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Le poids des préjugés pèse toujours

En Suisse, les personnes infectées par le VIH sont toujours stigmatisées. La Journée mondiale contre le sida invite à lutter contre cette discrimination.

30 nov. 2016, 23:37
/ Màj. le 01 déc. 2016 à 00:01
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La Journée mondiale contre le sida – qui a lieu aujourd’hui 1er décembre – a été créée en solidarité avec les personnes séropositives afin, notamment, de mettre un terme à la discrimination que subissent trop souvent les personnes qui sont infectées par le VIH. Au moment de rédiger cet article, nous avons donc cherché à contacter des personnes susceptibles de témoigner dans nos pages au sujet de cette stigmatisation. Malgré la possibilité de le faire anonymement, personne n’a répondu, par honte, tabou ou crainte d’être reconnu. Le constat est tristement sans appel: les personnes qui sont infectées subissent toujours le lourd poids des préjugés. «C’est là le vrai défi dans la lutte contre le VIH sur le sol helvétique aujourd’hui: déstigmatiser les personnes qui sont porteuses du virus», explique Johanne Guex, coordinatrice de l’Antenne sida Valais romand.

Un sujet tabou qui rend les séropositifs invisibles

Les préjugés ont la peau dure et les personnes infectées par le VIH subissent souvent une discrimination quotidienne. C’est cet homme dont l’assurance individuelle d’indemnités journalières lui a été refusée sous prétexte de sa séropositivité. Cette employeuse touchée par le VIH et menacée d’être dénoncée par une collaboratrice licenciée. Ce locataire dont le contrat de sous-location a été refusé après que son bailleur a découvert son statut sérologique. «Dans la procédure de recrutement de certaines entreprises, on demande explicitement le statut VIH. Malgré l’intervention de l’Aide suisse contre le sida, cette question est toujours maintenue.»

Cette stigmatisation entraîne une invisibilité terrible pour les personnes séropositives: «Les enjeux sont différents aujourd’hui, explique Johanne Guex. Ce qui est source de souffrance n’est plus le poids du traitement ou les effets secondaires mais la discrimination sociale due aux peurs ou préjugés infondés. De plus, les personnes récemment infectées évoquent moins la séropositivité, en raison de la double culpabilité qu’ils peuvent ressentir, d’avoir été informés des causes et conséquences du VIH et de l’avoir contracté malgré tout. Cette culpabilité va renforcer leur isolement et leur mutisme. Or, moins on parle du virus, plus on en fait un sujet tabou.» Pour preuve, l’absence de témoin souhaitant s’exprimer dans nos pages. Une constatation d’autant plus grave que la Suisse dispose aujourd’hui des moyens médicaux et financiers pour faire en sorte, grâce aux dépistages et aux traitements, que l’espérance de vie d’une personne porteuse du virus soit identique à celle d’une personne non infectée.

De l’importance du dépistage

En Valais, on comptait en 2014 dix-neuf nouveaux cas de diagnostic positif, ce qui correspond à un à deux tests positifs par mois. Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas les personnes séropositives qui risquent le plus de propager le virus, mais bien celles qui pensent être séronégatives et qui ont des rapports non protégés. «Aujourd’hui, en Suisse, les personnes sous traitement dont la charge virale est indétectable (ndlr: la quantité de virus dans le sang et le sperme ne se détectent plus depuis au moins six mois) ne sont plus celles qui transmettent le virus.» Pour remplir ces conditions, il faut faire contrôler régulièrement l’efficacité de son traitement et n’être porteur d’aucune infection sexuellement transmissible.

Ce constat, connu de l’OFSP depuis 2008, n’a pas été explicitement relayé, de peur que la population sous-estime la nécessité de se protéger et que cela n’entraîne une recrudescence des infections. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que le risque zéro n’existe pas, mais qu’une personne séropositive qui suit un traitement en Suisse et dont la charge virale est indétectable peut tout à fait fonder une famille et bien vivre sa sexualité. Comment expliquer dans ce cas que cette population soit toujours stigmatisée? Une méconnaissance du VIH pourrait être à l’origine du problème. «Sans doute la Suisse a-t-elle des progrès à faire en matière de prévention, avance Johanne Guex. Elle se trouve à un moment charnière puisqu’elle commence à accuser un certain retard vis-à-vis des pays voisins comme la France, où il est possible de se procurer des autotests en pharmacie qui, même s’ils nécessitent un accompagnement, restent très fiables.»

Ne plus diaboliser le VIH

Face à la détresse que peuvent éprouver les personnes infectées par le VIH, l’Antenne sida du Valais romand offre des moments d’écoute et de conseils. L’Aide suisse contre le sida propose quant à elle des consultations juridiques. Afin de sensibiliser la population à ce problème, il est essentiel que les personnes puissent discuter entre elles, évoquer à nouveau leur statut sérologique, sans tabou ni idée reçue. Malheureusement, certains projets comme le «projet écoles» (ndlr: qui voyait des personnes séropositives témoigner dans les écoles) ne sont plus d’actualité en Suisse depuis 2012. «La nouvelle génération de personnes infectées ne souhaitent plus témoigner en raison du risque d’exclusion sociale», comme le constate Johanne Guex.

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