courrier des lecteurs

Naturalisations: un caractère politique

15 mai 2008

Les discussions au sujet de l'initiative susmentionnée semblent se perdre dans des dédales totalement étrangers à la question soulevée. En effet, bien qu'elle ait été présentée par l'UDC, elle n'a rien à voir avec un parti politique déterminé, ni avec les fantasmes que l'on agite chaque fois que l'on énonce le nom du parti de M. Blocher. Elle n'a rien à voir non plus avec la xénophobie, ni avec les problèmes de surpopulation étrangère; elle réagit simplement à d'étranges décisions prises par le Tribunal fédéral. L'initiative se borne d'abord à fixer dans la Constitution le système qui prévaut actuellement et selon lequel c'est la commune qui est compétente en matière d'octroi de naturalisation. Comme actuellement, chaque commune pourra décider si c'est le Conseil communal ou l'assemblée primaire qui prendra la décision. Très vraisemblablement, rares seront les communes qui attribueront ces compétences à l'assemblée primaire (naturalisation par les urnes). En Valais c'est déjà le Conseil communal qui bénéficie en principe de cette compétence D'autre part, l'initiative prévoit que la décision d'octroi ou de refus de la naturalisation prise par la commune, que ce soit par l'Exécutif ou par le peuple, est définitive et ne peut faire l'objet d'aucun recours. C'est le seul point important et nouveau pouvant porter à discussion. Cette solution est absolument conforme à toute notre tradition helvétique qui considère que nul n'a un droit absolu à devenir suisse, mais qu'il en a simplement la possibilité, si l'autorité compétente le décide. Il s'agit d'un principe de base de notre démocratie. L'acte de naturalisation est un acte hautement politique et n'a rien à voir avec un acte administratif, tel que la délivrance d'un permis de conduire ou d'un permis de chasse. C'est ôter une grande partie de sa valeur à la naturalisation que de la ravaler à une simple décision administrative. Notre système de naturalisation prévoit trois échelons, soit la commune, le canton et la Confédération, celle-ci se bornant à en fixer les conditions cadres; il est absolument normal que si toutes conditions prévues par le droit fédéral sont remplies, la commune soit encore libre de décider si un individu est accepté ou non par les citoyens ou leurs représentants. Il est évident qu'il existe toujours un risque d'abus, mais cela ne doit pas être un prétexte pour déroger à un principe essentiel; le risque d'abus existe également dans le cadre de décisions prises sur recours par une instance supérieure. Cette initiative ne fait qu'ancrer dans la Constitution un système qui a fait ses preuves, qui correspond à notre mentalité profonde et qui n'a rien de xénophobe; elle ne porte nullement atteinte aux Droits de l'homme, puisque l'obtention d'une nationalité déterminée n'en est pas un. C'est donc au nom des principes fondamentaux de notre ordre juridique qui confère à la naturalisation un caractère politique dans le sens le plus noble, qu'il convient d'accepter cette initiative.
par Jacques Allet, Sion