«Je n’ai pas souvenir d’avoir vu un degré de danger d’incendie si élevé, en Valais, avant le mois de juillet.» Ce jeudi 23 juin, dans les locaux du Service des forêts, de la nature et du paysage (SFNP), Jean-Marie Putallaz tire la sonnette d’alarme.

Sur la carte qui s’affiche sur son écran d’ordinateur, une grande partie de la plaine du Rhône apparaît en rouge vif. Cela signifie qu’entre Martigny et Brigue, le risque lié aux feux de forêt est de 4 sur 5. Il est considéré comme «fort», selon les critères du SFNP. Il est par contre «marqué» dans les vallées latérales.

Une carte tous les jeudis

«Actuellement, la vitesse de propagation d’un incendie peut être très rapide dans les régions les plus à risque», explique l’ingénieur forestier. Il insiste: «Les barbecues sur des foyers non officiels sont totalement interdits.»

Quelle que soit la saison, le SFNP actualise tous les jeudis la carte du danger d’incendie en Valais. Pour cela, il utilise un logiciel appelé Incendi, développé à la fin des années 2000 dans le canton des Grisons. Via cet outil, Jean-Marie Putallaz et ses collègues reçoivent en continu les données de dizaines de stations météorologiques disséminées en Valais.

Les températures et précipitations analysées

Pour réaliser leur carte, ils subdivisent le canton en 23 régions, dans lesquelles ils étudient les variations de température ainsi que les précipitations enregistrées. Ces données sont arrêtées chaque mercredi, en début d’après-midi.

«Pour affiner nos analyses et ainsi renforcer nos prévisions, nous utilisons également le portail Guardaval, qui permet un suivi en temps réel de l’évolution météorologique à une échelle très localisée», note Jean-Marie Putallaz. En parallèle, le SFNP est en contact avec les gardes-forestiers qui, sur le terrain, observent l’état des forêts valaisannes, et notamment leur degré de sécheresse.

Le degré de danger d’incendie est actuellement fort dans toute la plaine du Rhône. SFNP

«Enfin, nous suivons les prévisions de MétéoSuisse. C’est sur la base de toutes ces informations que nous générons notre carte hebdomadaire.» Une carte qui, après avoir été publiée sur le site du canton, est transmise à l’Office fédéral de l’environnement, aux médias ainsi qu’à MétéoSuisse, qui la diffuse sur ses supports numériques.

Un danger de degré 5 probable

En Valais, la fin du printemps 2022 a été marquée par de fortes et longues périodes de chaleur. La pluie s’est faite très rare. S’appuyant sur les données de Guardaval, Jean-Marie Putallaz indique que le déficit de précipitations, sur l’ensemble du canton, est en moyenne de 40% depuis début janvier.

Et les orages de ces derniers jours n’y changent rien. «En plus d’être localisées, ces perturbations orageuses sont de courtes durées. En forêt, comme l’eau de pluie est interceptée par la couronne des arbres, elle n’a pas le temps d’atteindre le sol et de s’y infiltrer avant que la chaleur ne soit de retour.»

Jean-Marie Putallaz analyse les données provenant de dizaines de stations météorologiques disséminées en Valais. Sacha Bittel

Cela explique le fort degré de danger d’incendie que connaissent certaines régions du canton ces jours-ci. A en croire Jean-Marie Putallaz, cela pourrait ne pas s’arranger dans les semaines à venir. «S’il ne pleut pas suffisamment, certaines zones pourraient passer en degré de danger 5, ce qui constituerait la dernière étape avant qu’une interdiction générale de faire du feu ne soit prononcée.» L’ingénieur forestier précise que seul Frédéric Favre, conseiller d’Etat chargé de la sécurité, a le pouvoir de décréter cette interdiction.

Tout un écosystème en alerte

En raison de cette situation particulière, des séances de coordination sont organisées presque chaque semaine entre le SFNP, l’Office cantonal du feu, la police cantonale et la cellule d’information et communication de l’Etat du Valais. «Afin de planifier au mieux les interventions en cas de départ de feu, des contacts sont aussi établis avec les différents corps de sapeurs-pompiers du canton et les gardes-forestiers. C’est donc tout un écosystème qui est mis en alerte», détaille Jean-Christophe Clivaz, chef du SFNP.

Je n’ai pas souvenir d’avoir vu un degré de danger d’incendie si élevé, en Valais, avant le mois de juillet.

Jean-Marie Putallaz, ingénieur forestier au Service de la forêt, de la nature et du paysage

S’il rappelle que chaque été amène son lot de surprises météorologiques, en ce qui concerne par exemple l’abondance ou non de précipitations, Jean-Marie Putallaz s’attend à voir de plus en plus d’épisodes de fortes chaleurs. «Nous allons devoir nous habituer à vivre avec un degré d’incendie qui sera élevé durant de plus longues périodes.»

Le Valais décrète une interdiction générale de faire du feu

Les grillades en plein air et les feux d’artifice sont désormais interdits dans tout le Valais à cause des risques d’incendie. Trois jours de pluie pourraient lever cette interdiction.