Erigée à flanc de coteau, l’église de Vouvry se laisse admirer loin à la ronde. «Elle a été bâtie là-haut parce que c’était la seule façon pour Dieu d’être au-dessus des Tsinos», avait coutume de sourire l’ancien président de commune Albert Arlettaz, s’amusant de ce côté «glorieux» qui fait la réputation des habitants du lieu.

Plus prosaïquement, le choix de l’emplacement s’explique par le fait qu’à l’époque «la plaine était un vaste marécage», rappelle Marc Mariaux. Le président du conseil de gestion de la paroisse catholique de Vouvry souligne néanmoins combien cette situation privilégiée donne une dimension particulière à cet édifice bicentenaire. «D’où que l’on vienne, il attire le regard et, de fait, non seulement nos paroissiens mais l’ensemble de la communauté peuvent se l’approprier. Il fait partie du patrimoine local et régional.»

Une église sans pilier

Consacrée le 7 juillet 1822, l’église se dresse sur un ancien site cultuel dont on sait peu de choses. Elle y a remplacé celle du XVe siècle, devenue trop exiguë. Pour pallier ce manque de place, les Vouvryens n’ont pas fait les choses à moitié, la nouvelle bâtisse mesurant 45 mètres de long et son transept 28 mètres: «Avec ses 9000 m³, ce lieu de culte est presque deux fois plus volumineux que celui de Monthey (5800 m³ environ)», reprend celui qui est aussi président du comité d’organisation du bicentenaire. «Il ne comporte aucun pilier. Tout le poids repose sur les murs, dont l’épaisseur atteint 1 m 90!»

D’où que l’on vienne, l’église attire le regard. Et, de fait, non seulement nos paroissiens mais l’ensemble de la communauté peuvent se l’approprier. Elle fait partie du patrimoine.

Marc Mariaux, président du conseil de gestion de la paroisse de Vouvry et du comité d’organisation du bicentenaire

Le style s’inspire des églises baroques italiennes. Du précédent édifice de style gothique, il ne reste que quelques éléments, dont l’ancien bénitier, le clocher et sa flèche octogonale ainsi que le double vitrail du chœur. «C’est l’un des rares vitraux valaisans du XVe siècle de ce format et de cette qualité qui soit bien conservé», relève Marc Mariaux. «Celui de gauche représente l’abbé de Saint-Maurice Guillaume Bernardi implorant saint Maurice et celui de droite le maître d’ouvrage et donateur Jean De Nucé (ou Dunoyer) agenouillé devant saint Hippolyte en armure.»

L’orgue fabriqué par Jean-Baptiste Carlen entre 1822 et 1831 figure parmi les plus grands instruments historiques du Valais. Il est classé d’intérêt national. Ses flûtes sont en grande partie faites grâce aux donations d’étain des familles de Vouvry. © Le Nouvelliste

Ambivalent saint patron

C’est à ce dernier qu’est dédiée l’église de Vouvry. Un saint patron fêté le 13 août, mais dont l’histoire n’est pas sans ambivalence puisque ce théologien érudit et docteur de l’Eglise fut aussi considéré comme le premier antipape. Entré en conflit avec Calixte Ier qu’il accusait d’hérésie et d’excessive indulgence à l’égard des pécheurs, Hippolyte fut en effet choisi par une minorité comme évêque de Rome.

Présentant à gauche saint Maurice et à droite saint Hippolyte en armure, le double vitrail gothique du chœur est l’un des rares vitraux valaisans du XVe siècle de ce format et de cette qualité qui soit si bien conservé. © Guillaume Allet

Selon la légende, il existerait aussi un saint Hippolyte soldat ou geôlier. Au fil du temps, «le souvenir du prêtre, docte et martyr, s’était complètement estompé mais le retour à ce personnage non seulement édifiant mais historique également a été l’œuvre du regretté curé de Vouvry, le chanoine Charles Giroud», raconte l’historien de l’art et archéologue Gaëtan Cassina dans le livre «L’église Saint-Hippolyte de Vouvry». «Abandonnant une tradition séculaire au profit de la vérité, le desservant de la paroisse a eu le mérite de dissiper toute équivoque en opérant un choix résolument moderne, conforme à l’attitude de l’Eglise postconciliaire sans renier le passé pour autant: la statue du docteur accueille le visiteur à l’entrée de l’église, le vitrail du soldat l’attend au fond du chœur!»

Un bicentenaire rassembleur

Pour célébrer le bicentenaire de l’église paroissiale, une série d’événements sont prévus tout au long de l’année. «Nous n’avons pas voulu réduire cet anniversaire à un seul jour car on n’a pas souvent l’occasion de vivre un tel jubilé», s’enthousiasme Marc Mariaux. «Le programme se veut rassembleur et tous les habitants de la commune ainsi que les Vouvryens de cœur, toutes croyances confondues, sont invités à participer à ces moments de retrouvailles et de partage.»

Tous les habitants de la commune ainsi que les Vouvryens de cœur, toutes croyances confondues, sont invités à participer à ces moments de retrouvailles.

Marc Mariaux, président du comité d’organisation du bicentenaire

Quatre temps forts liturgiques sont prévus, dont la messe solennelle présidée par l’évêque de Sion Mgr Jean-Marie Lovey le 23 janvier ou la messe de clôture de la Sainte-Cécile le 20 novembre. La célébration des Rameaux et la fenêtre de l’avent auront une dimension œcuménique.

S’y ajouteront divers rendez-vous culturels. Du 11 mars au 3 avril, une exposition rétrospective à l’Espace culturel sera couplée à des visites guidées de l’église.

Le 12 juin, le titulaire des orgues de l’abbaye de Saint-Maurice Tomas Kientz et le ténor Charles Barbier, directeur de la musique et chantre de cette même abbaye, donneront un concert à l’église de Vouvry.

D’août à octobre, un concours de création collective sur le thème «Raconte-moi notre église… hier, aujourd’hui, demain» sera ouvert principalement aux enfants.

Le 10 septembre, la Journée des familles permettra de bénir la statue souvenir en fer qui sera installée sur le parvis de l’église. Créée par le sculpteur français Jean-Pierre Augier, cette «Jeune femme élancée offrant deux colombes» traduit le thème du bicentenaire: l’ouverture vers l’autre.

En souvenir du jubilé, une statue créée par le sculpteur français Jean-Pierre Augier sera installée sur le parvis et bénie en septembre. © Photomontage/DR

Son histoire
1204 Première mention d’un site cultuel à l’emplacement de l’église actuelle. Depuis cette date, la paroisse de Vouvry a été desservie par la congrégation des chanoines du Mont-Joux (Grand-Saint-Bernard), jusqu’en 1995. Le diocèse de Sion prendra ensuite le relais.
XVe siècle Le clocher actuel a été érigé de 1436 à 1448 par Falco Gallien. Entre 1460 et 1496, le chœur et la nef de l’église gothique sont construits par Jean De Nucé (ou Dunoyer).
1819-1822 Construction de l’église actuelle, conçue par l’architecte veveysan Jean Baptiste Villa.
2022 Célébrations du bicentenaire.

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