Elégant, qui peut traverser les âges, précieux. L’ouvrage est à l’image du sujet qu’il brode. Imaginé par le groupe folklorique L’Alouette d’Hérémence, qui fêtait en 2020 ses 70 ans d’activité dans le chant, la danse et la sauvegarde du patrimoine, le livre «Tu mets le blantsè?» dévoile et décode le costume traditionnel du val des Dix tout en questionnant son usage dans le temps présent.

Tenter d’immortaliser l’immatériel

L’idée est née de la volonté de fixer dans le temps une mémoire immatérielle. Capturer un savoir qui tend, si ce n’est à disparaître, au moins à se modifier. «Aujourd’hui, les jeunes ne possèdent plus les savoirs liés au costume et certains n’osent même plus le porter», relève Eric Genolet, président de l’Alouette, historien et auteur du livre. «Par gêne ou par peur de faire faux.» La plaquette, soutenue par la commune d’Hérémence, espère leur apporter un éclairage. Des repères dans la compréhension et la cohérence de la coutume, notamment grâce aux témoignages de quinze dames du village dont les anecdotes parsèment les pages. «Nous n’avons pas non plus la prétention d’éditer une bible ou de s’ériger en police du costume», souligne toutefois l’historien en riant.

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A l’image des femmes qui le portent

De préoccupation vitale à ses débuts, le costume participe ensuite à la construction identitaire de la communauté. A Hérémence, contrairement à d’autres régions, l’habit sera très peu coloré. «Sobre et discret, simple au premier abord mais d’une grande difficulté dans l’élaboration, le vêtement est finalement le reflet de la mentalité des Hérémensardes», poursuit Eric Genolet.

Ultracodifié, il laissait peu de place à la créativité. Le ruban du chapeau toujours à droite, la tête toujours couverte pour les offices religieux, le mouchoir, en coton la semaine et en soie le dimanche, toujours noir en période de deuil. «Ces codes, bien souvent liés à la liturgie, montrent à quel point la religion organisait la vie et même l’intimité d’une communauté.» Pour preuve, ce petit bouquet de fleurs artificielles porté par les femmes le jour de leur mariage et dont l’absence, signe de grossesse, était très vite remarquée par l’assemblée.

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Au-delà des modes

Au milieu des années 50, la construction du barrage de la Grande Dixence offre aux Hérémensards un tout nouveau pouvoir d’achat. Avec plus d’argent pour s’acheter des vêtements, c’est le déclin de la confection locale. Et avec lui l’étiolement d’un savoir.

Mais le costume n’a jamais vraiment disparu pour autant. «D’où la question des motivations à le porter aujourd’hui», résume Eric Genolet. «Le réduire à de la nostalgie serait faire abstraction de la rudesse du temps d’avant. Le porter en plus-value touristique serait le dénaturer et négliger le savoir-faire de ces talentueuses femmes couturières. Quoi qu’il en soit, porter un costume de nos jours véhicule forcément une motivation, qu’il est intéressant d’observer», juge l’auteur du livre.

Finalement, «Tu mets le blantsè?» espère simplement contribuer à la sauvegarde et au respect d’une tradition qui va au-delà des modes. Et inviter, pourquoi pas, la jeune génération à se la réapproprier.

Infos pratiques:

Livre à commander par e-mail à costumes.alouette@outlook.com, dans les Edelweiss Market d’Euseigne et d’Hérémence et à l’épicerie de Mâche. L’exposition «Tu mets le blantsè?», réalisée en collaboration avec l’Ecole de couture du Valais, est à découvrir à la forge d’Hérémence les 30 et 31 octobre prochains, en marge des célébrations des 50 ans de l’église d’Hérémence.

Le costume d’Hérémence brode son histoire au fil du temps

Pour ses 71 ans, Covid oblige, le groupe folklorique L’Alouette publie un ouvrage qui décode autant qu’il interroge le costume traditionnel d’Hérémence.