Il y a neuf ans déjà, Sion recevait le prestigieux Prix Wakker. Par cette distinction, Patrimoine suisse récompensait alors la mue amorcée depuis plusieurs années par la capitale valaisanne qui se matérialise notamment à travers les aménagements des espaces publics du centre-ville en harmonie avec son patrimoine et son paysage.

Mais est-ce que Sion a maintenu cette ligne directrice? Pour évoquer cette question, échanger sur la notion de patrimoine et discuter plus généralement de l’impact du Prix Wakker sur le Valais et Ernen, autre commune valaisanne lauréate en 1979, une table ronde s’est tenue ce samedi matin à Sion.

La rue des Remparts sous le soleil de mai 2022. Photo: Louis Dasselborne

Une attention aux espaces publics qui perdure

Au moment de distinguer la capitale valaisanne, la Commission de Patrimoine suisse se disait séduite par la qualité de la revalorisation successive de la Place du Midi (2003), de l’Espace des Remparts (2005), du Grand-Pont (2008) et de la Rue de Lausanne (2010).

«Il faut se rappeler qu’à un moment donné, il n’y avait plus personne à Sion», note Magali Anne Bonard, présidente de la section Valais romand de Patrimoine suisse. «Depuis cette transformation, la vie est revenue en ville sur les terrasses et dans les espaces publics. Il y a une volonté de développer un art de vivre».

La Ville de Sion a pris le pli. Et cette attention portée à l’aménagement de l’espace public pour le bien vivre en ville se prolonge à travers les projets actuels.

Jean-Paul Chabbey, architecte de la Ville de Sion

Jean-Paul Chabbey, architecte de la Ville de Sion, n’était pas encore en poste en 2013. Mais pour lui, le chemin tracé avant le Prix Wakker n’a pas été abandonné depuis. «Cette récompense n’a en tout cas pas été vécue comme un accomplissement, mais comme une reconnaissance de la voie choisie. La Ville de Sion a pris le pli. Et cette attention portée à l’aménagement de l’espace public pour le bien vivre en ville se prolonge à travers les projets actuels».

La tension entre patrimoine et développement

En cours de réalisation à l’époque, l’inventaire patrimonial des bâtiments sédunois construits entre 1850 et 1975 avait aussi retenu l’attention du jury du Prix Wakker. Sa finalisation, alors que la Ville de Sion continue de croître rapidement, n’empêche toutefois pas toutes les frictions entre protection du patrimoine et développement urbain.

Il y a de la bonne volonté et Sion apparaît plutôt comme un bon élève, encore aujourd’hui, face au patrimoine.

Magali Anne Bonard, présidente de la section Valais romand de Patrimoine suisse

«Maintenant que cet inventaire a été fait, la période de destruction est quand même terminée», relève Magali Anne Bonard. «Il y a de la bonne volonté et Sion apparaît plutôt comme un bon élève, encore aujourd’hui, face au patrimoine. De temps en temps, on doit tirer la sonnette d’alarme et s’opposer à des projets pour ouvrir un dialogue avec la Ville».

Interrogé sur sa relation au patrimoine l’architecte de la ville sédunoise a insisté sur la nécessaire pesée d’intérêts entre sauvegarde et développement. «Le patrimoine doit être appréhendé dans une vision dynamique. Ce n’est pas quelque chose de figé et ce n’est pas uniquement regarder dans le rétroviseur. Ce qu’on réalise aujourd’hui c’est aussi le patrimoine de demain».

Le paysage c’est aussi du patrimoine. Le futur passe par cette prise en compte.

Monique Keller, architecte et membre de la commission Prix Wakker 2013

Et le patrimoine naturel

Pour Monique Keller, architecte et membre de la commission du Prix Wakker 2013, il faut développer une vraie culture du bâti même si le patrimoine ne se résume pas aux constructions. «Le paysage c’est aussi du patrimoine. Le futur passe par cette prise en compte».

Il est peut-être déjà en marche. À l’image du Prix Wakker qui a récompensé Meyrin en 2022 notamment pour son traitement des espaces verts afin de préserver la biodiversité. Parmi les espaces remarqués par Patrimoine Suisse, on trouve par exemple le Lac des Vernes. Un bassin artificiel qui sert à la fois de refuge à de nombreux oiseaux, contribue à la gestion des eaux de la commune et offre aussi un espace de détente et de promenade.

Avant Sion, Ernen lauréat en 1979
Avant Sion, Ernen avait reçu le Prix Wakker en 1979. Essentiellement pour la conservation de son centre historique. L’enjeu du développement urbain apparaît très éloigné de la réalité de la petite commune haut-valaisanne. Mais sans cette contrainte Ernen est-elle parvenue à toujours maintenir le cap en matière de protection de son patrimoine depuis cette récompense? Pas totalement selon son représentant à la table ronde. «Avec le développement de résidences secondaires, il y a eu beaucoup de constructions», commente Peter Clausen. «En quarante ans, même si Ernen reste belle, elle n’est pas devenue plus belle et je ne suis pas sûr qu’elle recevrait ce prix à nouveau».

Prix Wakker 2023: la petite ville st-galloise de Lichtensteig récompensée

Lichtensteig, une petite ville du Toggenburg, dans le canton de Saint-Gall, a reçu mardi le prix Wakker 2023. Elle a été récompensée pour l’animation innovante de ses espaces inoccupés.