courrier des lecteurs

Magnificat et révolution

30 juil. 2009

Cher Monsieur Huot, je me permets de répondre à votre courrier de lecteur du 21 juillet. Il traitait de mon interview parue dans "Le Nouvelliste" du 27 juin sur mon dernier livre consacré à la résurgence de la théologie de la libération (Editions Fol'fer). Je n'ai jamais rien écrit qui accuse Mgr Helder Camara de communisme. Mgr Camara était contre l'avortement et la contraception et pour le célibat ecclésiastique. Ses choix politiques se sont exprimés par la création d'un parti en 1967, le Parti du développement intégral. Celui-ci n'a rien à voir avec celui proposé par le pape Benoît XVI dans son encyclique Caritas in Veritate. Pour Mgr Camara, il s'agissait d'une révolution non violente mais radicale de la société et de l'Eglise diffusée par deux institutions créées par lui: le SERENE (Séminaire régional du nord-est) et ITER (Institut de théologie de Recife) qui seront fermés par l'autorité ecclésiastique en 1989. Mgr Helder Camara n'a jamais été communiste, mais il a promu la théologie de la libération, qui a comme moteur intellectuel le matérialisme historique et dialectique. Cette réponse ne me permet pas de développer davantage pour aller plus loin. (Voir les "Notes du cardinal Ratzinger" de 1984 et 1986 et, plus récemment, "La conversion de Clodovis Boff", le frère de Leonardo.) Que plus d'un milliard d'hommes ne mangent pas à leur faim et vivent dans la misère et que ce soit le fait des hommes et des structures, cela est indéniable. Les causes viennent d'être rappelées par Benoît XVI. Je vous y renvoie. Invoquer le Magnificat pour faire la révolution... même non violente ne me paraît pas très catholique. C'est du Charles Maurras de 1892! (Interprétation qu'il s'empressa de supprimer, dès qu'il fut éclairé sur la signification catholique de cette louange). En revanche, la transformation du Magnificat en chant de guerre, non violent bien sûr, par une interprétation subversive, est le fait de Marc Sangnier, le 2 décembre 1904. Je ne suis pas surpris de votre "Manipulation idéologique de la religion" (Benoît XVI) car mon livre vous précisera cette filiation avec le fondateur du Sillon. Pour Guy Aurenche, président du CCFD, vous aurez la preuve, pages 133 à 136, qu'il n'a que faire de l'Eglise catholique pour réaliser son utopie, car son plan génial pour nourrir les affamés et faire cesser les injustices passe par une réforme radicale de l'Eglise catholique.
par Jean-Pierre Moreau, Troyes (France)