Sous pression, et menacé par une peine de prison pouvant aller jusqu’à deux ans et une amende salée, Steve Bannon a finalement dit oui. L’ancien conseiller de Donald Trump témoignera devant la commission parlementaire qui enquête sur l’assaut du Capitole.

Prévenu d’entrave à la justice en novembre 2021 pour avoir justement refusé de témoigner, Bannon, 68 ans, a reçu le feu vert de l’ancien président des Etats-Unis. Il devrait dire ce qu’il sait des événements qui ont précédé cet assaut mené par des milliers de partisans de Trump, qui a fait plusieurs morts et secoué la démocratie américaine le 6 janvier 2021.

«C’est le moment d’attaquer»

«M. Bannon souhaite, et préfère en fait, témoigner dans votre audition», a écrit son avocat Robert Costello. Selon la commission d’enquête, l’ex-conseiller, qui n’était plus officiellement en lien avec Donald Trump, a exercé une certaine influence le jour de l’assaut auprès de l’ancien-président. «Tout converge et c’est le moment d’attaquer», aurait-il dit.

C’est la dernière ligne droite à Washington. La commission spéciale du Congrès reprend ses audiences publiques ce mardi et devrait boucler, sauf surprise, ses séances jeudi. Bannon devrait témoigner à huis clos. La commission, qui n’a aucun pouvoir judiciaire, espère pouvoir démontrer le rôle prépondérant de Donald Trump dans l’événement meurtrier.

Rôle des nationalistes blancs

L’audience du jour se concentrera principalement sur le rôle des groupes nationalistes blancs, comme les Proud Boys ou les Oath Keepers, qui auraient conduit l’assaut. Selon certaines affirmations, ces groupes étaient censés régler leur compte à la démocrate et présidente de la chambre des Représentants Nancy Pelosi ainsi qu’au vice-président Mike Pence.

L’ex-président, qui avait placé ses espoirs dans l’ancien gouverneur de l’Indiana pour contester l’élection de 2020, serait devenu vert de rage – ou rouge au vu du ketchup qu’il a fait gicler sur les murs de la Maison Blanche – devant le refus de Mike Pence d’aller dans son sens. Donald Trump aurait lâché qu’il devait «être pendu».

«Je suis le putain de président»

Ces révélations ont été divulguées par Cassidy Hutchinson, ancienne adjointe du directeur de cabinet de la Maison Blanche Mark Meadows. Le bureau de la jeune femme de 26 ans n’était situé qu’à quelques mètres du Bureau ovale. Au cours de la demi-douzaine d’audiences publiques qui ont eu lieu jusqu’ici, c’est sans doute celle-là qui a été la plus frappante.

Cassidy Hutchinson a révélé que le président Trump était parfaitement conscient que ses partisans qu’il avait envoyés au Capitole étaient armés et dangereux. Il aurait également voulu se rendre sur place, mais s’est retrouvé face à un membre du Secret Service qui l’a empêché de prendre la voiture pour des raisons de sécurité.

«Je suis le putain de président», se serait emporté Trump en l’empoignant par le cou. Cassidy Hutchinson affirme également que Donald Trump ne s’est pas inquiété le moindre du monde lorsqu’il a été informé de la violence qui était en cours, ou que son vice-président était en danger.

Le milliardaire n’a évidemment pas manqué de fustiger et nier les déclarations de Cassidy Hutchinson. Mais Pat Cipollone, ancien conseiller juridique du président, a confirmé vendredi, dans une audience tenue à huis clos, les propos de la jeune femme. Il a également souligné qu’au lendemain de l’assaut, Donald Trump était prêt à accorder son pardon à plusieurs hautes personnalités impliquées comme son avocat Rudy Giuliani et Mark Meadows. Cassidy Hutchinson avait aussi déclaré que des membres du congrès ou des personnes proches de Trump avaient cherché à obtenir la grâce présidentielle.

Poursuites incertaines

La grande question est désormais de savoir si Donald Trump risque des poursuites judiciaires et pourrait être inculpé. Les preuves apportées par la commission devraient permettre au ministre de la Justice Merrick Garland de poursuivre le New-Yorkais, alors que le FBI mène sa propre enquête.

Mais Garland ne serait pas forcément prêt à franchir le pas, alors que plus de 60% des Américains estiment Donald Trump coupable d’incitation à la violence. «Des poursuites mal menées pourraient renforcer Trump et même l’aider à être réélu», mettait en garde récemment le chroniqueur Edward Luce dans le Financial Times.

Alors à quoi aura servi toute cette enquête? L’enjeu est bien sûr politique. Pour les démocrates, mal positionnés en vue des élections de mi-mandat de novembre, c’est un atout bienvenu pour tenter de retourner une partie de l’opinion publique en leur faveur, grâce à la diffusion d’audiences sur les principales chaînes de télévision.

Les Républicains sont déterminés à remporter ces élections. L’électeur trumpiste n’aura cure des résultats de la commission qu’il estime biaisée dès le départ. En revanche, les électeurs indépendants pourraient vraiment penser à deux fois avant de voter pour Trump en 2024.

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