharné. «Je commence quatre à cinq livres par an...» Le dernier qu’il a laissé en plan sur sa table de nuit, le récit de l’alpiniste bernois Ueli Steck dont le décès subit a stoppé net son élan littéraire. «Comme j’ai peu de temps à disposition, il faut qu’un livre soit instructif.» Un pragmatisme qui l’amène à préférer les atlas d’anatomie aux romans dont la plupart dorment dans des caisses à la cave, «ce qui fait rager ma femme», rigole l’élu PDC. Qui s’est empressé d’aller racheter «La Leçon» de Ionesco, découvert au collège, pour les besoins de la photo. «Ce doit être le seul écrit que j’ai lu deux fois !»

Sébastien Olesen

Le directeur du Palp Festival présent sur le stand valaisan pose avec «Sonnenschein» de Dasa Drndic. Découvert par hasard dans une librairie genevoise, ce roman historique a touché celui qui se décrit comme un lecteur «compulsif», boulottant quasi cinq livres par mois ! «Je n’ai pas de télé, faut bien s’occuper», plaisante le jeune homme aux goûts très éclectiques et qui aime rien moins que chiner. Sa curiosité naturelle l’empêche de se cantonner à un seul genre littéraire. «Je lis de tout.» De préférence le soir, chez lui. Un bon bouquin dans les mains. «La tablette, c’est pour le travail», ajoute le programmateur du Palp tout heureux de baigner dans les livres au salon.

Manuella Maury

Au Salon du Livre, la journaliste et initiatrice du festival de correspondance «Lettres de soie» à Mase est dans son élément. Pourtant, la Valaisanne se décrit comme une lectrice «infidèle». «J’ai besoin d’aller bien pour lire.» «Sa «consommation» fluctue donc énormément en fonction des ses occupations. Et dans les moments où elle peut «lever l’encre», elle goûte avec délectation la poésie. «C’est un peu comme les beaux paysages, c’est indispensable», s’emflamme la joviale quadragénaire. Qui se souvient être entrée en littérature à l’adolesence avec «L’écume des jours» de Boris Vian. Mais son auteur fétiche reste Romain Gary. «Aviateur du verbe, tout simplement au dessus de la mêlée.»

Quiz: êtes-vous incollable sur la littérature valaisanne?

Le Valais est l'hôte d'honneur du Salon du livre à Genève. L'occasion de tester vos connaissances sur la littérature valaisanne au travers de notre quiz.