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Votations fédérales: l’initiative contre le mitage était trop extrême et venait trop tôt

Selon la presse suisse, l’initiative contre le mitage était trop extrême et arrivait beaucoup trop tôt, quelques années seulement après plusieurs scrutins sur le territoire. Mais le débat reste ouvert.

11 févr. 2019, 06:53
La Suisse avait déjà durci ses pratiques en matière de construction via la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, révisée en 2013. (illustration)

L’initiative contre le mitage du territoire, sèchement rejetée dimanche, était trop extrême et venait trop tôt, estime à l’unanimité la presse suisse lundi. Elle avertit toutefois que le débat est loin d’être clos et que le sujet reviendra sur la table très vite.

«Il n’y a pas eu d’effet climat», remarque d’emblée Le Courrier. «Les milliers de jeunes dans la rue ces dernières semaines n’ont pas pesé» sur le scrutin de dimanche, les Suisses rejetant par 63,7% le texte.

«Il est sans doute plus facile pour les votants de sanctionner les pratiques mafieuses de certains cantons alpins, qui attirent les oligarques russes et autres 'traders' de la City à coups de passe-droits en matière de permis de construire, que de s’appliquer un minium de discipline», juge le journal genevois.

 

 

Comme le rappelle Le Temps, «cette votation est survenue après plusieurs scrutins retentissants sur le territoire», l’initiative limitant les résidences secondaires de Franz Weber, en 2012, et la loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT), en 2013, toutes deux acceptées par le peuple. «Ces scrutins étaient sans doute trop proches et le message populaire déjà donné suffisamment clair pour ne pas revenir sur le sujet», ajoute le quotidien lémanique.

Résultat «franchement mauvais»

«Interdire toute nouvelle création de zones à bâtir en suisse aujourd’hui revenait à ajouter, à mi-parcours, vingt kilomètres de montée à des marathoniens qui n’avaient pas encore fini leur course à plat», abonde Le Nouvelliste. Il rappelle que la Suisse avait déjà durci ses pratiques en matière de construction via la LAT, révisée en 2013.

Pour 24 Heures, les Jeunes Verts, «trop gourmands», «se sont brûlés les ailes» avec un texte trop radical, en apportant «à une vraie question (…) une réponse inadéquate». A l’exception de quelques villes romandes, son score est d’ailleurs «franchement mauvais», analyse le journal vaudois.

Allant dans même sens, Le Quotidien jurassien (QJ) estime que l’initiative concurrençait la LAT, qui insiste sur la densification. «Alors qu’elle n’a pas encore déployé tous ses effets, cette loi exigeante a été jugée suffisante pour lutter contre le mitage», ajoute-t-il.

La LAT, rappelle la Tribune de Genève, est censée répondre aux besoins en zones à bâtir pour les quinze ans à venir. Or, les derniers plans directeurs cantonaux doivent être validés par Berne pour le mois de mai de cette année.

L’initiative, qui arrivait donc beaucoup trop tôt, faisait «presque un procès d’intention aux cantons qui ne feraient que décaler le problème du grignotage du paysage dans le temps, s’ouvrant de nouvelles zones de quinze ans en quinze ans», écrit le journal genevois. Cette erreur des initiants, ajoute le QJ, ne pouvait qu’aboutir à l’«enterrement» de leur texte.

Débat pas terminé

Mais le débat est loin d’être terminé, avertissent les journaux à l’unisson. «Sensible à l’environnement et au paysage, la Suisse n’a pas fini de voter sur le sujet», précise le QJ. D’ailleurs, la nouvelle révision de la loi d’aménagement sur le territoire, portant sur les constructions en zone agricole est en cours, rappellent Le Temps, 24 Heures, Le Nouvelliste et La Liberté.

Les milieux politiques et économiques devraient entendre le résultat de dimanche "comme un avertissement pour ne pas dénaturer la LAT", ajoute le quotidien valaisan. Les milieux de protection du paysage ont d’ores et déjà annoncé qu’ils lanceraient l’offensive (…) si la loi devait prendre l’eau", précise-t-il.

Les opposants à l’initiative, qui ont affirmé que la récente révision de la loi sur l’aménagement du territoire suffisait à limiter l’étalement urbain, «seront jugés sur leurs actes», note La Liberté. Car «un certain ras-le-bol point» face à la pression foncière, met en garde Le Courrier.

 

 

«Les surélévations étouffantes, les surdensifications dans les friches vendues comme des écoquartiers, une architecture contestée par ceux qui devront y habiter, voire certains déboisements, passent de moins en moins», souligne le quotidien genevois.

«Il reste donc à espérer que ceux qui voyaient dans cette initiative des Jeunes Verts un remède 'trop brutal' traitent le mal avec le sérieux nécessaire», conclut la Tribune de Genève.

Un mauvais service à leur cause

Tout comme 24 Heures, la NZZ estime que «les auteurs de l’initiative ont rendu un mauvais service à leur propre cause. Le 'non' massif, qu’ils ont provoqué avec cette discussion, peut être interprété à tort comme un signal que la population ne veut aucune restriction. Cela fait le jeu de ceux qui veulent saper le principe péniblement acquis de la séparation de l’espace constructible et de l’espace non constructible».

Mais le rejet d’une initiative «bien intentionnée, mais sans plus», qui abordait un sujet ne laissant personnes indifférent, n’est pas un chèque en blanc pour les milieux concernés, mettent en garde les titres du groupe de presse CH Media

Si le «non» clair arrive «bien à propos pour les forces qui réclament la plus grande marge de manoeuvre possible pour construire en dehors des zones à bâtir», les Suisses ont «à maintes reprises par le passé montré que la conservation du paysage leur tenait à coeur», notamment avec la Lex Weber ou la LAT.

Et si l’étalement urbain se poursuit sans être contrôlé, «le peuple réagira», abonde la Südostschweiz. «Et soudain, les Jeunes Verts seront au bon moment, au bon endroit».

"La majorité des votants n’a recours à des solutions radicales que s’il n’y a pas d’autres solutions ou si le compromis suisse typique ne fonctionne pas", analyse le Blick. Or, "ce n’est pas le cas actuellement en matière d’aménagement du territoire". Mais s’il n’est pas possible de maîtriser l’étalement urbain et si la volonté du peuple est piétinée, des solutions radicales pourraient trouver des majorités", avertit lui aussi le journal zurichois.

Le Tages-Anzeiger juge, pour sa part, que «dès le début, un 'non' massif était inhérent à cette initiative. L’opposition, qui comprenait une partie de la gauche, était trop écrasante», car «la nécessité d’un concept aussi rigide pour l’aménagement du territoire suisse n’a pas été suffisamment démontrée».

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