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Déconfinement progressif: une reprise «métro, boulot, mollo»

Après de nombreuses semaines à la maison, il peut être difficile de se remettre au travail. On fait le point sur les risques et les stratégies pour préserver sa santé.

13 mai 2020, 20:00
Veillez à privilégier une reprise du travail en douceur.

Vous avez peut-être passé ces dernières semaines en confinement ou en télétravail, et voilà que le déconfinement progressif signe soudain votre retour au bureau. Une situation qui peut engendrer une réorganisation drastique de votre agenda.

«Un Suisse sur cinq se disait déjà très stressé au travail lors d’une enquête réalisée par l’OFS en 2017» (une sur quatre, selon une étude de 2018), souligne Cathrine Mathey, psychologue du travail indépendante, dont le bureau Expertise RH est spécialisé dans le domaine du stress et de la santé au travail. «C’est un problème de santé publique qui coûte près de 6,5 milliards de francs à l’économie suisse et qui nous concernait donc avant la situation particulière induite par le Covid-19. Il faut en tenir compte lorsqu’on parle de santé psychique au travail: on ne part pas de zéro.»

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Il est risqué de courir après le temps perdu

La tentation peut être grande, en cette période de reprise, de mettre les bouchées doubles: «Pour les professions concernées par les réouvertures des 27 avril et 11 mai derniers, le principal risque, mis à part la crainte de tomber malade, réside dans le fait de vouloir faire déborder son agenda pour parer aux difficultés économiques et rattraper son retard. On risque ainsi de ne plus se mettre de limites, sans s’écouter.»

Cela concerne tout autant ceux qui doivent continuer de concilier vie professionnelle et vie privée, alors même que les structures d’accueil comme les crèches ou l’aide bienvenue des grands-parents ne sont pas toujours disponibles ou envisageables.

La prise en charge de la santé psychique n’est pas que de la responsabilité individuelle; les patrons ont aussi un rôle à jouer.
Cathrine Mathey, Psychologue du travail indépendante

«Pour de nombreuses personnes, cette situation peut engendrer une double fatigue physique et psychique. Surtout pour les femmes dont les charges sont encore trop souvent alourdies par le travail qu’elles effectuent majoritairement à la maison, comme le ménage, l’organisation des repas ou l’éducation des enfants.»

Sans compter le stress supplémentaire à l’idée d’être contaminé ou de contaminer quelqu’un. «Si on ne traite pas à temps les symptômes, on se dirige vers le burn-out, la dépression, voire des maladies cardiaques.»

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Sachez reconnaître les signes qui disent que quelque chose ne va pas

Bien qu’il ait démontré son efficacité, le télétravail a mis en évidence un double risque: celui de rajouter des heures à son planning hebdomadaire et celui de se priver de temps morts. Ne plus respecter son quart d’heure de pause du matin et de l’après-midi, ou manger sur le pouce devrait nous pousser à nous interroger. «Ces respirations physiques et psychiques restent importantes pour calmer le mental et ne pas être toujours dans l’action. Elles permettent de se recentrer», précise Cathrine Mathey.

L’insomnie se présente aussi comme l’indicateur d’un éventuel problème psychique. Elle engendre souvent de la fatigue, donc un manque d’efficacité, qui entraîne de l’irritabilité, du stress… et des difficultés à s’endormir. Ressasser des pensées négatives et/ou rencontrer des difficultés à maintenir le lien social même à distance peuvent également alerter.

«Il est alors recommandé de revenir au moment présent: pour l’instant, je suis ici, mes proches vont bien, je parviens à réaliser ce qu’on attend de moi professionnellement, etc.», conseille la psychologue. Et être attentif à la communication entre collègues, en se concentrant sur ce que l’on peut maîtriser, «en ne rebondissant pas sur des remarques de l’entourage qui peuvent influencer négativement nos pensées, par exemple».

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Les employeurs ont un rôle à jouer

La prise en charge de la santé mentale n’est pas que de la responsabilité individuelle. Dans cette situation sanitaire particulière, les patrons sont tenus de donner des réponses satisfaisantes. «Pour les grandes entreprises, cela peut consister à la mise en place d’une offre d’écoute ou d’une personne de confiance, à l’interne ou à l’externe. Pour toutes les structures, il est important que les chefs sachent comment vont leurs collaborateurs, qu’ils soient à leur écoute, qu’ils puissent les rassurer d’un point de vue sanitaire, économique, et les aider à trouver des solutions organisationnelles qui permettent une meilleure gestion du stress.»

Il est également important de fixer des objectifs atteignables: ne pas chercher à refaire son chiffre d’affaires d’avant crise, mais adapter ses visées au temps imparti et à la masse de personnes disponibles. Des discussions peuvent aussi être mises en place avec les collaborateurs pour prioriser les tâches et redéfinir le rythme de travail.

«Un employé peut s’inquiéter sur les capacités de son entreprise à faire face, et donc, craindre de perdre son emploi ou de rencontrer des difficultés pour organiser son avenir. Reprendre après une longue absence implique de savoir accueillir ses collaborateurs, pouvoir écouter la façon avec laquelle ils ont vécu cette situation, les renseigner sur ce qui s’est passé entre-temps pour l’entreprise. En somme, leur apporter une certaine transparence.»

Il existe des ressources afin de préserver sa santé mentale malgré la crise sanitaire sur www.santepsy.ch/fr. Le Réseau Entraide Valais propose des consultations de santé psychique.

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Que peut exiger un travailleur à risque de son employeur?

«Les employeurs doivent assurer la mise en œuvre des huit points du plan de protection pour pouvoir reprendre leur activité», expliquent Nicolas Bolli, chef du Service de protection des travailleurs, et Stéphane Glassey, responsable de l’inspection du travail. Ces points sont définis par la branche ou sur le modèle de base du SECO. «Si certains ajustements ont dû être demandés, la plupart des entreprises contrôlées disposaient d’un tel concept signé, de l’organisation et du matériel nécessaire, ce qui est encourageant.»
«S’agissant d’un employé qui craindrait pour sa santé l’ordonnance 2 Covid-19 prévoit qu’il puisse faire valoir sa vulnérabilité moyennant une déclaration personnelle. Son employeur peut exiger un certificat médical, dans lequel le médecin traitant confirmera que l’employé est bien atteint d’une des pathologies listées dans l’annexe à l’ordonnance (sans la préciser, toutefois) et qu’il doit dès lors bénéficier des mesures de protection prévues à l’art. 10c al. 1 à 43.» Si ces mesures ne sont pas correctement mises en place et respectées, il peut refuser d’accomplir la tâche considérée.
Si un des membres du ménage du travailleur est vulnérable, c’est en famille qu’il faut convenir des mesures de protection à mettre en place.

Comment garder l’esprit sain et la tête froide?

  • Discutez des aménagements possibles et de votre rythme de travail avec votre employeur.
  • Ne remplissez pas votre agenda à tout prix ; gardezvous des plages de repos.
  • N’oubliez pas de faire des pauses régulières (1/4 d’heure chaque matin et aprèsmidi, ainsi qu’une vraie pause sur le temps de midi).
  • Sachez vous écouter, en veillant à la qualité de votre sommeil, au maintien de votre vie sociale, à la nature de vos pensées, et ne vous concentrez que sur ce que vous maîtrisez.

 

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