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Coronavirus : «L’application des EPF n’est pas une solution miracle, mais complète les mesures liées au dépistage du Covid-19»

Répondant à vos questions deux fois par semaine, le directeur de l’Hôpital du Valais évoque la future application des EPF liée au dépistage, revient sur la pénurie de tests en début de pandémie et relève l’augmentation des symptômes dépressifs dans la population.

05 mai 2020, 05:30
Eric Bonvin, directeur général de l'Hôpital du Valais: «Nous n'avons désormais plus que 7 personnes aux soins intensifs en lien avec le Covid-19.»

Eric Bonvin, la diminution du nombre de cas se poursuit à l’Hôpital du Valais?

Oui. L’Hôpital du Valais a aujourd’hui 46 cas hospitalisés, dont 7 seulement aux soins intensifs. Sur les 357 patients valaisans atteints par le coronavirus hospitalisés depuis le début de la pandémie, 32 ont pu quitter les soins intensifs et 238 sont sortis suffisamment rétablis pour rentrer chez eux. 

Je téléchargerai l’application créée par les EPF car elle me semble offrir les garanties nécessaires quant à la protection de la sphère privée.

Plusieurs lecteurs nous demandent si à titre personnel vous allez télécharger sur votre natel l’application de l’EPFL pour renforcer les traçages des personnes. Et faut-il le faire malgré certaines réticences éthiques?

Oui, je vais la télécharger sur mon portable. Davantage qu’un «traçage», il s’agit en fait d’une application de «notification d’exposition», qui ne permet pas de vous «pister», mais qui indique si vous avez été en contact avec une personne infectée. L’absence de stockage centralisé des données, contrairement à ce qui est par exemple prévu en France, et le fonctionnement général de cette application développée en collaboration avec l’EPFL et l’EPFZ me semblent offrir les garanties nécessaires quant à la protection de la sphère privée. Ce sera quoi qu’il en soit aux autorités politiques d’en décider. Cette solution technologique ne constitue toutefois pas une solution miracle au Covid-19, mais complète les autres mesures liées au dépistage et aux enquêtes de voisinage afin de pouvoir isoler d’éventuels nouveaux foyers de la pandémie.

Chaque canton s’occupe du traçage des potentiels foyers d’infection. Quelles sont les forces qui travaillent sur ce projet en Valais et est-ce que le personnel sanitaire de l’hôpital est affecté à ce travail? Avec quelle capacité réelle?

Cette mission ne dépend pas directement de l’hôpital, mais du canton, par son unité des maladies transmissibles, notamment composée de plusieurs collaboratrices et collaborateurs du service des maladies infectieuses de l’Hôpital du Valais. Notre Institut central des hôpitaux, par son laboratoire de microbiologie réalise des tests de dépistage depuis le début de la pandémie et son activité peut être augmentée en tout temps si le canton met à disposition des ressources pour le faire. Afin de faciliter l’accès aux tests, des discussions sont par ailleurs en cours avec les autorités cantonales pour que l’Hôpital du Valais mette en place des centres de dépistage Covid-19 sur les sites hospitaliers de Viège, de Sion et de Martigny, ainsi qu’à Monthey pour l’Hôpital Riviera-Chablais Vaud-Valais. Cela en complément des tests effectués par les médecins de ville.

La mortalité ne semble pas corrélée à la question du diagnostic puisqu’il n’existe aucun traitement spécifique et que tous les cas graves ont été pris en charge

L’enquête du «Matin Dimanche» fait comprendre que certainement le plus grand manquement de la Suisse aura été l’absence de tests en suffisance pour tester une grande partie de la population dès la mi-mars. Une lectrice nous demande si vous partagez cet avis et quelle conséquence cela a eu sur le nombre de morts?

Le problème du nombre ne se pose pas seulement en termes de disponibilité des tests eux-mêmes, qui était effectivement limitée à la mi-mars, mais également des ressources en personnel pour les effectuer et ensuite réaliser les enquêtes d’entourage pour prendre les mesures d’isolement requises. C’est l’approche initialement choisie par nos autorités, mais qui s’est vite heurtée à la présence silencieuse, mais déjà massive du virus parmi nous. Aujourd’hui, avec un nombre de nouveaux cas quotidien inférieur à 100 en Suisse, nous allons pouvoir reprendre cette approche, en testant toutes les personnes symptomatiques et en réalisant les enquêtes d’entourage le cas échéant. Quoi qu’il en soit, la mortalité ne semble pas corrélée à la question du diagnostic puisqu’il n’existe aucun traitement spécifique et que tous les cas graves ont été pris en charge. Elle aurait cependant pu être plus importante si notre système sanitaire avait été débordé, ce qui n’a heureusement pas été le cas chez nous.

Il y a deux mois, le Valais comme tous les cantons avait choisi de ne pas dévoiler publiquement les foyers pandémiques pour ne pas les stigmatiser. Dans une phase de déconfinement, faudrait-il le faire pour améliorer l’exercice de traçage?

Je ne pense pas que cela soit nécessaire, car il est trop tard pour changer quoi que ce soit à ces premiers foyers où le virus s’était installé de manière silencieuse. Aujourd’hui, il est par contre très important de pouvoir identifier chaque nouveau cas pour empêcher de nouveaux foyers potentiels avec les mesures de diagnostic, de dépistage et les enquêtes d’entourage.

Aujourd’hui, les symptômes dépressifs se sont accentués chez 57% des personnes interrogées lors d’une étude réalisée à Bâle.

Ce week-end, plusieurs lecteurs nous ont écrit à la suite de l’interview du patron du Fonds national pour la recherche qui parle de potentiellement deux ans avant de pouvoir de nouveau faire des bises. De plus en plus, un sentiment de détresse est perceptible chez certaines personnes. Le ressent-on au niveau des appels auprès de la cellule psychologique peu utilisée au début du semi-confinement?

Il est en effet difficile de dire dans combien de temps on trouvera une réponse au virus. Le développement d’un vaccin est habituellement un travail de longue haleine et il est possible que nous devions continuer à vivre comme maintenant pendant deux ans ou plus. Pour ce qui est des appels téléphoniques, ceux-ci ont sensiblement augmenté, de manière générale, sur le numéro unique de nos Centres de compétence en psychiatrie et psychothérapie du Valais romand. Cela semble refléter les résultats d’une étude bâloise montrant que les symptômes dépressifs se sont accentués chez 57% des personnes interrogées. Nous avons également remarqué l’importance de la présence d’une aide psychologique pour les professionnels de l’hôpital, mais aussi des EMS, avec lesquels nous avons établi une convention de collaboration pour leur venir en aide dans ce domaine.

Dès lundi, parmi les couples qui se retrouveront séparés durant la journée en raison de la reprise de leur travail, plusieurs nous demandent s’ils peuvent continuer à avoir des relations sexuelles.

Cette question n’est pas à prendre en compte du point de vue spécifique des relations sexuelles qui ne sont pas en soi cause de contagion mais avec la proximité interpersonnelle des personnes vivant sous un même toit. Cela dépend de la possible exposition au virus de chacun des conjoints durant leur journée de travail. S’ils respectent les règles de distance et appliquent strictement les règles d’hygiène des mains, les partenaires d’un couple peuvent avoir des contacts rapprochés une fois rentrés chez eux.

Vous pouvez vos questions à Eric Bonvin en envoyant un mail à vincent.fragniere@lenouvelliste.ch. 
 

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