Le paradoxe initial à la base de Bandit Voyage est déjà éclairant. Lui, Robin Girod, est depuis longtemps déjà une figure incontournable de la scène romande, suisse, européenne, voire planétaire. Il a écumé les continents avec le mythique trio Mama Rosin puis Duck Duck Grey Duck, produit tout ce que la scène suisse possède de plus brûlant (de Kassette à Brandy Butler en passant par Félicien Lia), fondé un label qui a marqué un vrai renouveau de la scène pop francophone romande avec Cheptel Records. Elle, Anissa Cadelli, était totalement novice au moment de la création du duo. Ou presque.

«Je chantais un peu, je composais, j’écrivais, mais pour moi, sans autre but que celui de l’expression directe. Avec Robin, on a commencé en 2016, assez officieusement. Et en 2017, on a donné les premiers concerts de Bandit Voyage et de ma vie entière, aux Etats-Unis... C’était totalement fou.» Deuxième paradoxe. Commencer par la fin, ou du moins le genre d’aboutissements que la plupart des groupes conservent dans un coin de leur tête comme un rêve inaccessible.

Un son forgé sur scène

C’est là, dans cette première expérience de tournée libératrice, et dans les années de scènes qui ont suivi, que s’est cimentée l’identité de Bandit Voyage. Ou amalgamée plutôt. Car le duo n’aime rien tant que le danger des édifices fragiles, le sol qui peut se dérober sous les pieds à tout moment. «On composait des morceaux au soundcheck et on les jouait juste après, on était – et on est encore – dans une démarche extrêmement spontanée, instinctive. On vivait le moment, on était amoureux, il y avait une énergie spéciale. On changeait constamment la forme des chansons, du son, des arrangements...»

Les premiers concerts de Bandit Voyage et de ma vie entière, ça a été aux Etats-Unis. C’était complètement fou.

Anissa Cadelli, chanteuse, guitariste

Une belle et saine euphorie, née de l’expérience en béton armé de Robin et de la fraîcheur absolue d’Anissa. «C’est vrai qu’on s’est retrouvés quelque part au milieu de nos deux itinéraires», souffle la chanteuse, autrice et compositrice. Depuis, la dimension du couple a muté vers une collaboration infiniment complice et, justement, Bandit Voyage a couché le vécu, les expériences, le passif relationnel et plein d’autres choses encore sur «Amour sur le disque» (partie 1), un EP tout fraîchement sorti de presse, et qui succède au premier album «Le Gang», paru en 2020.

Autant dire que ces bandits voyagent vite. Et plutôt bien, vu l’intérêt de la major Sony Music et des retours plutôt élogieux. «En fait, notre projet est clivant. Soit on adore, soit on déteste. Au début, le négatif me pesait. Mais là, j’assume. Si on suscite ce genre de réactions, c’est que notre musique remue quelque chose...»

Le thème universel

«C’est vrai, et c’est évident, qu’on ne parle finalement que de ça. Mais on couvre un territoire plus large que celui de l’amour sexué entre deux personnes. Il y a l’amour des proches, de la famille, des gens...» Comme sur le très touchant «Ma mère», brûlot orientaliste, dont le groove enlevé couvre un fond dense, plein de sens. Et quand on tire le parallèle avec un autre duo francophone mythique, Rita Mitsouko, Anissa s’illumine. «C’est exactement ce qu’on cherche à faire. S’adresser aux gens sur différents niveaux. J’adore les chansons très festives et dansantes mais qui abordent des thèmes difficiles.» On pense au cancer de «Marcia Baila» ou à la déportation des juifs du «Petit train»...

Et comme chez le duo Ringer-Chichin, chez Bandit Voyage, la musique est éclatée, recollée, parfois en vrac, avec beaucoup de malice et de force. «Je sais que c’est délicat, la question des emprunts à d’autres cultures, aujourd’hui. Bon, comme je suis d’origine algérienne, ça fait sens d’intégrer des influences orientales dans notre musique. De toute façon, je crois que c’est la manière et l’intelligence avec lesquelles on fait ces emprunts qui compte...» Servir plutôt que se servir. Toute une démarche, que Bandit Voyage portera sur les routes ces prochains temps, en passant, ce vendredi, par le Pollen Festival de Sion.

Infos pratiques

Bandit Voyage au Pollen Festival, vendredi 9 juillet 19 h 30. Plus d’infos sur la page Facebook de Bandit Voyage.

Au Pollen Festival ce week-end
Vendredi 9 juillet:
18H: Les Ossatures
19H30: Bandit Voyage
21H: Olympic Antigua
Samedi 10 juillet:
11H, 14H, 16H: «Sécheresse» par ANANKI Cie
19H: Senescence Impreza
21H. Louis Jucker
Dimanche 11 juillet
15H: «Série» par le collectif du jeudi
16H30: Les Pandas Royals
18H30: «Pièce Chorégraphique» par Faustine Moret
Durant tout le festival, vitrines illustrées par des artistes en ville de Sion. Plus d’infos sur le site du Pollen Festival.

Une pluie de concerts au pied du Cervin

Annulé en 2020, le Zermatt Unplugged célèbre la musique acoustique sur deux week-ends d’été. Pointures internationales et découvertes se pressent au pied du «caillou».