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Coronavirus: «Sur les objets, le pouvoir de contagion du virus baisse très rapidement»

Aujourd’hui, Eric Bonvin évoque la progression des décès dans le canton, le traitement potentiel à la chloroquine ou encore le sentiment de détresse lié au confinement.

23 mars 2020, 22:00
/ Màj. le 24 mars 2020 à 06:58
Eric Bonvin, directeur général de l’Hôpital du Valais: «Le confinement peut amener à un sentiment de détresse qu’il faut prendre au sérieux.»

Eric Bonvin, aujourd’hui il y a douze morts en Valais. On a l’impression que cela monte rapidement. Est-ce aussi la vôtre?

Ce n’est pas une impression mais un constat. Les décès actuels correspondent à des cas du début de l’épidémie et il faut donc s’attendre à ce qu’ils augmentent durant les prochaines semaines. La courbe des décès suit celle des nouveaux cas à quelques semaines d’écart.

Quelle est la situation ce lundi au sein de l’Hôpital du Valais? 

Nous recensons aujourd’hui 492 cas diagnostiqués en Valais. 62 patients atteints par le Covid-19 sont hospitalisés à l’Hôpital du Valais, dont 11 aux soins intensifs. Je précise que ces chiffres ne concernent que les hôpitaux de Martigny, Sion et Viège, et non pas Rennaz.

La courbe des décès suit celle des nouveaux cas à quelques semaines d’écart.

Plusieurs lecteurs ont des questions sur le traitement à la chloroquine très médiatisé ces jours-ci. Est-ce vrai que vous l’utilisez déjà? 

Oui, nous l’utilisons pour les patients victimes du coronavirus mais avec prudence. Il n’existe à ce jour encore aucune étude confirmant réellement son efficacité. L’OMS a du reste fait aujourd’hui une mise en garde contre ce type de prescription. Nous l’utilisons en veillant à ne pas nuire au patient tout en veillant à permettre de le prescrire aux patients qui en ont besoin pour une indication pour laquelle il a une action avérée et confirmée. La chloroquine est, quoi qu’il en soit, un remède qui n’est prescrit qu’avec une ordonnance médicale.

Depuis le «Temps Présent» de jeudi dernier, certains se demandent pourquoi la Suisse ne désinfecte pas ses rues, ses trottoirs ou ses transports publics comme on l’a vu à Singapour ou comme on le voit aujourd’hui en Italie? 

Cette démarche repose sur la possible présence du virus sur les objets dont on sait que s’il peut y survire un certain temps, sa concentration baisse très rapidement et son pouvoir de contagion aussi. La Suisse estime qu’il s’agit là d’un risque marginal de transmission de la maladie par rapport au contact humain qui est, lui, le risque maximal et donc, selon nous, le vrai risque. En d’autres termes, il vaut résolument mieux se laver les mains et garder les distances sociales dans un autobus que d’entrer dans un autobus bondé même s’il a été désinfecté. 

Comme on l’a dit, douze personnes en Valais sont mortes du coronavirus pour l’instant. La personne décédée peut-elle transmettre le virus? 

Elle reste certainement porteuse du virus durant un certain temps mais ne le projette plus dans son environnement. En respectant les recommandations de distance sociale, il est donc possible de s’en approcher mais sans la toucher. Lors de la manipulation d’une dépouille, s’ils respectent les règles d’hygiène exigées dans leur profession, les croque-morts ne risquent pas d’être contaminés.

Une personne positive ne doit pas aller au travail et se mettre en auto-isolement à son domicile. Seul le domaine médical peut aujourd’hui faire exception.

Un lecteur diabétique depuis 28 ans travaille aujourd’hui dans la construction. Il vous demande si son employeur doit le mettre à l’arrêt. 

Selon la nouvelle révision de l’Ordonnance 2 Covid-19 (Section 5, art. 10, lettre c) entrée en vigueur ce samedi 21 mars, il revient à l’employeur de fournir les conditions de sécurité nécessaires à la protection de son employé. Ce dernier est donc en droit d’exiger que ces mesures soient appliquées.

Une lectrice employée de l’administration cantonale travaille dans le même bureau qu’une personne testée positive au coronavirus et que son employeur oblige à travailler. Ce n’est pas normal? 

Non, ce n’est pas normal. Cette personne positive doit se mettre en auto-isolement à son domicile, durant au moins 10 jours dont au moins 48 heures sans symptômes. S’il y a eu des contacts rapprochés et prolongés avec sa collègue de bureau, celle-ci devrait également se mettre en autoquarantaine durant 10 jours. Il n’y a que dans le personnel médical, comme on l’a vu à Genève, que l’on peut demander à une personne positive de travailler en cas de pénurie et uniquement si elle ne présente que des symptômes légers. 

Troisième et dernier cas pour aujourd’hui, un homme de 58 ans, qui souffre d’hyperthyroïdie et qui est donc à risque, n’ose plus sortir de chez lui depuis dix jours alors que son médecin a maintenu un rendez-vous en fin de semaine à l’hôpital. Prend-il un risque en y allant? 

Si son médecin a maintenu le rendez-vous, c’est qu’il est important. Car tous les autres rendez-vous sont aujourd’hui décalés au sein des hôpitaux et des cabinets médicaux. Ensuite, il ne sera pas reçu dans la zone de l’hôpital où se trouvent les malades du coronavirus, mais dans un lieu où il ne rencontrera pas de malade du coronavirus et où les professionnels respecteront toutes les règles de protection exigées. Donc, s’il respecte les mesures d’hygiène et la distance sociale, il n’y a pas de risque pour lui de venir à l’hôpital. Enfin, l’hyperthyroïdie n’est pas considérée comme un facteur de risque de complication au coronavirus, il n’a rien à craindre.

Malgré vos journées intenses au sein de l’Hôpital du Valais, arrivez-vous à saisir la perception que la population du Valais a du coronavirus et son évolution? 

Mon sentiment est que cette semaine l’une des problématiques sera la gestion des effets du confinement dans lequel se trouve la population, avec de possibles remises en question. Nous le percevons aussi au sein de l’hôpital. Cette situation peut potentiellement générer de la détresse et il est important de solliciter une aide psychologique lors d’une telle situation. Il sera important que nous en parlions lors d’un prochain rendez-vous.
 

Vous pouvez poser vos questions à Eric Bonvin en envoyant un mail à vincent.fragniere@lenouvelliste.ch et vous trouvez aussi de nombreuses réponses sur le blog de l’Hôpital du Valais: blog.hopitalvs.ch

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