L'initiative de l'UDC "pour les familles" discrimine les ménages à deux revenus au profit des couples où seule une personne travaille. La ministre des finances Eveline Widmer-Schlumpf a lancé mardi la campagne du Conseil fédéral contre une déduction d'impôts pour les parents gardant leurs enfants à la maison.
La grande argentière était flanquée pour l'occasion du président de la conférence des directeurs cantonaux des finances Peter Hegglin. Selon elle, la législation actuelle a le grand avantage de traiter tous les modèles de familles sur un pied d'égalité.
Les parents peuvent déduire 6500 francs par an et par enfant de l'impôt fédéral direct, à quoi s'ajoutent 700 francs pour les primes d'assurance maladie. Ils sont en outre taxés à un barême spécial, qui prévoit une déduction sur le montant de l'impôt de 251 francs par enfant et par an.
Depuis 2011 s'est ajoutée une déduction pour frais de garde par des tiers. Elle peut aller jusqu'à 10'100 francs par an et par enfant. L'initiative de l'UDC, en votation le 24 novembre, demande que les familles qui gardent leur progéniture à la maison ou la font garder sans contrepartie financière reçoivent une indemnité au moins égale.
Inégalité de traitement
Pour le Conseil fédéral, l'égalité de traitement serait alors remise en cause. La famille traditionnelle serait avantagée en bénéficiant d'une déduction quand bien même elle n'a pas de frais supplémentaires à éponger et qui diminueraient son revenu effectif. L'initiative pousserait ainsi les couples à renoncer à un second revenu.
Or le droit fiscal n'a pas vocation à influencer le choix de vie. Pis, les propositions de l'UDC portent atteinte à l'égalité homme-femme et à la croissance. La déduction actuellement proposée pour la garde des enfants a permis de mieux concilier vie familiale et professionnelle.
Les mères en ont notamment bénéficié: cette mesure simplifie leur retour à la vie active et la hausse de leur pensum professionnel. La présence plus importante des femmes sur le marché du travail est en outre source de croissance économique et de rentrées fiscales supplémentaires. Et la mise sur pied de places d'accueil pour les enfants crée des emplois.
Pertes fiscales
La formulation de l'initiative laisse ouverte la question du montant de la déduction pour les parents gardant eux-mêmes leurs enfants. En leur accordant à tous le maximum de 10'100 francs. La Confédération devrait faire une croix sur 320 millions et les cantons sur 66 millions. Ceci rien qu'au niveau de l'impôt fédéral direct (IFD).
Le manque à gagner pour les recettes fiscales cantonales et communales serait de l'ordre du milliard de francs par an. Seuls trois cantons accordent en effet une déduction pour garde à la maison: le Valais (jusqu'à 3000 francs), Zoug (6000 francs), Lucerne (2000 francs).
Une autre solution serait de ne plus accorder de déduction du tout. L'IFD engrangerait alors 60 millions de plus.