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Le don d’ubiquité de la doudoune

Entre les faveurs des alpinistes des années 1950 et sa place de choix dans le vestiaire de l’homme aujourd’hui, ce duvet est une icône sportive en pleine émancipation.

30 sept. 2020, 20:13
Moncler

La preuve définitive des origines de la doudoune n’a pas encore été versée au dossier, mais quelques éléments sont déjà avérés. Dès les années 1930, des deux côtés de l’Atlantique, ils sont nombreux à chercher à concevoir des vêtements qui isolent grâce au duvet, un procédé jusqu’ici réservé aux sacs de couchage et à la literie.

En 1940, Eddie Bauer, qui possède une boutique d’équipement de sport à Seattle, dégaine le premier. Court et carré, son blouson coupé dans un coton robuste est flanqué de deux poches ventrales, et le duvet disposé dans des compartiments matelassés.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, les premières doudounes sont utilisées par les soldats comme doublure. Après 1945, elles font des heureux en montagne, où les alpinistes portaient jusqu’ici plutôt de la laine, qui montre ses limites quand le temps devient humide.

Burberry Daniele Oberrauch

Mais la veste fourrée prépare déjà sa révolution, grâce au Nylon, inventé quelques décennies plus tôt et utilisé pendant la guerre pour les tentes ou les parachutes. L’idée prend forme à Boulder dans le Colorado, au pied des Rocheuses, la Mecque des sports outdoor américains, grâce à un couple de passionnés, Alice et Roy Holubar.

Au tout début des années 1950, ils transposent l’association duvet-Nylon de leurs sacs de couchage sur une veste, la Mustang. «Eddie Bauer a ouvert la voie, Holubar l’a rendue plus légère et plus technique», pose Alberto Raengo, PDG et propriétaire de la marque américaine.

En Europe

Presque au même moment, dans les Alpes françaises, René Ramillon imagine également ses premières doudounes en Nylon avec sa griffe de montagne, Moncler, d’abord destinées aux ouvriers, qui la portent sur leur bleu de travail.

Dès lors, ce vêtement anti-froid prend sa forme moderne: isolante, respirante, légère et voyante. Le Français Lionel Terray est le premier alpiniste à travailler main dans la main avec Moncler, et de nombreux autres lui emboîteront le pas.

Le prestige de la doudoune se construit sur ces expéditions menées par les héros de l’époque, et elle devient une pièce de choix pour les amoureux de la montagne et des pistes. En Italie, elle est adoptée par la bourgeoisie qui s’échappe pour skier dans les Alpes chaque week-end.

Couleurs en ville

C’est précisément cette étiquette qui est à l’origine de son intronisation dans la silhouette d’une bande de jeunes Milanais des eighties, les Paninari. La sous-culture détourne les pièces les plus chères du vestiaire de leurs parents, des grosses boots Timberland aux blousons Moncler qui font leur entrée en ville dans une avalanche de couleurs.

Une décennie plus tard, la doudoune s’aventure encore dans la rue, aux États-Unis. Sur la côte Est, où l’hiver peut être glacial, des modèles extralarges fleurissent sur les baggys de la jeunesse hip-hop. Ensuite, c’est le trou d’air des années 2000. Le retour en grâce s’amorce il y a une petite dizaine d’années dans le sillage du français Pyrenex et surtout de Moncler, entre-temps passé sous pavillon italien, qui multiplient les collaborations avec des créateurs et l’érigent en objet de mode. L’influence grandissante de l’esprit outdoor depuis quelques saisons la hisse au rang d’incontournable.

Canada Goose Canada Goose

Il suffit d’observer le nombre d’hommes, tous âges confondus, qui la portent en ville, en veste ou en doublure, sur tous les styles, pour comprendre à quel point elle est une figure du vestiaire masculin contemporain. «Elle est terriblement efficace quand le thermomètre dégringole, et cela parle aux hommes», analyse le patron de Holubar.

Les créateurs, qui gardent un œil sur la rue, sont nombreux à réinterpréter l’icône. Cet hiver, elle retrouve son matelassage originel chez Dries Van Noten ou sa version oversized chez Sacaï. Elle se débarrasse des manches dans la version en cuir portée sur un Loden chez Burberry et se pare de velours chez Wooyoungmi. La doudoune n’a pas dit son dernier mot.

Gino Delmas/Le Figaro

 

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