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Attentats de Paris, un an après: l’état d’urgence, une menace pour les droits humains

Décrété quelques heures après les attentats meurtriers de Paris le 13 novembre 2015 et prolongé depuis à quatre reprises, l’état d’urgence en France soulève des problèmes et inquiète des ONG qui appellent à une vigilance accrue dans le but de réduire les risques d’abus.

04 nov. 2016, 08:51
/ Màj. le 10 nov. 2016 à 17:55
L'état d'urgence en France, acceptée après les attentats de novembre 2015, ne fait plus l'unanimité. Il est même dénoncé par des organisations qui luttent pour les droits humains.

Quelques heures seulement après les attentats meurtriers de Paris le 13 novembre 2015, le président français François Hollande déclare l’état d’urgence pour 12 jours…

L'état d'urgence a ensuite été prolongé par le Parlement jusqu’au 26 février 2016. Mais le 22 janvier, François Hollande annonce que le gouvernement veut le reconduire pour 3 mois à partir du 26 février 2016. Manuel Valls, Premier ministre, déclare: «Nous ne pouvons pas vivre tout le temps avec l’état d’urgence mais tant que la menace est là nous devons utiliser tous les moyens […] jusqu’à ce qu'on puisse, évidemment, en finir avec Daech.»

Le 20 avril, rebelote. Une prolongation est décidée jusqu'à l'Euro et au Tour de france, événements sportifs susceptibles de devenir la cible de terroristes.

 

L'attentat de Nice change la donne

Quelques heures avant l’effroyable attaque au camion à Nice du 14 juillet, le président François Hollande déclare que «les pouvoirs liés à l’état d’urgence prendraient fin le 26 juillet 2016, parce que leur utilisation de manière illimitée signifierait que la France n’est plus une République.» 

Mais l’horreur des événements va changer la donne. Aux trois mois de prolongations demandés par Hollande, le Parlement, pressé par l'opposition, en rajoute trois autres. Le 21 juillet, il décide d’étendre et de prolonger l’état d’urgence dans le pays pour six mois supplémentaires. Une décision qui inquiète certaines associations, comme Human Rights Watch. Au lendemain de cette annonce, cette ONG demande au gouvernement de «renforcer les garanties afin que les pouvoirs liés à l’état d’urgence ne soient utilisés que dans la stricte mesure nécessaire».

L'état d’urgence ne peut pas être un état permanent, avait reconnu le Ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve le 20 juillet dans Le Monde. Human Rights Watch l’invite à respecter cette déclaration. 

Perquisitions, saisies et mises en détention

Pendant et après les attentats de Paris, la situation exceptionnelle à laquelle était confrontées les autorités françaises justifiait la déclaration d’état d’urgence pour un délai limité. Mais sa prolongation répétée, le nombre d’actions entreprises en son nom et le peu d’instructions finalement menées posent des questions. Ces mesures étaient-elles vraiment nécessaires et proportionnelles pour prévenir de «futurs attentats terroristes», but visé par les autorités?

Des collectifs voient le jour: "Nous ne céderons pas" ou encore "Stop état d'urgence".

Le samedi 30 janvier, des milliers de personnes manifestent en France pour demander la fin de l'état d'urgence. Elles exigent aussi réclament également l'abandon du projet de déchéance de nationalité pour les personnes condamnées pour des activités terroristes. Elles dénoncent "des mesures qui heurtent et mettent à mal nos libertés au nom d'une hypothétique sécurité".

 

Les pouvoirs de l’état d’urgence risquent de porter atteinte aux droits à la liberté, à la sécurité, à la liberté de mouvement, au respect de la vie privée, et à la liberté d’association et d’expression, selon Human Rights Watch.

Amnesty International dénonce également une série d’opérations abusives. Des milliers de logements perquisitionnés sans avoir besoin de donner un motif ni de présenter d’autorisation judiciaire. Des centaines de personnes assignées à résidence. De nombreuses familles traumatisées. Des emplois perdus. 

L’ONG a rencontré plusieurs personnes gravement affectées par l’état d’urgence. Des citoyens qui ne comprenaient pas pourquoi ils avaient été la cible de ces mesures et qui les ont prises pour des sanctions. Les musulmans se sont sentis particulièrement stigmatisés. Le PDF du rapport d'Amnesty International, étayé de nombreux témoignages, peut être téléchargé ici.

Manifestations interdites

L'état d'urgence affecte également la tenue de manifestations comme celle de juin contre la Loi Travail. Une première en France depuis bien longtemps. Une décision qui a provoqué un tollé dans le monde syndical et qui a servi de prétexte à Marine Le Pen pour se dresser en défenderesse de la démocratie: 

 

 

Et aujourd’hui?

La dernière prolongation qui conduit l’état d’urgence jusqu’à la fin de janvier 2017 augmente le pouvoir de l’Etat. Comme le relève Le Monde. "les limites du dispositif se réduisent. Les perquisitions administratives sont désormais autorisées. L’exploitation de données numériques va permettre d’engager davantage de procédures judiciaires."

Campagne présidentielle oblige, on n’imagine pas que l’état d’urgence va être abrogé. Mais le pouvoir croissant qu’il confère au gouvernement pourrait bien tomber demain dans des mains peu scrupuleuses… 

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