courrier des lecteurs

Scolarisation des sans-papiers: merci, M. Freysinger!

25 mai 2013

Loin de moi l'idée de vouloir prendre la défense de M. Freysinger car la manière dont il amène le problème des sans-papiers me semble inadmissible. Néanmoins, ce qu'il soulève dépasse le principe de scolariser des enfants ou non. Il met au jour un problème qui a fait la une de pas mal de journaux il y a un ou deux ans, quand la ville de Lausanne a déclaré qu'elle allait engager des apprentis sans papiers et que la confédération s'y est opposée. En effet, on accepte de les scolariser, c'est bien, mais on arrête où? Quand? Comment? À 15ans, il fait quoi? On lui donne un permis? On le renvoie chez lui? C'est où, chez lui, quand on a passé les quinze premières années de sa vie dans un pays "étranger"? On fait quoi si, après quinze ans, les parents sont découverts? Et puis, comment les paie le gentil patron qui les a engagés? Avec de l'argent noir? Et les assurances sociales? Quoi? Il y aurait, ici, des patrons qui ne déclarent pas tout? Cela dit, que fera-t-on avec nos amis clandestins qui ne paient pas leurs cotisations quand ils auront 65 ans? Qui les prendra en charge? On les laissera crever au bord de la route? Et pour les gens déclarés, est-ce équitable? J'ai travaillé dans une structure hébergeant un jeune clandestin. Il vivait dans la peur d'être viré, transmise par les adultes. Est-il possible d'évoluer sainement dans des conditions comme celle-là? Demandez à des étrangers en situation régulière ce que ça fait de devoir se présenter au bureau des étrangers pour renouveler son permis B et vous aurez une idée de ce que vivait ce jeune. Les paradoxes, les situations plombant les gens dans plusieurs affirmations contradictoires les rendent fous. Alors? Qu'en est-il de ces enfants à qui on prétend qu'ils vivent dans un pays libre, qu'ils peuvent faire confiance à des intervenants sociaux, mais qui doivent taire leur condition de peur de se faire dénoncer par des tiers, ses amis ou les parents de ceux-ci? Ce type de secret pourri force les personnes à devoir contrôler leur pensée, à vérifier chaque mot pour ne pas fourcher. Pensez-vous que ce sont des situations saines pour eux? Alors, qu'est-ce qu'on fait? On les chasse? On les fout dehors? On leur délivre un permis de travail? On continue comme ça et tout le monde se tait? Je ne sais pas ce que vous pensez réellement, M. Freysinger, mais, finalement, merci, de soulever un problème humain que chaque Valaisan imagine se passer ailleurs...
par Michel Cretton, Bramois