La plupart des personnes souffrant de lombalgie - une affection caractérisée par des douleurs entre la douzième côte et le pli fessier - se remettent généralement en six à douze semaines. Mais pour une minorité, la maladie devient chronique, et la guérison incertaine. Le traitement de ces patients représente 85% des coûts totaux que génèrent les lombalgies, soit près de six milliards de francs par an en Suisse, a indiqué jeudi le Fonds national suisse (FNS).
Yves Henchoz, du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) à Lausanne, avec des collègues de l’Université du Québec à Trois-Rivières s'est intéressé au rôle que joue la peur de la douleur dans cette transition.
Les chercheurs ont demandé à 22 personnes en bonne santé et à 22 patients souffrant de lombalgie chronique de fléchir puis de relever le tronc. Ce faisant, on leur a appliqué au bas du dos une thermode de contact diffusant trois niveaux de chaleur: indolore, faiblement douloureuse ou douloureuse. Avant chaque contact, les participants étaient renseignés sur la stimulation qu'ils allaient ressentir.
Rigidité musculaire
Durant l'expérience, les scientifiques ont mesuré les mouvements du tronc et l'activité des muscles lombaires. Résultat: ce sont les personnes en bonne santé qui sont le plus influencées par la peur de la douleur: plus cette peur est forte, plus elle conduit à une rigidité musculaire. Chez les patients atteints de lombalgie chronique, les attentes face à la douleur élevée génèrent moins de changements neuromusculaires.
Les chercheurs expliquent ces données par le fait que ces patients sont crispés même pendant les flexions avec application de chaleur indolore. Leur stratégie motrice étant plus figée, ils s’adaptent moins bien à l'environnement. Ils s’enferment dans un cercle vicieux: craignant la souffrance associée au mouvement, ils perdent leur mobilité, et la douleur perdure.
Premier anti-douleur
Lors de six des 27 flexions-extensions effectuées par les participants, les chercheurs ont manipulé leurs attentes face à la douleur par des instructions faussées: alors qu'ils appliquaient une chaleur élevée, ils annonçaient une douleur faible. Les personnes en bonne santé tout comme celles souffrant de lombalgie ressentaient alors moins la douleur au contact de la thermode très chaude.
Par conséquent, il semblerait que le premier antidouleur à administrer à un patient atteint de lombalgie aiguë soit une bonne dose de paroles rassurantes, afin de prévenir le passage à la chronicité de la maladie, selon ces travaux publiés dans la revue en ligne "The Spine Journal".