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L’intelligence à haut potentiel: un défi pour tous

Objectivé par des tests cognitifs et un bilan psychologique, le haut potentiel intellectuel se caractérise par un mode de fonctionnement cérébral singulier, mais pas seulement. des travaux scientifiques ont permis de mettre en évidence ces intelligences particulières grâce à l’imagerie cérébrale.

16 nov. 2019, 08:00
/ Màj. le 22 avr. 2021 à 08:00
Les enfants HP ne sont pas forcément plus intelligents, mais ils ont une forme d’intelligence différente.

On les dit précoces, surdoués, ou à haut potentiel intellectuel. Quel que soit le qualificatif qu’on leur attribue, ces enfants se distinguent par une pensée singulière, rapide, foisonnante.

Souvent, ils mettent au défi leurs parents et le système scolaire. Les neurosciences se sont intéressées de plus près à ce phénomène qui touche environ 2 à 3% des enfants. Il a été démontré, grâce à l’imagerie cérébrale, que ceux dits à «haut potentiel» ont un fonctionnement cognitif différent.

Leur activité cérébrale est plus intense, «comme un moteur ou un processeur plus puissant qui permet davantage de rapidité et de qualité de traitement des stimuli externes ou des informations internes mémorisées», décrit Fanny Nusbaum, docteure en psychologie et chercheuse associée en psychologie et neurosciences à l’Université de Lyon, dans son livre Les philo-cognitifs*, qu’elle co-signe avec Olivier Revol, pédopsychiatre, chef du Service de psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent des Hospices civils de Lyon, et Dominic Sappey-Marinier, chercheur en neurosciences à la Faculté de médecine de Lyon.

Leurs recherches ont montré une connectivité cérébrale significativement plus importante chez ces enfants, non seulement au sein de chacun de leurs hémisphères mais également de l’un à l’autre.

Une pensée foisonnante et rapide

Leur pensée, souvent décrite comme étant en arborescence, est à la fois rapide et multiple. Leur vivacité d’esprit impressionne, de même que leurs capacités de compréhension et de mémorisation. Ils font preuve de fulgurances lorsqu’ils trouvent des solutions de manière intuitive sans savoir par quel chemin ils y sont parvenus.

Et surprennent lorsqu’on s’aperçoit des connaissances qu’ils ont acquises sans effort particulier. Maîtres dans l’art de faire des liens entre les événements vécus, ce sont des êtres créatifs, doués pour conceptualiser les choses. Questionnements existentiels sur l’origine de la vie ou la mort, leurs préoccupations dépassent celles des enfants de leur âge.

 

Laminaire ou complexe?

Pourquoi certains enfants dits HP réussissent à exploiter leur potentiel alors que d’autres en souffrent? Fanny Nusbaum, docteur en psychologie et chercheuse associée en psychologie et neurosciences à l’Université de Lyon, a mis en évidence dans ses recherches plusieurs profils parmi ces intelligences atypiques: les «complexes» et les «laminaires». Chez les premiers, les tests cognitifs révèlent des résultats hétérogènes entre les différents indices évalués, alors que chez les seconds, la valeur très élevée du QI est associée à une homogénéité des résultats aux différentes composantes du test. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) a par ailleurs montré une suractivité des régions cérébrales régissant les processus émotionnels et perceptifs chez les individus complexes, et une activité plus importante des zones cérébrales impliquées dans le contrôle, l’inhibition et la rationalisation chez les laminaires. Ces observations pourraient expliquer pourquoi certains enfants HP – les complexes – se trouveraient en difficulté dans leurs apprentissages et dans leurs relations. Malgré leurs fortes capacités intellectuelles, ils auraient plus de peine à canaliser cette sensibilité exacerbée.

 

Leur curiosité, quand elle n’est pas assouvie, peut les conduire à un ennui profond, notamment à l’école. Très tôt, ils sont capables d’humour et ont une maîtrise précoce du langage, comme l’explique Olivier Revol: «La syntaxe apparaît tôt, sans qu’ils ne passent par le «parler bébé».

Car ces perfectionnistes ne font les choses que quand ils les maîtrisent totalement. Par exemple, ils ne vont pas à quatre pattes et savent marcher dès qu’ils se lâchent.»

Dans ses travaux, le Dr Olivier Revol a montré que, dès la naissance, ces enfants ont un regard très scrutateur, qui est selon lui un premier signe de connexion neuronale.

L’école: un lieu révélateur

C’est souvent lorsque l’enfant est en âge scolaire que la question du haut potentiel se pose. «Il a envie d’aller à l’école, mais il s’y ennuie fermement. Il ne se retrouve pas dans les activités, les lectures et les discours des autres, décrit Laurence Chappuis, psychologue à Lausanne.

En effet, alors qu’ils ont une grande curiosité et un fort besoin de complexité, on leur propose quelque chose de linéaire et inadapté à leur niveau.» Provocation, débordements, relations compliquées avec les pairs…l’école peut devenir un lieu de souffrance.

