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Coronavirus: «On ne peut pas encore affirmer que nos hôpitaux ne seront pas débordés.»

En répondant à vos questions, Eric Bonvin, directeur de l’Hôpital du Valais, évoque la stabilisation des cas aux soins intensifs, les risques de décisions «hasardeuses» comme celle de l’immunité collective naturelle ou encore l’absence de pénurie d’antibiotiques à l’Hôpital du Valais

07 avr. 2020, 21:49
Eric Bonvin, directeur général de l'Hôpital du Valais : "L'accalmie actuelle semble bien être l’effet des mesures prises par la Confédération à fin février et à la mi-mars. "

Eric Bonvin, quelle est la situation à l’Hôpital du Valais mardi en début de soirée? 

Nous avons aujourd’hui 120 patients hospitalisés chez nous dont 22 aux soins intensifs. Sur les 291 patients valaisans atteints par le coronavirus hospitalisés depuis le début de la pandémie, 8 ont pu quitter les soins intensifs et 121 sont sortis suffisamment rétablis pour rentrer chez eux.

«Nous constatons un «plateau» dans la courbe des patients hospitalisés, sans savoir si nous en avons atteint le sommet ou si elle va repartir à la hausse.» 

On voit donc que pour l’instant les malades en soins intensifs restent stables en Valais. Cela signifie-t-il que nos hôpitaux ne seront pas débordés par les cas de COVID-19?

Il est encore trop tôt pour être affirmatif à ce sujet. Nous constatons en effet un «plateau» dans la courbe des patients hospitalisés, sans savoir si nous en avons atteint le sommet ou si elle va repartir à la hausse. Cette accalmie semble bien être l’effet des mesures prises par la Confédération à la fin février et à la mi-mars. 

Peut-on en déduire que nous sommes en train de réduire passablement la hauteur du pic prévu?

C’est du moins l’effet sur lequel nous comptions lors de l’instauration des mesures prises par la Confédération. Nous évoquions alors aussi le fait qu’en évitant ce pic, qui risquerait d’engorger nos hôpitaux, nous étalerions le nombre de cas sur la durée, en prolongeant ainsi la pandémie tout en limitant ses ravages. Quoi qu’il en soit, nous devons impérativement maintenir notre dispositif de protection et les recommandations mises en place. En relâchant ces mesures, nous risquerions fort, à l’heure actuelle, d’anéantir en un rien de temps ce seul moyen que nous connaissons actuellement pour maîtriser cette redoutable pandémie. 

«Aussi longtemps que nous ne connaissons pas les capacités à long terme de notre immunité face à ce virus, il serait très dangereux de se lancer dans des décisions hasardeuses comme celle d’une immunisation collective naturelle.» 

Un lecteur qui a écouté le professeur Pittet nous demande si vous partagez son avis, à savoir qu’un cas clairement diagnostiqué par un test correspondrait à 50 personnes infectées dans la réalité. Cela signifierait que plus d’un million de personnes ont été touchées par le coronavirus en Suisse…

Le Prof. Pittet a certainement très bien étudié la question, mais ce ne sont pour l’heure que des suppositions. Seules des études sérologiques, comme celle lancée par les HUG, pourront, après coup, répondre précisément à cette question. On pourra alors savoir quelle proportion de la population a été infectée. Il y a peu de risque que le virus récidive si une forte proportion de la population a été atteinte et le risque sera bien plus grand dans le cas contraire.

Comme un vaccin ne pourra être prêt avant de nombreux mois, devra-t-on vivre comme aujourd’hui pendant très longtemps encore? Et alors, faut-il tenter l’immunité d’une grande partie de la population et risquer un drame sanitaire et humain? Y a-t-il d’autres pistes possibles nous demande une lectrice?

Aussi longtemps que nous ne connaissons pas les capacités de notre immunité à nous défendre durablement face à ce virus, il serait extrêmement dangereux de se lancer dans des décisions hasardeuses comme celle d’une immunisation collective naturelle, au risque de subir des effets extrêmement dévastateurs. La précipitation pourrait nous coûter très cher et il nous faut savoir être patients, tout en nous protégeant au mieux. Nous devons faire confiance aux efforts gigantesques actuellement déployés par les chercheurs du monde entier pour trouver le moyen de parer durablement ce fléau. 

«Dans l’immédiat, nous ne souffrons pas d’un manque d’antibiotiques grâce au travail sans relâche de nos collaborateurs de la pharmacie.»

A la lecture du «Matin Dimanche», un lecteur s’étonne qu’un médecin qui a eu le coronavirus et qui s’estime donc immunisé rende visite à ses patients à domicile. Qu’en est-il vraiment de cette immunité? Prend-il trop de risques?

Nous n’en savons pas encore assez pour être certains qu’une telle immunité est réellement acquise pour contrer ce coronavirus, ni sur la durée de son action. Mais, indépendamment de cette question, si ce médecin a respecté les délais de quarantaine, il peut alors reprendre son travail et rendre visite à ses patients, pour autant qu’il respecte scrupuleusement les règles d’hygiène et de protection exigées de tout professionnel lors de tout contact avec les malades.

Enfin, êtes-vous en pénurie d’antibiotiques pour les soins intensifs comme dans certains hôpitaux? Une lectrice estime que les entreprises pharmaceutiques n’en font pas assez dans ce domaine et devraient aussi faire un geste financier pour le pays. Qu’en pensez-vous?

Comme pour le matériel de protection, la disponibilité des médicaments et produits anesthésiants est soumise à de fortes fluctuations. Mais dans l’immédiat, nous ne souffrons pas d’un manque d’antibiotiques, grâce notamment au travail sans relâche de nos collaborateurs de la pharmacie. Grâce à eux, nous pourrons fonctionner encore durant quelques semaines selon les protocoles d’utilisation en vigueur. Comme pour les anesthésiants, la Confédération a par ailleurs mis en place une stratégie nationale pour étudier la possibilité d’échanges entre les hôpitaux si la situation devait se péjorer.

Vous pouvez poser vos questions à Eric Bonvin en envoyant un mail à vincent.fragnière@lenouvelliste.ch. Des réponses à vos questions sont aussi disponibles sur le site www.hopitalvs.ch/coronavirus.
 

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