Et si notre liberté se limitait à quelques sorties dans le jardin? Difficile de se l’imaginer depuis que la Suisse a aboli toutes les mesures mises en place contre le Covid-19.

C’est pourtant de ce petit plaisir dont doit se contenter Michael Peuker, correspondant de la RTS radio en Chine. Cela fait quelques jours que le Sédunois résidant à Shanghai peut prendre l’air devant son immeuble, après avoir été confiné depuis le 8 mars.

«Le complexe résidentiel où je vis avec ma femme et mes deux enfants a été mis en quarantaine. S’en est suivi le lockdown complet», précise le journaliste, profitant de notre appel pour se dégourdir les jambes devant chez lui.

Fin mars, la moitié des 26 millions de résidents de Shanghai ont été confinés, rejoints le 5 avril par le reste de la population de la capitale économique.

Objectif zéro Covid

La politique zéro Covid a, jusqu’à présent, poussé la Chine à procéder à des confinements localisés. «Cette stratégie est rendue possible grâce aux technologies de traçage, qui sont à la pointe, et à l’organisation des habitations en complexes résidentiels, héritage de Mao», analyse Michael Peuker. En cas de contamination, tout le quartier, barricadé et surveillé, est confiné.

Les mises en quarantaine ciblées donnent lieu à des scènes insolites. «Il est tout à fait probable de se trouver confiné dans un centre commercial pendant 48 heures minimum si un cas y est décelé», assure le correspondant pour la RTS.

Il est tout à fait probable de se trouver confiné dans un centre commercial pendant 48 heures minimum si un cas y est décelé.

Michael Peuker, correspondant de la RTS radio en Chine

Le variant Omicron, très contagieux, a cependant mis cette stratégie à rude épreuve à Shanghai, que Pékin a décidé de confiner totalement. «On sentait que cela pouvait arriver, on avait cette épée de Damoclès au-dessus de notre tête depuis novembre», avoue Michael Peuker.

Pénurie de nourriture

Si le confinement pèse sur les résidents de Shanghai, leur moral est principalement entaché par le manque de denrées alimentaires, selon Michael Peuker. «Nous avons eu toutes les peines du monde à commander notre nourriture. L’approvisionnement en eau a été particulièrement difficile. A présent, on regroupe les commandes avec les gens de notre bâtiment. Il y a quelques jours, nous avons acheté pour des milliers de francs d’œufs», raconte le journaliste.

Ce dernier a récemment été témoin d’une scène préoccupante. Alors que des membres des autorités opéraient des contrôles dans le quartier voisin, des habitants sont sortis aux fenêtres. «Certains criaient qu’ils avaient faim», rapporte le Sédunois.

«Le spectre de la séparation hante les familles»

Tous les deux jours, Michael Peuker et sa famille doivent se soumettre à un test PCR. «Du personnel sanitaire en combinaison blanche vient sonner à notre porte et nous escorte jusqu’à un poste de dépistage», précise le journaliste. En attendant les résultats, les habitants retiennent leur souffle.

Le spectre de la séparation hante les familles. Les enfants testés positifs sont envoyés dans des unités pédiatriques spécialisées.

Michael Peuker, correspondant de la RTS radio en Chine

«Si on est testés positifs on est envoyé dans un centre de quarantaine. Soit dans un conteneur préfabriqué soit, dans le pire des cas, dans une immense halle sans douches et où la lumière reste allumée en permanence», détaille le journaliste. «De plus, le spectre de la séparation hante les familles. Les enfants testés positifs sont envoyés dans des unités pédiatriques spécialisées.»

Lundi 11 avril, le confinement s’est assoupli pour 40% des complexes résidentiels de Shanghai. Si aucun cas n’a été déclaré depuis plus de 14 jours dans un quartier, ses habitants peuvent sortir dans un périmètre défini. «Mais c’est le comité de quartier qui a le dernier mot. Où j’habite, personne n’est positif au Covid et pourtant, on ne peut pas quitter la cour de l’immeuble», constate Michael Peuker.

Où j’habite, personne n’est positif au Covid et pourtant, on ne peut pas quitter la cour de l’immeuble.

Michael Peuker, correspondant de la RTS radio en Chine

Depuis le début de la pandémie, la pratique de son métier s’est corsée. «Le Covid a considérablement limité les possibilités de se déplacer, sans compter le fait que les autorités utilisent la pandémie comme un moyen supplémentaire de nous interdire l’accès à certains endroits», déplore Michael Peuker, qui ne pense pas pouvoir revoir sa famille en Suisse avant la fin de son mandat, courant 2023, les allers-retours avec la Chine étant compliqués.

Quelques heures après l’entretien, un cas positif a été détecté dans un bâtiment de sa zone résidentielle. «A priori, nous sommes à nouveau enfermés pendant 14 jours mais les autorités doivent nous le reconfirmer», écrit le journaliste.

Covid: Shanghai confinée, un Valaisan expatrié raconte

Les images d’habitants en détresse et de parents séparés de leurs enfants circulent sur les réseaux depuis que Shanghai est confinée. Sur place, le Sédunois Michael Peuker, correspondant en Chine pour la RTS, raconte.