Pour les porteurs du projet, comme pour les opposants, c’est le dernier moment pour convaincre. Lundi 18 novembre, lors d’une assemblée primaire extraordinaire, les citoyens de Massongex trancheront: oui ou non à la modification du plan d’affectation de zones (PAZ) et du règlement communal de gestion des déchets. Ces deux objets ont pour but de permettre à l’entreprise Famsa, exploitante de la carrière, de poursuivre un projet d’extension du périmètre d’extraction et d’aménagement de décharges pour des déchets issus de l’incinération.

Craignant les conséquences d’un tel projet sur l’environnement et la santé des habitants, le Comité citoyen régional mobilise autour du non. «Le Nouvelliste» a provoqué une rencontre entre un de ses membres, Christophe Grüring, et la présidente de Massongex, Sylviane Coquoz, pour un dernier échange avant le vote.

Madame Coquoz, le projet fait-il l’unanimité au sein du Conseil communal?

Sylviane Coquoz (S.C.): Oui, nous avons examiné le dossier de près et il a obtenu le consensus. Depuis plus de vingt ans, nous signons des conventions avec l’entreprise Famsa. Elle a acquis notre confiance en prouvant qu’elle respecte ses engagements.

Monsieur Grüring, avec votre groupe d’opposants, vous dénoncez un projet «mal ficelé», quels sont les points qui ne sont pas satisfaisants?

Christophe Grüring (C.G.): D’une manière globale, nous trouvons le dossier incomplet. Vu l’ampleur du projet, le rapport d’impact sur l’environnement est lacunaire. Il ne permet en tout cas pas de se projeter de manière suffisante et de faire une vraie pesée d’intérêts.

S.C.: Le rapport fourni correspond parfaitement aux exigences de procédure. A cette étape, les citoyens sont appelés à se prononcer sur un objet ayant trait à l’aménagement du territoire. Des études d’impact plus détaillées devront être réalisées dans le cas d’une future procédure d’autorisation de construire.

Il faut que le résultat du vote soit représentatif de la population.

Sylviane Coquoz, présidente de la commune de Massongex

Le Comité citoyen régional ne s’oppose-t-il pas à l’idée même d’un projet?

C.G.: Non, nous ne sommes opposés ni à la Famsa ni à la commune, c’est le projet tel qu’il est présenté qui nous pose problème, et qui a provoqué 350 oppositions. Nous sommes pour un projet plus mesuré, accompagné d’études indépendantes.

S.C.: Les bureaux spécialisés qui ont présenté leur rapport il y a dix jours lors d’une séance publique sont indépendants. Ils ne travaillent pas à Famsa et leur rapport a été validé par les autorités cantonales.

Sacrifie-t-on la qualité de vie de la population qui vit proche du site?

C.G.: Les riverains sont particulièrement affectés par certaines nuisances comme le bruit, mais les risques liés au projet touchent tout le monde. Les questions de qualité de l’air, de l’eau, concernent toute la région, au-delà même de la commune de Massongex.

Et la commune conserverait son attractivité?

S.C.: Complètement, car le but n’est pas d’augmenter la production mais de la maintenir au niveau actuel. Les craintes de voir la valeur immobilière des biens à proximité diminuer ne sont pas fondées.

La poursuite de l’extraction est une chose, mais l’aménagement d’une décharge de type D (matériaux issus de l’incinération de déchets) suscite des craintes, liées notamment aux risques de pollution…

S.C.: Il manque de sites adéquats pour ce type de décharge, celui de Massongex fait partie du nouveau plan directeur cantonal. C’est notre responsabilité d’accueillir les déchets que nous produisons. Nous bénéficions des expériences faites dans le passé, et les normes ont beaucoup évolué. Les recherches dans ce domaine vont vers la revalorisation.

C.G.: C’est justement parce que nous avons accès à de nouvelles technologies, développées avec des objectifs de durabilité, que nous pensons qu’un autre projet est possible. Ailleurs en Suisse romande, des projets de décharge ont récemment été rejetés par les communes et leur population; les gens demandent plus de garanties. Nous ne disons pas «pas dans notre jardin», nous tenons à être responsables en envisageant des solutions plus réfléchies.

Nous tenons à être responsables en envisageant des solutions plus réfléchies.

Christophe Grüring, membre du Comité citoyen régional

Famsa est un contribuable important. Un argument qui fait pencher la balance?

S.C.: Les apports financiers de Famsa à la commune ne sont pas négligeables. Mais cela ne change rien à notre manière d’analyser le dossier. L’entreprise contribue à la bonne santé économique de tout le Chablais et surtout, la richesse qu’elle exploite ne se trouve pas partout.

C.G.: Nous sommes conscients des intérêts financiers en jeu. En tant qu’habitants de la commune, ceux-ci ont également un impact sur nous. Mais la santé des habitants prime. Si les activités de la carrière devaient cesser, nous pensons que d’autres solutions seraient trouvées.

Un mot pour conclure?

C.G.: Ce projet de cette taille mériterait plus de temps et plus de ressources. Notre opposition est mal accueillie car elle vient déranger un projet tout paqueté. A ce stade-là, trop d’incertitudes et de risques non éclairés persistent pour faire confiance au promoteur du projet.

S.C.: J’espère que la population a pris conscience de l’importance du dossier et qu’elle se déplacera lundi pour venir voter lors de l’assemblée primaire. Pour que le Conseil communal se sente légitime dans la suite du processus, il faut que le résultat du vote soit représentatif de la population.

Pas de mot d’ordre des partis

La section PDC a organisé deux rencontres pour ses membres, «afin qu’ils aient accès à toutes les informations nécessaires», indique son président Yannick Ruppen. Si aucune consigne de vote n’est donnée, «le parti se positionne pour» complète-t-il. Du côté du PLR et du PS, pas de mot d’ordre non plus. Et «bien malin celui qui pourrait prédire l’issue du vote de lundi», confient leurs représentants.

«Allez voter», affiche Famsa sur la page d’accueil de son site internet. En début de semaine, l’entreprise faisait parvenir aux habitants de Massongex un tous-ménages dans lequel elle clarifie point par point les affirmations tirées du dossier diffusé par les opposants du Comité citoyen régional. Elle revient également sur les conséquences d’une cessation de ses activités et rappelle les compensations environnementales prévues. Des portes ouvertes sont organisées le matin du samedi 16 novembre, sur inscription.

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