courrier des lecteurs

Dormez braves gens, dormez...

13 nov. 2007

La scène se passe dans une bourgade du Valais central et c'est la petite histoire d'un ado – appelons-le Jérôme – qui a investi toutes ses économies dans l'achat de son premier scooter. Pour se renflouer quelque peu, il se met à la recherche d'un petit boulot durant l'été. Et il le trouve ce travail, scooter aidant, dans un service de messageries qui l'oblige à se lever à 3 h 30 du matin. Il en faudra bien plus pour démotiver Jérôme, bien décidé à s'assumer plutôt que de tout demander à papa/maman. Mais voilà que, pour tout encouragement, Jérôme n'eut droit qu'à la rouspétance et aux récriminations de ceux-là même qu'il était censé servir, sous prétexte qu'il dérangeait les quartiers qu'il desservait. Le jeune homme tenta bien de mettre la pédale douce mais rien n'y fit. Une nuit il se fit houspiller par une mégère à sa fenêtre. La nuit ou plutôt le matin suivant, un insomniaque pour le moins acariâtre l'invectiva copieusement, au motif qu'il dérangeait ses enfants et belle-maman dans leur sommeil. Un autre jour (ou une autre nuit) encore, il se vit littéralement assaillir par une sorte de zombie à l'œil torve et au poil hirsute, gesticulant dans son pyjama, faisant mine de relever le numéro de la plaque minéralogique afin de le dénoncer à la police pour "tapage nocturne", rien de moins. Après une semaine d'activité seulement, Jérôme mit la pédale encore plus douce et se procura une bicyclette. Il poursuivit ainsi son bonhomme de chemin (environ 15 km), au petit matin, perplexe et méditatif à propos de la grandeur et des vertus du genre humain, jurant qu'on ne l'y reprendrait plus, à jouer les messagers malvenus... Cette petite histoire en dit long et a de quoi nous laisser songeurs quant à la société dans laquelle nous évoluons. De tels comportements sont-ils de nature à stimuler les jeunes désireux de se constituer honnêtement un petit pécule plutôt que de zoner, dealer voire même racketter? Des activités sans doute moins bruyantes mais certainement plus dommageables. Mais si cela ne vous interpelle pas le moins du monde, alors dormez, dormez braves gens, dans votre quiétude douillette, dormez jusqu'au bout de la nuit et même en grasse matinée. Et puisse votre réveil ne pas être trop brutal!
par Un père de famille indigné et déçu: Christophe Coppey, Vétroz