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Haut-Valais: et au milieu coule une rivière... polluée au mercure

A Turtig, village le plus touché, le calme est de rigueur. Les citoyens craignent davantage pour leur portemonnaie que pour leur... santé.

10 janv. 2014, 06:52
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Mardi soir, la population haut-valaisanne a été avertie d'une pollution au mercure dans le Grossgrundkanal ainsi que dans une partie des sols de la plaine du Rhône entre Viège et Niedergesteln. L'annonce a été faite direc- tement par Jacques Melly, chef du Département des transports, de l'équipement et de l'environnement. Le problème était cependant connu depuis 2011 suite à des sondages réalisés dans le cadre de la construction de l'autoroute. Après cette découverte, diverses investigations ont été menées. La Lonza a accepté de mandater la première étape des investigations techniques qui ont débouché sur les résultats présentés mardi soir. Principale zone touchée, le village de Turtig dont dix parcelles sur les trente-six analysées présentent des teneurs en mercure supérieures à la valeur limite pour les zones d'habitation.

L'endroit pourrait ressembler à Saxon ou à Fully. Un petit canal s'écoule au milieu d'une zone résidentielle. Au loin, un pont métallique barre le panorama. Des petites maisons avec pelouse sont disséminées de chaque côté du cours d'eau. Nous sommes à Turtig, petit hameau haut-valaisan devenu tristement célèbre en début de semaine. Une importante pollution au mercure a en effet été découverte dans une dizaine de parcelles situées à côté du Grossgrundkanal (voir rappel des faits).

Si l'ampleur des dégâts n'a pas encore été précisément estimée, le Service cantonal de la protection de l'environ nement a édicté des mesures urgentes: "L'utilisation des parcelles fortement polluées (au-dessus de cinq milligrammes de mercure par kilo de sol) en tant que jardins privés et places de jeux pour enfants est interdite jusqu'à ce que les surfaces soient assainies. Dans les secteurs présentant des concentrations de mercure situées entre 0,5 et 5 milligrammes par kilo, il est recommandé officiellement de ne pas manger de denrées alimentaires provenant des jardins pollués."

 

Enfants privés de jeu

 

A Turtig, ces mesures relativement drastiques, plutôt que de provoquer la peur, prêtent à sourire. "Du jour au lendemain, nos enfants ne peuvent plus jouer à l'extérieur sur la balançoire. Hier, ils avaient invité des amis, nous avons dû annuler. C'est une situation assez cocasse" , témoigne Katia Abgottspon qui habite à proximité du canal incriminé. Elle ajoute: "On nous dit de ne plus manger des légumes plantés sur les terrains mais mes parents et toute la famille ont toujours mangé les pommes de terre cultivées sur ces parcelles. Il y a aussi beaucoup de pêcheurs qui pratiquent leur passion sur les berges du canal." Et personne n'a jamais été malade? "Non, je n'ai jamais entendu parler de problèmes de santé."

 

Gare à la facture

 

Si pour l'instant, de nombreuses interrogations planent encore sur les conséquences précises de cette pollution, les habitants redoutent surtout l'aspect financier. "En plus de la présentation officielle des autorités, nous avons reçu un courrier de cinq pages recto verso nous présentant les différents éléments. Apparemment, si notre terrain ne dépasse par une certaine valeur de mercure, les travaux d'assainis- sement seront à nos frais. Il faudra excaver la terre et ensuite financer le transport en Hollande pour la décontaminer. Nous n'avons pas les moyens pour une pareille opération" , déplore Katia Abgottspon. L'habitante voit un autre problème pointer à l'horizon: "Inévitablement, ma maison va perdre de sa valeur. Qui va me rembourser cette différence?"

 

Grosse perte foncière?

 

Un problème partagé quelques centaines de mètres plus bas par un autre résident: "Je n'ai pas prévu de planter de jardin et de toute façon, la salade, je la mange dans les Big Mac. Je ne me fais donc aucun souci pour ma santé. Par contre, que vont devenir les nombreuses parcelles à construire polluées? Déjà qu'elles ont été récemment classées dans une zone inondable, est-ce que les propriétaires vont tout perdre?" Mystère complet pour l'instant. "Nous n'en sommes qu'au début de la procédure. Il est impossible de chiffrer les coûts des opérations d'assainissement ou une éventuelle perte de valeur des maisons et des terrains. Une commission a été créée avec les communes de Viège, Baltschieder, Niedergesteln et Rarogne pour traiter ce problème. Avant toute chose, nous devons continuer les analyses du sol pour connaître précisément l'ampleur de la pollution. Ensuite nous discuterons avec la Lonza et l'Etat du Valais afin de savoir qui paie quoi" , précise Reinhard Imboden, président de la commune de Rarogne.

A Turtig, on ne se fait pas beaucoup d'illusions. "Mardi lors de la séance de présentation, la Lonza a reconnu avoir pollué le canal mais elle décline toute responsabilité pour les épandages ou l'eau du canal utilisée pour l'irrigation. Nous ne sommes qu'au début d'un long combat" , conclut Katia Abgottspon.

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