Les dirigeants français et russe, François Hollande et Vladimir Poutine, ont réussi la prouesse de se parler "une bonne heure" en marge du sommet de Brisbane, en Australie, sans même prononcer le mot Mistral, le nom du navire de guerre que la France a vendu à la Russie. L'information émane de l'entourage du chef de l'Etat français.
Lors de leur rencontre bilatérale, François Hollande et le numéro un russe se sont contentés de propos lourds de sous-entendus et d'un langage corporel sans ambiguïté: poignée de mains glaciale et visages fermés.
En guise d'entrée en matière, M. Poutine a appelé son homologue français à "minimiser les risques et les conséquences négatives" des tensions internationales sur les relations entre leurs deux pays.
Quant à François Hollande, il s'est dit "toujours prêt à poursuivre cette relation mais à une condition, c'est que cela puisse déboucher", évoquant la crise ukrainienne et les efforts déployés avec la chancelière allemande Angela Merkel et le président ukrainien Petro Porochenko pour la résoudre.
Un proche de l'Elysée l'a laissé entendre samedi: le silence de Paris sur le Mistral relevait plutôt d'une "stratégie" visant à maintenir la pression sur Moscou. "Le G20 n'est pas l'endroit où l'on annonce une décision bilatérale, il ne faut pas mélanger les genres", avait déjà prévenu la veille l'entourage de M. Hollande.
Pression sur Paris
Une dépêche de l'agence de presse russe Ria Novosti, citant une source "haut placée" à Moscou, avait fait monter la pression d'un cran vendredi. La France se voyait sommée par cette source anonyme de livrer un premier Mistral avant fin novembre. Paris s'exposait sinon à de "sérieuses" demandes de compensation.
Les Mistral, des "bâtiments de projection et de commandement" (BPC) vendus par la France à la Russie en juin 2011 pour 1,2 milliard d'euros, sont au centre d'un imbroglio diplomatico-militaire depuis que François Hollande a décidé début septembre de lier leur livraison à un règlement politique de la crise en Ukraine.
Le président français a répété depuis à plusieurs reprises que le cessez-le-feu devait être "entièrement respecté" en Ukraine, avant que Paris ne procède à la livraison du premier navire, le "Vladivostok", une livraison initialement prévue en octobre.