C’est la belle histoire de deux vieux mazots, des masures de pierre rustique, comprenant chambre, cuisine et cellier, servant autrefois de pied-à-terre aux montagnards lors de leur séjour au vignoble.
«On y entreposait le matériel indispensable au travail de la vigne, mais le mulet et toute la famille y trouvaient également leur place», se rappelle non sans nostalgie l’ancien président de Bagnes et grand baillif Willy Ferrez.
L’ancienne pièce centrale en volume étroit du plus grand mazot avec ses parois en «boeudron». © Léonard Bender
«Descendre de la montagne prenait une journée et bien plus encore pour remonter avec le mulet et le char lourdement chargé de tonneaux. Le vin relevait d’une petite économie parallèle, il se troquait contre d’autres produits de la terre et se partageait aussi avec les faucheurs.»
Ancré à ce pan de patrimoine et au cortège de souvenirs qui vont de pair, Willy Ferrez s’est engagé, au soir de sa vie, à sauver, transformer et transmettre ce bien familial à une nouvelle génération de jeunes propriétaires qui en prendra soin.
Et la même pièce, désormais ouverte sur l’autre mazot. © Sacha Bittel
Dans le respect des volumes préexistants
Et cette belle histoire, maître d’ouvrage et architecte choisissent de l’écrire au travers d’une mise en œuvre contemporaine, sans inutiles redondances architecturales.
La situation avant réhabilitation: les deux mazots séparés par un petit passage, en front de rue. © Léonard Bender
Entre les deux mazots initiaux, le passage à ciel ouvert donnant accès au parchet de vignes est intégré dans l’habitation.
«Le maintenir impliquait également de préserver les volumes distincts des deux mazots», précise Léonard Bender. Vitré de part en part, ce couloir assure le rôle de joint entre les pièces à vivre (cuisine à gauche, salon à droite) et conduit en ligne directe au jardin.
Au salon, la paroi de mélèze, dite «boeudron», réhabilitée selon les souhaits de Willy Ferrez, s’est vu attribuer une fonctionnalité moderne de rangement. «Ce qui nous a permis de contourner le piège du kitch», sourit l’architecte.
De même, bien que les espaces de vie baignent dans la lumière, les fenêtres sont généreuses à défaut d’être surdimensionnées par rapport aux ouvertures préexistantes. Le toit et l’avant-toit cherchent et trouvent la finesse des anciens mazots.
La tradition revisitée
Séparés par le couloir (passage initial entre les deux mazots), cuisine et salon communiquent par le biais d’ouvertures latérales. Les pièces sont en lien mais conservent chacune leur propre fonctionnalité. Le long banc intégré dans la paroi, le sol en chêne, les murs immaculés et le plafond de bois brut blanchi unifient l’espace de cette cuisine transversale, ouverte sur la terrasse, le jardin et la vigne. © Sacha Bittel
Un espace à part entière
L’escalier dissimulé par un meuble bibliothèque conforte l’impression spatiale d’être dans un salon plutôt que dans un couloir menant à l’étage. L’escalier intégré de la sorte échappe à sa seule fonctionnalité de passage. Une porte dans la pièce donne accès à une ancienne cave, où trône toujours le vieux pressoir. Une astucieuse entourloupe pour éviter d’inutiles corridors.
Cohérence harmonieuse
Intégrée dans un alignement d’habitations, la maison s’inscrit en front de rue passante limitée à 20km/h. Orientée sud-ouest, elle offre un point de vue remarquable sur la Pierre Avoi. A l’arrière, en bordure de la zone de construction, le regard s’élève sur la Combe d’Enfer et le hameau de Tassonnières. L’histoire est terminée: les mazots se sont mués en maison dans un esprit de densification de qualité. © Sacha Bittel
Passage valorisé
Voici le fameux couloir entre les deux mazots. Il affiche le même crépi que la façade pour rappeler son affectation initiale et traverse l’habitation, depuis la rue jusqu’à la terrasse et au jardin. A noter que le crépi ciment choisi est similaire à celui des autres maisons adjacentes. Sur le flanc gauche du passage, une porte ouvre sur une superbe cave à vins d’origine. © Sacha Bittel
Transparences lumineuses
Depuis l’étage, la liaison entre les deux mazots est accentuée par une perspective vitrée. Haut et bas dialoguent en permanence avec le couloir symbolique de l’habitation. On reste dans de petits volumes, conformes à l’architecture initiale. La transparence des lieux maintient en outre le lien et la cohérence entre toutes les pièces. © Sacha Bittel
Cet article peut être lu dans notre magazine «Votre habitat» en cliquant sur la couverture ci-dessous.