Alors que les enfants HP ont une grande curiosité et un fort besoin de complexité, l’école leur propose quelque chose de linéaire et d’inadapté.»
Laurence Chappuis, psychologue

Malgré leurs importantes facilités, ils ne réussissent pas toujours à montrer toutes leurs compétences, allant parfois jusqu’au décrochage scolaire. Leur comportement pose parfois problème sans que personne ne réussisse à en élucider les raisons. C’est souvent dans ces circonstances qu’un bilan psycho - logique est demandé par les parents et/ou les enseignants.

Le test de qi

Un psychologue ou un neuropsychologue lui fera alors passer un test de QI. Un quotient intellectuel de 130 ou plus(la norme se situant entre 85 et 110) objective le haut potentiel. Mais ces tests ne sont pas infaillibles et doivent être complétés par des éléments cliniques. Il arrive que l’enfant n’ait pas montré toutes ses capacités au moment du test, par manque de motivation, d’envie ou de fatigue passagère. De même, les résultats peuvent être faussés par la présence d’un trouble de l’apprentissage (dyslexie, par exemple) ou d’un déficit d’attention, pas encore diagnostiqués.

Il arrive par ailleurs que des écarts trop importants entre les différents scores obtenus dans chacun dessous-tests (verbal, logico-mathématique, concentra - tion visuelle et auditive) ne permettent pas de déterminer le QI global. D’où l’importance de découvrir qui est l’enfant, explique Laurence Chappuis: «Nous regardons comment il réfléchit, quelles questions il se pose, comment il écrit, dessine, raisonne logiquement, mémorise et réagit quand il est seul face au test.» Les âges auxquels il a dit ses premiers mots et où il a appris à lire sont d’autres éléments à prendre en considération, surtout lorsque le résultat au test de QI se situe dans une zone grise.

D’un point de vue plus global, «on remarque souvent un décalage entre leur intelligence, leur âge biologique et affectif», poursuit la psychologue.

 

Pour les parents, ce ne sont pas des enfants faciles à éduquer. Ils argumentent en permanence, remettent les règles en question… istock

Bombardement émotionnel et sensoriel

Car ce fonctionnement particulier dépasse la sphère cognitive. Ils vivent les émotions et perceptions avec une grande intensité. Ce sont des enfants très observateurs, aux sens extrêmement fins(hyperesthésie) et toujours en alerte, et peuvent facilement être submergés par tout ce qu’ils ressentent.

Lorsque ce trop-plein ­émotionnel est mal géré, il peut s’exprimer physiquement par des maux de tête, de ventre, de l’urticaire, etc. Cette hyperesthésie peut les faire passer aux yeux des autres pour des individus pénibles et intolérants à la frustration. D’un autre côté, ce sont des êtres sensibles avec une grande lucidité et beaucoup d’empathie.

Ils ont un sens aigu de la loyauté, mais ont aussi un fort besoin de contrôler. «Cette rage de maîtriser, cette idéalisation de ce que le monde, le couple parental, les amis devraient être, peut générer chez eux désillusion et colère.» Pour les parents d’ailleurs, ce ne sont pas toujours des enfants faciles à éduquer, car ils n’obéissent pas les yeux fermés et ont de la repartie.

Chez les enfants à haut potentiel, on remarque souvent un décalage entre leur intelligence, leur âge biologique et affectif.»
Laurence Chappuis, psychologue

Ils argumentent en permanence, remettent les règles en question, voient et se souviennent de tout, et ressentent les failles de leurs parents. Les questions sans réponse sont pour eux source d’anxiété. «Ils ne sont pas comme les autres, mais ils restent des enfants. Il faut maintenir un cadre et des limites», conseille le Dr Revol, qui prône une fermeté bienveillante.

Heureusement, la plupart des enfants à haut potentiel vont bien et vivent leur différence comme une chance. D’autres en revanche se sentent incompris et souffrent d’être en décalage à l’école ou dans leurs relations avec les pairs.

Tout l’intérêt d’un bilan cognitif et psychologique réside alors dans l’opportunité de donner du sens à ce vécu, de restaurer leur estime de soi, mais aussi de trouver des solutions concrètes (adaptation du milieu scolaire, cours ou établissements spécialisés) pour leur permettre d’exploiter tout leur potentiel dans les apprentissages. Les parents quant à eux pourront bénéficier de conseils pour accompagner au mieux leurs enfants.

Infos pratiques

Lecture: *Les Philo-cognitifs. Ils n’aiment que penser et penser autrement, de Fanny Nusbaum, Olivier Revol, Dominic Sappey-Marinier, Ed. Odile Jacob, 2019.
Association suisse pour les enfants à haut potentiel (asehp) : En savoir plus : https://asehp.ch/
Association Collectif HP : En savoir plus : https://www.hautspotentiels.ch/

 

Retrouvez cet article dans notre magazine «Votre Santé» en cliquant sur la couverture ci-dessous.

 

 

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