SYLVIE OBERSON, HISTORIENNE
Lausanne ne bouge plus. Il est passé le vent de révolte qui, en 1980-1981, avait poussé la jeunesse lausannoise à se rebeller contre le paternalisme ambiant, et l'absence de lieux et de moyens pour s'exprimer. A Lausanne, c'était alors le Comptoir suisse qui symbolisait l'ordre établi et cristallisait sur lui la grogne. Un pouvoir qu'il a perdu au fil du temps. A la devanture des boutiques de luxe de Saint-François et de l'Ale - aujourd'hui en partie disparues - on pouvait ainsi lire, barbouillé à la hâte: «Tout est gratuit!» Et les graffitis, peu à peu, recouvraient les murs gris. Le temps était aussi aux matraques, aux gaz lacrymogènes et aux poursuites dans les ruelles pavées de la capitale vaudoise. Révolte violente, mais pas haineuse.
«La vie, vite!» réclamaient simplement les centaines de jeunes marginaux et déclassés qui embrasaient les rue de Zurich, d'abord, puis celles de...