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"Le sport est devenu une drogue pour moi"

Pratiqué à haute dose, le sport peut être néfaste pour la santé. Candide Pralong, le fondeur du Val Ferret, en a fait l'expérience. Témoignage.

10 avr. 2019, 20:00
Candide Pralong, vainqueur de la Coupe du monde longue distance de ski de fond en 2017, a dû mettre sa carrière entre parenthèses à cause du syndrome du surentraînement.

Candide Pralong a été frappé par le syndrome du surentraînement en septembre 2018. Le fondeur professionnel du val Ferret était en pleine ascension sur les courses de longues distances. L’athlète a d’ailleurs remporté le classement général des longues distances en 2017 (Fis Worldloppet Cup). Il a également participé aux Jeux olympiques de Pyeongchang en 2018. Le syndrome du surentraînement l’a stoppé net dans son élan et l’a forcé à mettre sa carrière entre parenthèses.

«Ça m’est tombé dessus sans prévenir. Je n’ai rien vu venir. J’avais des maux de tête et mes muscles me tiraient. J’avais l’impression d’être malade, d’avoir la grippe. Le médecin de Swiss-Ski m’a fait un contrôle avec une prise de sang. Il m’a dit que ce n’était rien de grave, que je souffrais d’un petit refroidissement», raconte le fondeur de 28 ans.

Le sportif prend un temps de repos. Les jours passent, mais il ne voit aucune amélioration de son état de santé. «Au contraire, ça empirait avec le temps. Les douleurs étaient toujours plus violentes. Les maux de tête étaient devenus des migraines et mes muscles me tiraient toujours plus fort», poursuit-il.

Il tente tout de même de faire un peu de course à pied, mais il se sent tout de suite mal. Une semaine plus tard, il retourne chez le médecin. Ce dernier fait différents examens pour étudier toutes les possibilités (mononucléose, maladie due à une piqûre de tique, etc.).

Il finit par diagnostiquer un syndrome de surentraînement. Généralement, cela se manifeste par des douleurs musculaires et articulaires, une fatigue intense liée à une charge d’entraînement excessive et un temps de récupération insuffisant, ainsi qu’une baisse de performance. Ce syndrome affecte plus souvent les athlètes d’endurance.

Difficile à accepter

«Dans ma tête, c’était difficile d’accepter ce diagnostic.  Je n’avais pas un papier avec écrit noir sur blanc que c’était ça, aucuns résultats scientifiques… Quand on se casse une jambe, on voit clairement la fracture sur la radio. Comme je n’avais pas de preuve, je me disais souvent que je fabulais…» explique l’athlète.

Dans ma tête, c’était difficile d’accepter ce diagnostic. Je n’avais pas un papier avec écrit noir sur blanc que c’était ça, aucuns résultats scientifiques.
Candide Pralong, fondeur

A cette période, il commence à échanger avec Jason Rüesch, un fondeur grison, qui a connu la même expérience un an plus tôt. «Ça aide de voir que l’on n’est pas seul, que d’autres personnes sont passées par les mêmes étapes, que c’est humain… Je peux suivre son évolution, sa reprise de la compétition», raconte Candide Pralong.

Le sportif prend de longues périodes de pauses pour permettre à son corps de récupérer. Puis, il tente à deux reprises de s’y remettre, une fois fin 2018 et une fois en ce début d’année. La première phase d’entraînement se passe bien, mais dès qu’il intensifie le rythme, rien ne va plus.

«A ce moment-là, je me suis rendu à l’évidence. J’ai compris que ça ne servait à rien de recommencer comme avant… J’ai pété un câble et j’ai fini par réserver un voyage à Dubaï. Là-bas, j’ai pu déconnecter et me couper un peu de mon environnement habituel et de mes proches. Je n’ai pas fait de sport du tout», continue-t-il. 

En manque de sport

Après discussion avec son entraîneur, il décide de ne pas reprendre les entraînements avant le mois de mai. Il peut toutefois pratiquer des sports de loisirs de manière raisonnable, s’il en ressent l’envie. «Je m’entraînais facilement quatre ou cinq heures par jour. Alors pour moi, c’est très dur.

Le sport est devenu une drogue. Je me sens mal quand je ne peux pas en faire. Il me manque quelque chose», avoue Candide Pralong. «J’aime me donner à fond, être complètement exténué, ressentir l’adrénaline. Je suis drogué à l’intensité. Je me rends bien compte que les sports tranquilles ne me procurent pas de plaisir.» Pour autant, l’athlète ne se décourage pas et garde le moral. Il avance petit à petit sur son chemin et a déjà pris du recul sur la situation.

«Je reste positif. J’espère que je pourrais reprendre la compétition. Mon ami a pu s’y remettre et il a fait une plus ou moins bonne saison.» En attendant de trouver un nouvel équilibre et de pouvoir renouer avec le sport de haut niveau, il s’investit plus intensément dans ses études à l’Université de Fribourg où il étudie les sciences du sport.

 

Addiction au sport, quand l’activité physique devient LA priorité
Le sport, c’est bon pour la santé.  C’est vrai jusqu’à un certain stade. Passé une certaine quantité d’activités physiques, le sport peut devenir néfaste pour le corps et virer à l’addiction. Cette dernière peut autant toucher les sportifs d’élite que les sportifs amateurs. «En général, les personnes concernées ont instauré une routine. Elles font souvent le même sport toujours à la même heure. Elles doivent régulièrement augmenter la quantité ou l’intensité de l’effort pour ressentir le même bénéfice. Elles recherchent la sensation de bien-être possiblement liée à la libération d’hormones, appelées endorphines. Généralement, elles ne sont pas à l’écoute des mises en garde du médecin ou de l’entourage. Même blessées, les personnes addicts au sport continuent les entraînements. Le sport est devenu la priorité dans leur vie. Il passe avant tout et empiète sur la vie privée, professionnelle, les relations sociales…» explique le Dr Pierre-Etienne Fournier, chef du Service médecine du sport auprès de la Clinique romande de réadaptation.

«Lorsque la personne ne peut pas pratiquer son sport, elle ressent des symptômes de manque, de l’anxiété, de l’irritabilité, des troubles du sommeil. L’excès d’activités physiques peut avoir des répercussions négatives sur le système cardiovasculaire, endocrinien et sur l’appareil locomoteur. L’excès peut aussi conduire au syndrome de surentraînement. Là, la personne n’aura plus du tout la capacité de s’entraîner. Il lui faudra du temps pour que son corps récupère. Elle se sentira mal lorsqu’elle produira un effort physique. C’est très difficile pour les sportifs touchés. Ils sont contraints de marquer un temps d’arrêt et de reprendre en douceur», continue le Dr Fournier.

Dans certaines situations, l’appui d’un psychologue du sport peut aider à comprendre pourquoi la personne va dans l’excès et l’amener à trouver un nouvel équilibre. Aussi, la pratique sportive doit être progressive. «Il faut respecter certains paliers. On progresse étape par étape, on observe des temps de repos et des périodes d’efforts plus modérés», termine le Dr Fournier. Il existe un test pour déterminer si on est addict ou non au sport.

En savoir plus : Vous pouvez faire le test en cliquant ici.
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