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Nick Cave à Genève: que chacun en prenne de la (mauvaise) graine!

Impressions d'après le concert du songwriter australien lundi 13 novembre à l'Arena de Genève.

14 nov. 2017, 12:51
Début de prêche sépulcral pour Nick Cave, qui exorcise sur son dernier album "Skeleton Tree" la douleur du décès de son fils.

Le décor, d’abord. L’Arena de Genève, ses lettres géantes et colorées de guingois en façade, ses grandes verrières et sa tôle ondulée… On pouvait craindre ce lundi 13 novembre au soir que le velours noir de Nick Cave y adhère mal, que ses Bad Seeds ne puissent faire germer dans cet environnement-là, dans cette acoustique réputée délicate, leur luxuriance vénéneuse. Dans la lumière encore blafarde d’avant la magie, rien n’était évident. Jusqu’à ce que retentissent en fond les notes à la beauté résignée de la bande originale du film «L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford», composée par Nick Cave et son complice de toujours, le violoniste infernal Warren Ellis.
 

 

Celui-ci ouvre la grand-messe au piano, mécaniques heurtées qui martèlent et malmènent génialement «Anthrocene» tiré du dernier album «Skeleton Tree», disque de deuil dédié à son fils mort tragiquement. Nick Cave souffle «I’m begging you please, to come home now, to come home now». Liturgie sombre, déchirante, état de grâce immédiat. Silhouette émaciée, costard cintré, l’australien déroule un ruban de soie funèbre, «Jesus Alone» «Magneto», joint ses mains, lève les yeux, avant de les plonger dans les premiers rangs, de partager sa ferveur trouble.

La puissance sous la surface

Puis la puissance vient. D’en dessous. Tapie sous la surface, elle attendait «Boson Higgs Blues» du seigneurial «Push The Sky Away». Poème halluciné, visions nocturnes d’apocalypse, dans les paroles d’origine : «I’m driving my car down to Geneva», le public hurle, Nick Cave lui demande «Can you feel my heart beat»…

 


Tout est parfait, cette façon qu’ont les Bad Seeds de jouer l’imprécision, le bancal, avant de tout rassembler en déflagrations totales qui secouent l’Arena jusque dans ses fondations. «Jubilee Street» et son renversant final, à équidistance entre l’extase et le traumatisme, la résilience de «Skeleton Tree» juste avant des rappels à peine croyables. Un «Weeping Song» chanté au cœur du public, qui suit Nick Cave comme un prêcheur égaré de l’ouest américain.

Un «Stagger Lee» où il fait monter la foule sur scène pour partager sa toute-puissance et son insondable fragilité. Deux heures trente de concert, une expérience dont personne ne ressortira indemne, visages hagards au moment de quitter l’Arena, pour certains en larmes. Et on se dit que personne, aujourd’hui, n’est capable sur scène d’une telle intensité. Et que tout artiste devrait en prendre de la (mauvaise) graine.

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