C’est une tendance lourde partout en Europe. La consommation de vins effervescents progresse alors que la consommation de vins tranquilles recule. En Suisse, l’augmentation est spectaculaire: en 2021, 23,5 millions de litres de vins mousseux ont été consommés, un record. Cela représente une hausse de 22% par rapport à 2015 et de 33% par rapport à 2010.

Ce total n’intègre pas la production indigène de vins effervescents, que l’Office fédéral de l’agriculture dilue dans sa statistique annuelle entre les catégories «vins blancs» et «vins rouges».

Quatre acteurs principaux

Dans ce contexte, il faut se contenter d’estimations en approchant les principaux acteurs du marché. La Revue des œnologues a fait l’exercice en 2016: la production de mousseux suisses avoisinerait 3,5 millions de bouteilles. Une niche si l’on compare au champagne (320 millions de bouteilles produites en 2021) ou au prosecco (627 millions de bouteilles).

La production d’effervescents suisses de qualité, produits selon la méthode champenoise (avec prise de mousse en bouteille) est répartie entre quatre acteurs: la Maison Mauler, à Môtiers, la Cave du Tunnel, à Conthey, Xavier Chevalley Œnologie, à Cartigny, et la Cave de la Combe Marendaz, à Mathod. Les deux derniers ont pour activité principale de champagniser des vins fournis par une clientèle fidèle de vignerons-encaveurs – une tâche qui nécessite de disposer d’un savoir-faire et d’équipements spécifiques.

Ce quatuor truste les récompenses dans les concours, qui représentent de belles vitrines pour gagner en notoriété et en reconnaissance. La Cave du Tunnel a ainsi réussi l’exploit de remporter quatre années de suite la catégorie «vins mousseux» au Grand Prix du vin suisse. La dernière fois en octobre dernier avec son Brut millésimé Blanc de Blanc (100% chardonnay) 2016. Sur la 2e et la 3e marche du podium, on trouvait deux vins de la Cave de la Combe Marendaz. La maison Mauler, quant à elle, a remporté cette année une médaille grand or au Mondial de Bruxelles avec sa Cuvée Brut 2016, assemblage de chardonnay et de pinot noir.

Millésimes frais et gourmands

Directeur la Cave du Tunnel depuis 2017, Patrice Rudaz se félicite de cette incroyable série de succès. Cet ancien contrôleur de gestion actif au sein de l’entreprise depuis près de 20 ans souligne l’importance décisive du chef œnologue Bruno Geiger, au domaine depuis plus de 40 ans et devenu un expert de la méthode champenoise. L’expérience accumulée permet au domaine de produire millésime après millésime des mousseux à la fois frais et gourmands.

Depuis sont entrée en fonction, Patrice Rudaz a mis un accent tout particulier sur la valorisation des effervescents, véritables emblèmes du domaine. Au début des années 1990, le fondateur de l’entreprise, Jacques Germanier, a en effet fait creuser 800 m2 de galeries dédiées à la maturation sur lies de ses mousseux, sur le modèle des crayères de Reims, en Champagne.

Une démarche novatrice dans un Valais viticole qui ne produisait pas de vins effervescents. «Monsieur Germanier aimait beaucoup les bulles et la Champagne, où il a souvent voyagé, souligne son successeur. A la fin des années 1980, il a commencé par convaincre ses fournisseurs de vendanges d’arracher fendant et johannisberg pour planter du chardonnay.» Face au ralentissement de la progression des ventes induit par la pandémie de Covid et la concurrence des mousseux étrangers bon marché, la Cave du Tunnel a une nouvelle fois innové. En 2021, elle a lancé un mousseux gazéifié au gaz carbonique, le 42 Sparkling Wine. Avec un objectif clair: profiter de la mode des cocktails pour continuer à gagner des parts de marché.

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