Le Valais fait du pied à la biopharma, un marché en pleine croissance

En Valais, l’industrie de la biopharma emploie près de 5’500 personnes et représente 6% du PIB cantonal. Puissante et discrète, elle jouit d’un fort potentiel de développement qui cristallise les espoirs valaisans.

15 mars 2017, 11:16
/ Màj. le 15 mars 2017 à 17:30
Cette branche des sciences de la vie, vieille comme le monde, a fortement évolué depuis quelques années. Couplée à la chimie, la biologie et la pharmacologie, elle a pour objectif de créer des médicaments et des vaccins à partir de micro-organismes, de cellules ou de molécules du vivant.

Peu de gens le savent, mais beaucoup de médicaments qui recouvrent les étalages de nos pharmacies sont produits en Valais. Le Propofol, tristement célèbre pour avoir tué Michaël Jackson ? Son générique est produit en Valais. Le Kadcyla contre le cancer du sein et le Cimzia contre les affections inflammatoires? Encore des produits valaisans. Bien ancrée dans le canton, cette industrie du médicament regorge d’un potentiel de développement colossal et de fonds quasiment illimités. Le Valais l’a bien compris et, paré de ses plus beaux atours, joue la séduction à l’international.

Appels du pied

En 2012, la biopharma représentait 6% du PiB du canton et employait plus de 5’500 personnes, soit trois fois moins que le tourisme. Or, les autorités cantonales font les yeux doux aux acteurs internationaux du secteur et tentent, arguments à l’appui, d’attirer des entreprises en Valais. « C’est une niche sur laquelle on se focalise de plus en plus. On identifie des entreprises selon des critères bien précis et on essaie de les convaincre de venir s’installer en Valais » confirme Joselyne Pepin, responsable de l’unité Nouvelles Entreprises au service du développement économique du canton. Et le critère principal recherché, c’est la cohérence. « On fait attention à ce qu’une nouvelle entreprise ne fasse pas concurrence à une entreprise déjà installée, mais plutôt qu’elle soit complémentaire avec ce qui existe déjà afin de créer une plus-value ».

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Cet intérêt pour la biopharma ne doit rien au hasard. Il prend d’ailleurs tout son sens, lorsque l’on sait qu’aucun autre secteur économique en Valais - mis à part l’énergie - ne produit autant de valeur ajoutée par collaborateur. Et de loin.

 

Impact sur le PiB valaisan

 

Une infrastructure «inestimable»

Traditionnellement terre d’énergie et de tourisme, le Valais peut-il faire le poids face à la concurrence internationale ? Massimo Nobile, le responsable du site technologique Bioark de Monthey, en est convaincu. « Ce que les nouveaux acteurs de la biopharma recherchent en priorité, ce sont des entreprises à proximité pour fabriquer leurs produits. Grâce aux acteurs majeurs installés sur notre territoire, nous disposons déjà de toute l’infrastructure nécessaire, et ça a une valeur inestimable ».

S’il est malaisé d’attirer des entreprises en Suisse au vu des incertitudes politiques actuelles, la concurrence intercantonale n’est pas une sinécure pour autant. « C’est la guerre entre les cantons, mais au niveau de la biopharma, on est les seuls en Suisse romande à pouvoir offrir des solutions à chaque stade de développement. On bénéficie d’une chaîne de production complète, de la formation à la grosse industrie » détaille Jocelyne Pepin. Mais cet argument ne fait pas mouche à chaque fois, le dynamisme économique du pourtour lémanique brisant régulièrement les efforts valaisans. « Genève et Vaud sont des destinations très attirantes aussi, c’est sûr. L’année dernière, nous avons réalisé 42 visites d’entreprises potentiellement intéressées. Seulement dix se sont finalement implantées en Valais. Ce n’est pas toujours facile » convient-elle.

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Main d’œuvre qualifiée

La seconde force industrielle du Valais, c’est sa main d’œuvre. « On est le canton romand avec le plus de personnel spécialisé. En 2016, La Suisse romande comptait 25’000 emplois dans le domaine des sciences de la vie. Un quart d’entre eux se trouvent en Valais » affirme Massimo Nobile. Un argument d’autant plus important que les compétences de la main d’œuvre locale sont très particulières. « On s’est spécialisé dans le Hard To Make, des produits biopharmaceutiques très difficiles à fabriquer » précise-t-il. La Fondation The Ark a d'ailleurs inauguré ce mercredi à Viège un nouveau site technologique dédié aux sciences de la vie et aux biotechnologies.

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Un silence intriguant

Le canton regorge d’une main d’œuvre hautement qualifiée et de toute l’infrastructure nécessaire, et pourtant personne ne semble s’y intéresser. Comment une industrie dont les acteurs principaux s’appellent Lonza, Syngenta ou Huntsmann peut-elle rester si discrète ? Selon Massimo Nobile, il y a une double raison qui explique cette étrange situation. « C’est avant tout une question de déficit d’image. Beaucoup de personnes ont de la peine à imaginer un canton du Valais actif dans les hautes technologies. Pour elles, il vaut mieux avoir son QG à Bâle ou Genève qu’à Viège, même si elles ont été créées en Valais et que leurs sites de production se trouvent en Valais. Elles ne le crient pas sur les toits et les valaisans n’en ont pas forcément conscience ».

Ce manque de visibilité, Eric Balet, le président de l’Union des industriels valaisans (UIV) entend bien le combler. Avec l’aide de Valais/Wallis Promotion, une campagne de sensibilisation aux métiers de l’industrie sera prochainement lancée. « L’industrie valaisanne, et plus particulièrement le secteur des sciences de la vie, est amenée à se développer. Il est donc important que les Valaisans le sachent et se rendent compte de tout le potentiel qu’elle renferme » conclut-il. Encore faut-il qu’ils le désirent.