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Coronavirus: origine, durée, application ou efficacité… au fond c’est quoi une quarantaine?

L’Italie vient de se mettre en quarantaine. Mais quelle est l’histoire de cette mesure? Dure-t-elle forcément 40 jours? Son efficacité est-elle réellement prouvée? On vous explique tout en cinq points.

10 mars 2020, 07:25
L'Italie toute entière a été mise en quarantaine ce lundi 9 mars.

L’Italie a décrété une mise en quarantaine de l’ensemble du pays. Une mesure sans précédent à cette échelle. Pour autant, la quarantaine est une mesure qui a une longue histoire.

Que signifie la quarantaine?

On parle généralement de mise en quarantaine. Si l’on reprend la définition du dictionnaire Larousse, la quarantaine est une «mesure de police qui consiste à imposer un isolement provisoire de durée variable aux personnes, aux navires ou aux animaux et aux marchandises provenant d’un pays infecté par une maladie contagieuse.»

Dans son Règlement sanitaire international, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) la définit quant à elle comme «la restriction des activités et/ou de la mise à l’écart des personnes suspectées qui ne sont pas malades ou des bagages, conteneurs, moyens de transport ou marchandises suspects, de façon à prévenir la propagation éventuelle de l’infection ou de la contamination.»

Quand apparaît le mot pour la première fois?

Le mot est attesté pour la première fois en français dans les années 1180 et il décrit alors la période du Carême, qui est de 40 jours. Cette période de jeûne prépare la fête de Pâques, lors de laquelle on célèbre la résurrection du Christ. Cet intervalle de temps se retrouve dans un grand nombre de références bibliques, ainsi que le souligne le quotidien Sud Ouest.

La quarantaine fait écho aux quarante années d’exode du peuple d’Israël pour rejoindre la terre promise, après avoir quitté l’Egypte emmené par Moïse. Elle renvoie aussi aux 40 jours du Christ dans le désert entre son baptême et le début de sa vie publique ou encore la durée du déluge affronté par l’arche de Noé.

C’est en italien que le mot «quaranta» est utilisé pour la première fois au sens d’isolement sanitaire au XIVe siècle. Il faut attendre 1635 pour que le terme acquière le sens qu’on lui connaît aujourd’hui en français.

Pourquoi parle-t-on de quarantaine?

La quarantaine fait donc référence à une période de 40 jours. Cette durée n’est pas un hasard, puisqu’elle est définie par le médecin de la Grèce antique, Hippocrate, vers le Ve siècle. Selon lui, une maladie aiguë se manifeste et disparaît en 40 jours, ainsi que le relève le journal belge La Libre.

L’œuvre «La Peste d’Elliant» de Louis Duveau représente un épisode de cette épidémie au Moyen-Age. © Musée des beaux-arts de Quimper

 

Elle est appliquée aux grandes maladies contagieuses qui ont fait des ravages au cours de l’histoire comme la peste, puis le choléra. Si la mesure de confinement est régulièrement utilisée au cours du temps, la quarantaine ne décrit plus nécessairement une période d’isolement de 40 jours. Elle a parfois atteint jusqu’à 100 jours ou a été réduite à 14 jours comme c’est le cas avec l’actuel coronavirus Covid-19.

Quand a-t-elle été instituée pour la première fois?

Dès l’Antiquité, on pratique une forme d’isolement des personnes malades, en particulier les lépreux, sans que l’on parle alors de quarantaine au sens propre. C’est au Moyen-Age que le terme est utilisé dans le sens d’une mesure médicale destinée à endiguer une contagion à titre préventif.

Ainsi, en 1377, les autorités de la cité-Etat de Raguse, l’actuelle ville de Dubrovnik en Croatie, en interdisent l’accès aux navires provenant d’une zone infestée par la peste, comme le rappelle France Culture. Ces derniers doivent d’abord observer une période d’attente d’un mois.

Le Lazzaretto Vecchio est l’un des lazarets datant du Moyen-Age visible à Venise. © Chris 73 / Wikimedia Commons

 

La mesure d’isolement des navires est adoptée la même année par Venise avant d’être reprise dans les plus grands ports d’Europe de Marseille à Barcelone, en passant par Edimbourg, en l’espace d’un siècle. La mise en quarantaine maritime est renforcée par la construction de lazarets. Ce type d’établissements destinés à isoler les marins et les marchandises sont édifiés sur une île ou le littoral. Le premier voit le jour à Venise au début du XVe siècle. La quarantaine sera étendue par la suite au niveau terrestre.

Plus tard, la mise en quarantaine est souvent associée à la pratique du cordon sanitaire, soit le contrôle des accès à une zone où sévit une épidémie. Ce fut le cas en France en 1821, lorsque les autorités ont envoyé 30 000 soldats dans les Pyrénées pour bloquer la frontière avec l’Espagne qui faisait face à une flambée de fièvre jaune.

La mesure est-elle efficace?

L’efficacité d’une telle mesure de confinement n’a jamais pu être réellement validée. Si elle a pu avoir des effets positifs dans le cas de la peste ou la variole – dans ce dernier cas, elle fut aussi accompagnée d’une vaste campagne de vaccination forcée – la mise en quarantaine n’a jamais été une panacée.

Il en faut peu pour que le dispositif vacille, comme le rappelle une anecdote d’Anne-Marie Moulin, médecin, philosophe et directrice de recherche émérite au CNRS à Paris dans Le Temps. En 1720, un navire revenant d’Orient est stoppé avant son accostage à Marseille en raison de plusieurs décès rapportés à son bord. Avant d’être placé en quarantaine, l’équipage débarque clandestinement sa cargaison d’étoffes. Il s’ensuit une épidémie de peste qui fera près de 100 000 morts.

Il ne faut pas mythifier la quarantaine, penser que c’est l’arme absolue avec des pouvoirs magiques.
Patrick Zylberman, historien de la santé et professeur émérite à l’École des hautes études en santé publique

 

La mise en quarantaine est une mesure plus politique que sanitaire en définitive, ainsi que le souligne  Patrick Zylberman, historien de la santé et professeur émérite à l’École des hautes études en santé publique, dans un entretien accordé au Point et relayé par le HuffPost. «Elle peut, par exemple, retarder et diminuer la hauteur du pic de contamination, et ainsi réduire la mortalité. Mais il ne faut pas mythifier la quarantaine, penser que c’est l’arme absolue avec des pouvoirs magiques.»

Pire, la mise en quarantaine peut même avoir des conséquences négatives. Par le passé, certaines quarantaines ont aussi conduit à des troubles sociaux, comme lors de l’épidémie de SRAS en Chine en 2003. Les régions de Nankin et Shanghai ont vécu des scènes d’émeutes et de violentes manifestations, la faute à une absence de soins médicaux ou d’approvisionnement en denrées alimentaires, explique Le Monde.

Des scènes de panique qui peuvent même favoriser la contamination, comme ce fut le cas dans la capitale du Liberia en 2014 lors de l’épidémie d’Ebola. La défiance envers le personnel médical avait alors poussé certains malades à cacher leurs symptômes pour éviter tout confinement.

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