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Coronavirus: des appartements modulaires pour répondre à une crise sanitaire

La plupart de nos logements ne sont pas conçus pour affronter un (semi-)confinement. En Suisse, il existe pourtant des appartements qui s’agrandissent et rétrécissent aisément en fonction des besoins des habitants.

04 mai 2021, 08:00
La «Swisswoodhouse» se révèle à la fois flexible et écologique, puisque ses modules sont fabriqués en bois suisse.

Imaginez des logements qui s’adapteraient aisément aux changements de mode de vie de leurs habitants. Forcé à télétravailler en raison d’une soudaine pandémie, vous pourriez alors disposer d’une pièce supplémentaire pour y installer un bureau; ou à la suite du départ de votre enfant, vous souhaiteriez au contraire vous défaire de sa chambre devenue obsolète. Utopique? Pas vraiment, puisque cette flexibilité est à la base de la «Swisswoodhouse» construite en 2014 à Nebikon (LU).

L’idée est que ces adaptations se fassent à l’intérieur d’un même appartement par un accord réciproque entre voisins ou lors d’un changement de locataire.
Emmanuel Rey, directeur du Laboratoire d’architecture et technologies durables à l’EPFL et associé du bureau Bauart à Berne, Neuchâtel et Zurich

Si en apparence cet immeuble de quatre étages se distingue a priori relativement peu d’autres constructions récentes, l’aménagement des espaces intérieurs se révèle nettement plus innovant. «Le concept de base repose sur un module de 18 m2, préfabriqué en bois, qui peut être affecté à divers types d’espaces tels que hall, cuisine avec coin à manger, chambre avec sanitaire ou dressing, bureau, etc.» détaille Emmanuel Rey, associé du bureau Bauart à Berne, Neuchâtel et Zurich. «Les usagers peuvent concevoir le plan des futurs appartements en agrégeant le nombre de modules désirés et les modifier ultérieurement de manière plus aisée que dans une construction traditionnelle.»

Adaptations concertées

Chaque ménage peut donc agencer son logement à sa façon et au gré des phases de la vie, moyennant quelques travaux ponctuels pour faciliter le passage d’un module à un autre, mais sans que la structure du bâtiment n’en soit affectée. «L’idée est que ces adaptations se fassent à l’intérieur d’un même appartement par un accord réciproque entre voisins ou lors d’un changement de locataire», précise celui qui est aussi directeur du Laboratoire d’architecture et technologies durables (LAST) à l’EPFL.

 

Et le principe a su séduire les habitants, puisque la plupart de ceux qui y ont emménagé au départ y vivent toujours. Il faut dire que hormis sa modularité, l’immeuble a de nombreux atouts à faire valoir, en particulier sa faible empreinte carbone. Comme son nom l’indique, l’édifice a été construit majoritairement en bois provenant de Suisse. Par ailleurs, il recourt aux énergies renouvelables – l’immeuble est alimenté par une pompe à chaleur, des panneaux photovoltaïques et des capteurs solaires thermiques – pour l’électricité et le chauffage. «La genèse du projet est à la croisée de plusieurs éléments de réflexion, comme la densification urbaine, la construction écologique, l’adaptabilité des logements et la qualité de vie.»

Les préoccupations environnementales et les développements de la construction en bois tendent à remettre l’architecture modulaire sur le devant de la scène.
Emmanuel Rey, directeur du Laboratoire d’architecture et technologies durables à l’EPFL et associé du bureau Bauart à Berne, Neuchâtel et Zurich

Il faut dire que les concepteurs n’en étaient pas tout à fait à leur coup d’essai, ayant déjà réalisé auparavant plusieurs constructions modulaires en bois destinées à des écoles et des espaces administratifs. L’architecture modulaire elle-même ne date pas d’hier. Si elle apparaît au début du XXe siècle à la faveur d’une volonté de rationaliser les constructions, elle se développe surtout après la Deuxième Guerre mondiale, selon Emmanuel Rey. Il faut alors reconstruire vite et massivement et les modules préfabriqués apparaissent dès lors comme une solution simple et efficace.

En chiffres

  • 3 ans ont été nécessaires pour ce projet, dont moins d’une année pour sa construction.
  • 8,9 millions de francs, c’est le coût du bâtiment, soit 790 francs le mètre cube.
  • 18 appartements de 2,5 à 5,5 pièces composent l’immeuble.
  • 2162 m2, c’est la surface totale de l’édifice

Ce qui n’empêche pas l’architecture modulaire de tomber progressivement en disgrâce. «Son caractère parfois trop répétitif et son usage fréquent pour des constructions bas de gamme ont conduit à une certaine désaffection. Mais les préoccupations environnementales et les développements de la construction en bois tendent à la remettre sur le devant de la scène depuis le début des années 2000.»

Applications multiples

D’ailleurs, l’expérience pionnière de la «Swisswoodhouse» a depuis été répliquée dans d’autres localités des cantons de Berne et d’Argovie. Le bureau travaille actuellement sur une application de ce type de construction dans le cadre de la surélévation d’immeubles existants. Il a aussi développé la «smallhouse», une maison compacte de 75 m2 composée de deux modules préfabriqués, preuve que l’architecture modulaire n’est pas réservée exclusivement aux grands ensembles.

La «smallhouse» est une maison compacte de deux modules, préfabriqués et transportables, qui se montent sur le site en une journée. ©Ruedi Walti

 

Et l’actuelle pandémie de coronavirus pourrait contribuer à accélérer et élargir l’usage de ce type de démarches. «Le semi-confinement a indéniablement mis en exergue d’une part la nécessité de conditions qualitatives accrues pour assurer le bien-être dans le logement, quelle que soit sa taille ou sa localisation, d’autre part le fait que celui-ci doit pouvoir être utilisé beaucoup plus facilement de multiples façons», conclut l’architecte.

 

Cet article peut être lu dans notre magazine «Votre Habitat» en cliquant sur la couverture ci-dessous.

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