L’actu
Les meilleurs spécialistes de ski-alpinisme du monde font étape à Morgins de mardi à vendredi prochains dans le cadre de la 4e étape de Coupe du monde de la saison. A la maison, les athlètes suisses auront à cœur de briller. Des athlètes qui, depuis cet été, sont pris en charge par leur nouvel entraîneur national, le Chalaisard Jean-Philippe Fartaria.

A Vercorin, là où il est établi, Jean-Philippe Fartaria baigne dans son élément. En altitude. Proche de la nature, des pistes de ski et autres départs d’itinéraires de randonnées. Qu’elles soient hivernales ou estivales. Tout petit, celui qui a grandi à Chalais a été gagné par la montagne. «Je me suis immédiatement retrouvé dans ce milieu. L’escalade de bloc, notamment. Avant de toucher à toutes les disciplines de la montagne, de la cascade de glace au ski, en passant par le freeride et le ski de randonnée.»

Plus jeune, il a aussi enfourché son VTT et a ajusté ses revers raquette de tennis en mains dans le cadre de compétitions régionales. Sans oublier le foot, «un peu comme tout le monde».

Le Valaisan qui voue une affinité depuis toujours au sport n’a pourtant pas grandi dans une famille de sportifs. «Pas forcément, non. Mais mon papa a pris part à de nombreuses épreuves de course à pied», note celui dont les parents disaient qu’il «avait trop d’énergie».

Avec la pratique du sport, mes parents cherchaient à m’occuper. Ils ont trouvé la solution avec les sports d’endurance qui étaient très efficaces pour me fatiguer.

Jean-Philippe Fartaria, entraîneur national élites

«Avec la pratique du sport, ils cherchaient à m’occuper», rigole-t-il. «Ils ont trouvé la solution avec les sports d’endurance qui étaient très efficaces pour me fatiguer.»

Il ne se voyait pas au bureau toute une vie

Maturité gymnasiale en poche, la carrière estudiantine de Jean-Philippe Fartaria le mène d’abord une année sur les bancs de l’EPFL puis deux à l’école d’ingénieurs. «Même si ça me plaisait, je ne me voyais pas rester dans un bureau toute ma vie.»

Jean-Philippe Fartaria se tourne alors vers le monde du sport. Après un bachelor en sport à Neuchâtel, il enchaîne avec un master en sciences du sport du côté de Lausanne. Il ajoute encore une corde à son arc avec un master en pédagogie de l’éducation physique. Tourné vers l’enseignement à titre formel, il consacre son temps libre à des stages qui touchent au sport de performance. Au CSS (Centre sportif et santé) de Lausanne, il rencontre notamment Joachim Staub. «Il m’a vraiment donné la passion de la préparation physique et de l’entraînement.»

J’aime prendre le sportif dans son entier et ne pas uniquement me concentrer sur la performance ou le sport. J’essaie de comprendre comment l’athlète fonctionne et réfléchit.

Jean-Philippe Fartaria

Touche-à-tout, de son expertise des sciences du sport en passant par la psychologie et la pédagogie, il a pu encadrer ces sportifs en les analysant dans leur globalité. C’est cette approche qu’il privilégie désormais. «J’aime prendre le sportif dans son entier et évite de ne me concentrer que sur la performance ou le sport. J’essaie de comprendre de quelle manière l’athlète fonctionne et réfléchit. Je suis à son écoute. C’est avec cette méthode que je parviens à l’aider au mieux. Je cherche d’abord la santé et le bien-être de l’athlète qui lui permettent ensuite de performer. L’inverse, à savoir chercher la performance en priorité, peut déboucher sur des résultats plus rapides mais non durables. Cette méthode use les sportifs.»

Motivé et dévoué

Sa vision, il essaie aujourd’hui de la développer au sein de l’équipe suisse de ski-alpinisme dont il est l’entraîneur. Après avoir fait ses armes auprès de skieurs amateurs et d’aspirants-guides.

C’est très plaisant d’avoir un entraîneur autant motivé et dévoué.

