courrier des lecteurs
Des moutons et des loups
14 oct. 2007
Décidément, il est beaucoup question de moutons, ces temps-ci: de moutons blancs, de moutons noirs et de moutons victimes du loup. En effet, en Valais, 41 animaux de rente ont été dévorés ces quatre derniers mois. L'autorisation de tirer un loup a été délivrée. Le scénario rappelle étrangement celui de l'année passée, à pareille époque: un loup ayant fait trop de victimes avait été abattu dans le Chablais valaisan. Alors, le tir, une solution populaire mais inefficace? Oui. Car si le loup fait son retour naturel en Suisse, c'est parce que c'est un animal protégé en Europe et que les populations lupines italiennes et françaises sont en expansion. Régulièrement, des loups s'installent dans notre pays, et régulièrement des dégâts au cheptel sont constatés.
Cette nouvelle situation exige une adaptation sur le long terme des pratiques d'élevage: surveillance humaine des troupeaux, chiens de protection et/ou enclos de nuit. La protection n'est jamais totale, mais les exemples français et italiens montrent que les troupeaux protégés voient le nombre de leurs victimes diminuer sensiblement. Il est vrai que ces nouvelles contraintes représentent une charge financière et un travail souvent difficiles à supporter par les éleveurs, malgré les aides de l'Etat. On comprend leur colère.
Or, si les amoureux de la nature souhaitent le retour du loup, ils ne souhaitent pas la disparition des pratiques d'élevage dans nos montagnes. C'est ce que l'association de protection de la nature Ferus en France a compris en mettant en place un programme de soutien au pastoralisme en zone à loup (http://ours-loup-lynx.info). Cet été, j'ai pu, avec d'autres écovolontaires, participer à un stage de formation, puis rejoindre pendant deux semaines un berger avec son troupeau et ses deux chiens patous. Mon rôle était de renforcer la présence humaine auprès du troupeau, surtout la nuit, et de participer aux divers travaux pastoraux nécessités par la présence du loup. C'était aussi une formidable expérience de la montagne, de la vie de berger et d'éleveur, et une expérience sur le terrain des problèmes liés à la cohabitation entre loup et pastoralisme. Ce programme d'aide ne prétend pas détenir la solution, mais a le mérite d'apporter une aide concrète et d'ouvrir un espace de dialogue et de rencontre pour uvrer à la recherche et à l'application de solutions équitables et durables. Il serait temps pour la Suisse d'aborder la problématique loup-pastoralisme dans toute sa complexité et de soutenir fermement son élevage de montagne. Et en attendant, pourquoi ne pas lancer un mouvement solidaire et citoyen de soutien au pastoralisme?
Danièle Martinoli, biologiste, Bâle
par Danièle Martinoli, biologiste, Bâle