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Exil fiscal: Paris fâche la Suisse

La décision de Paris de durcir le ton contre ses exilés fiscaux en Suisse provoque d'importants remous. La Confédération entend vérifier la légalité de pareilles mesures et regrette de n'avoir pas été informé officiellement.

07 janv. 2013, 19:12
En France, le Conseil constitutionnel a censuré samedi la contribution à 75% sur les revenus annuels de plus d'un million d'euros. Elle était l'une des promesses phares de François Hollande pendant sa campagne présidentielle.

La décision de la France de durcir le ton contre ses exilés fiscaux en Suisse provoque des remous. "La Confédération entend analyser si les mesures prises par la France sont juridiquement compatibles avec l'accord de double imposition", a indiqué lundi le Secrétariat d'Etat aux questions financières internationales (SIF).

Dans une prise de position transmise à l'ats, le SIF "regrette de ne pas avoir été informé officiellement" par la France de sa décision de ne plus accorder le bénéfice de la convention de double-imposition pour les Français installés en Suisse et payant un forfait fiscal dit "majoré".

"Cela montre la nécessité d'aborder ce genre de dossier par un dialogue constructif, comme cela avait été convenu lors de la rencontre entre Eveline Widmer-Schlumpf et François Hollande en décembre à Paris", a encore réagi le SIF.

Cette décision unilatérale intervient en effet peu après la visite en décembre dernier à Paris de la présidente de la Confédération. Mme Widmer-Schlumpf avait alors fait part de son optimisme quant à la capacité des deux pays à trouver un terrain d'entente "par le dialogue" sur ces dossiers épineux.

"Tolérance" datant de 1972

Le texte, publié le 26 décembre au Bulletin officiel des finances publiques, concerne les Français établis en Suisse au bénéfice d'un forfait fiscal qui exercent encore une activité professionnelle en France ou y perçoivent des dividendes.

La "tolérance" appliquée par la France existait depuis 1972 et permettait à ses bénéficiaires de ne payer des impôts qu'en Suisse - hormis un prélèvement forfaitaire sur les dividendes -, étant considérés comme domiciliés fiscalement dans ce pays.

Ils acceptaient en échange de payer leurs impôts en Suisse sous la forme d'un forfait fiscal dit "majoré", qui prend comme assiette les dépenses estimées et non les revenus.

Partis politiques bourgeois critiques

Du côté des partis politiques, les critiques se faisaient aussi entendre. Le président du PLR Philipp Müller estime que l'attitude de la France est un "affront". Mais selon lui, il ne s'agit pas d'un acte isolé visant la Suisse, mais plutôt d'une action plus globale dans le contexte de la crise de la dette actuelle.

Pour le vice-président de l'UDC Luzi Stamm, "lorqu'un Etat comme la France serre la vis par rapport à ses citoyens, cela me fait de la peine pour les Français, mais c'est leur problème interne." Il estime important que la Suisse continue d'offrir la possibilité d'une imposition forfaitaire.

Le chef du groupe parlementaire PDC Urs Schwaller se montre également peu compréhensif face aux exigences de Paris. "Le pays essaie de se détourner de ses propres problèmes", a-t-il dit à l'ats, "alors qu'il devrait plutôt se préoccuper de ses taux d'imposition élevés".

Du côté socialiste, on estime que ce que propose le gouvernement Hollande correspond aux positions du PS suisse, a dit en substance le chef du groupe socialiste, Andy Tschümperlin.

"Déclaration de guerre"

Ce week-end, le conseiller d'Etat vaudois Pascal Broulis (PLR) s'était montré le plus réactif. Il s'était dit "surpris" et "choqué". Paris "dénonce des conventions, mais une convention, c'est un partenariat. Si c'est unilatéral, c'est une déclaration de guerre, une de plus de la part de la France", a-t-il affirmé.

Interrogé lundi sur les ondes de l'émission "Forum" de la RTS, le sénateur UMP de Haute-Savoie Pierre Hérisson juge lui la décision du gouvernement français "brutale". "Il a manqué quelque chose dans la relation entre la France et la Suisse, et ça c'est nouveau". Il aurait en outre souhaité que le parlement français soit informé avant.

Selon un spécialiste de la fiscalité de l'association "Valeur Ajoutée Suisse" - qui milite pour la préservation de l'impôt forfaitaire - le changement de régime en France était prévisible.

L'expert voit trois possibilités pour les exilés fiscaux français: soit ils acceptent la convention de double imposition, soit ils coupent leurs liens avec la France ou alors ils se soumettent au régime fiscal de droit commun en Suisse, auquel cas ils seraient toujours imposés plus bas qu'en France.

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