Aurélien Gay, membre de l’équipe nationale de ski-alpinisme

«Jean-Philippe s’est bien intégré à l’équipe. Très professionnel, il a de grandes connaissances dans le sport d’endurance. C’est très plaisant d’avoir un entraîneur aussi motivé et dévoué. Même s’il est assez nouveau dans le milieu du ski-alpinisme de compétition, il s’intéresse beaucoup au milieu et apprend très vite. C’est un plus pour toute l’équipe suisse de pouvoir compter sur un entraîneur comme lui», apprécie Aurélien Gay, l’un des 22 athlètes de Coupe du monde sous les ordres de Jean-Philippe Fartaria.

Dans son activité professionnelle, Jean-Philippe Fartaria n’hésite pas à bousculer les codes en amenant un vent de fraîcheur à une discipline qui ne s’est pas réellement remise en question ces dernières années.

Vercorin le, 26 janv. 2023 : Ski-alpinisme: portrait de la semaine de Jean-Philippe Fartaria, le nouvel entraîneur en chef de l'équipe de Suisse élite + espoirs. ©Sacha Bittel © Le Nouvelliste SA / Sacha Bittel

«Des choses étaient faites par routine, sans que les gens ne se demandent pourquoi ils les faisaient. Il faut pourtant sans cesse remettre en question ce qui est fait pour savoir ce qu’on peut améliorer. On doit aussi individualiser et différencier l’entraînement au maximum. Ce qui fonctionne pour un athlète ne marchera pas forcément pour un autre», note l’entraîneur, prenant l’exemple concret de l’échauffement.

On doit sans cesse remettre en question ce qui est fait pour savoir ce qu’on peut améliorer.

Jean-Philippe Fartaria

«Ils n’avaient pas d’échauffement spécifique. Or, se préparer de la même manière avant un sprint ou une individuelle n’a aucun sens. On a donc testé de nouveaux échauffements. Cela leur permet d’avoir une routine d’avant course qui les sécurise et qui les met dans un état de concentration optimal.»

Pour un développement sans renier ses origines

L’arrivée du Chalaisard dans l’équipe nationale n’était pourtant pas gagnée. Dans le ski-alpinisme, il avait commencé par des jeunes au Centre régional ouest (CRO) de ski-alpinisme à Fribourg avant de s’occuper de l’athlète élite Marianne Fatton ainsi que des frères Bussard. «Puis j’ai postulé pour le poste d’entraîneur de la relève, pour lequel j’ai été refusé. Plus tard, j’ai vu passer une offre pour le poste auprès des élites.»

Le jeune homme tente de nouveau sa chance. Convoqué pour une heure d’entretien, il subit un véritable examen théorique. «J’avais l’impression de représenter ma thèse de master», rigole-t-il. «Mais ça tombait bien parce que j’aime me former en continu. J’estime que, dans cette fonction, on a besoin d’une bonne base scientifique. On ne doit pas uniquement se reposer sur le feeling ou l’expérience du terrain.»

Je peux comprendre que toute évolution ou tout changement peut effrayer. Mais pour développer notre sport, on doit faire preuve d’ouverture.

Jean-Philippe Fartaria

L’arrivée du Valaisan à la tête de l’équipe élites coïncide aussi avec la nouvelle ère dans laquelle est entrée le ski-alpinisme, discipline olympique dès 2026. Une nouvelle qui n’a pas toujours été bien accueillie dans le milieu. C’est qu’aux JO, seuls le sprint et le relais seront représentés, deux épreuves qui ne représentent pas au mieux l’essence du sport selon de nombreuses personnes qui craignent qu’il se dénature.

«La discipline reine qui est à origine du ski-alpinisme, c’est l’individuelle. Je suis sensible aux valeurs que véhicule cette discipline», rappelle Jean-Philippe Fartaria. «Je peux comprendre que toute évolution ou tout changement peut effrayer. Mais pour développer notre sport, on doit faire preuve d’ouverture. Cela passe par de meilleures médiatisation et attractivité pour le public. Mais on ne doit pas laisser tomber l’individuelle et la verticale.»

Jean-Philippe Fartaria

31 ans

A grandi à Chalais, habite à Vercorin

Entraîneur de l’équipe suisse de ski-alpinisme élites

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