«Je voulais recueillir quelques échos de nos rires,
Que la fête s’étende encore et déride enfin nos corps.
Je n’ai pas le courage de partir, je n’ai pas le courage de te dire que…»

«Courage», le nouvel album EP de Meimuna plonge au cœur fragile des relations. Lorsque celles-ci immanquablement s’étiolent pour un jour disparaître. Mélodies de dentelles, voix sur le fil, chœurs évanescents, cet album convie la beauté des souvenirs pour en garder une empreinte adoucie, apaisée. En témoigne la couverture, un tableau d’Etienne Trouvelot, passionné d’astronomie du XIXe siècle, dont le pastel renvoie à une dimension transcendée, supérieure.

«Courage» sera verni samedi 23 et dimanche 24 octobre à l’Ecole de vitrail et création de Monthey.

Pour l’occasion, Meimuna s’est entourée d’un quintette à vent, bugle, flûte traversière, clarinette basse et trombone, ainsi que de chœurs, pour encore plus s’envoler vers les cieux.

Comment est né «Courage»?

Pendant la période du Covid et le confinement, j’ai vécu beaucoup de ruptures, amoureuse, sociale, professionnelle – nous avons dû annuler deux tournées internationales –, je n’avais plus grand-chose à quoi me raccrocher. J’avais perdu ma maison, mon amoureux, mon travail. Ce fut une grosse remise en question, une grande partie de ma vie était lâchée.

Je me demandais s’il fallait tout regretter, tout repenser. Pour ne pas refaire les mêmes erreurs. Comment transformer ce désarroi en quelque chose d’utile et de réconfortant.

«Courage» est un mot que l’on m’a beaucoup dit et que je me suis beaucoup répété…

Cet EP a-t-il fait office de thérapie?

La musique l’est toujours. Quels que soient mes EP. Je crois qu’elle m’aide à me comprendre. Ces chansons sont forcément introspectives. Elles parlent de comment retrouver ses repères, comment se reconstruire. Comment affronter ses peurs, comment laisser derrière ses bagages pour avancer malgré tout.

Vos chansons sont-elles écrites pour vous ou pour les autres?

Pour moi, de manière très égoïste (rire). Mais plus vous êtes sincère avec vous-même et plus cela résonnera auprès des gens. Souvent ils me disent qu’ils se reconnaissent dans mes chansons, ils ont même l’impression qu’elles sont écrites pour eux, au point d’être touchés à en pleurer. C’est un effet collatéral très positif (rire).

La direction artistique de cet album est celle vers laquelle je veux tendre. Il y a un côté «bricole-home studio»: des chœurs construits dans un château et des prises dans un studio pour ce qui devait être mieux produit.

Il y a une forme d’intégrité, chez Meimuna. Pour vous, le texte, ce que véhicule la chanson est très important.

Oui, les mots importent. Les textes disent beaucoup de nous, même si, parfois, je comprends mes textes un peu plus tard. Un ami me disait: nos chansons ont de l’avance sur nous. On écrit parfois quelque chose qui prend un autre sens plus tard. Vous vous rendez compte que vous aviez placé quelque chose qui était très caché en vous. Les chansons ont plusieurs niveaux de lecture. J’essaie d’y mettre beaucoup de poésie, d’images, c’est ce qui fait la richesse d’un texte, mais on comprend de quoi je parle, il y a des lieux précis.

Les métaphores sont certainement une manière de me protéger, de mettre un peu de distance, elles font bouclier. Je crois que c’est à la fois très clair et brut. J’ai pu me mettre ainsi plus à nu.

Il y a donc beaucoup d’intime. N’est-ce pas trop difficile que de se livrer sur scène?

Je me pose cette question tous les jours. Sur scène, il faut toujours avoir une certaine distance émotionnelle pour ne pas se mettre à pleurer et être démontée. Mais parfois, c’est aussi ça qui est beau, avoir la voix qui tremble en se dévoilant aux gens. Les artistes que j’aime écouter ont cette fragilité sublime.

Ce disque parle d’une fracture. Comment vous sentez-vous aujourd’hui?

Je me sens bien parce que cela m’a aidée à mieux me comprendre, moi qui ai de la peine à mettre des mots sur mes émotions. D’en parler avec la musique, cela m’a aidée, cela m’a permis de dire qui je suis. Je suis fière de cet EP.

«Lorsque vous avancez seule, vous finissez par tourner en rond.»

Vous êtes toujours à la tête de vos choix, pensez-vous être maîtresse de votre destin?
Oui. C’est peut-être un discours de privilégiée. Je pense que c’est important pour moi, j’ai fait le choix d’arrêter mes études, de vivre avec pas grand-chose par mois, dans un petit espace, avec peu de moyens, parce que j’ai décidé de vivre de ma passion et qu’il n’y a rien qui me fasse plus vibrer que la musique. Et pour cela je dois être la plus libre, la plus indépendante, la plus émancipée.

Comment cela se construit-il?
J’ai besoin d’avancer seule, de me dire que si tout le monde me lâche, mon projet peut toujours tenir debout. S’il y a une pandémie mondiale, mon projet va survivre. Je peux enregistrer des choses chez moi, à 3 heures du mat'. Si je veux le diffuser sur Internet, je le peux. Je me sens libre parce que j’ai quelques compétences en audio et que j’ai les outils pour accompagner cela et avancer toute seule. Même si le plus important est de bien s’entourer, car lorsque vous avancez seule, vous finissez par tourner en rond. J’ai besoin de me nourrir de ce que les autres m’offrent, de dialogues. Les chansons doivent parler d’échanges, de vie. De ce que l’on partage.

Infos pratiques

«Courage», Meimuna, chez Radicalis. meimuna.ch

Prochains concerts:
23 et 24 octobre: Ecole de vitrail et création Monthey, réservations foucoupe.ch, prélocations: ici
30 octobre: Lac souterrain de Saint-Léonard, avec Ella van der Woude
En tournée suisse avec Black Sea Dahu: blackseadahu.com

Meimuna: «Nos chansons ont de l’avance sur nous»

Meimuna sort son cinquième EP, «Courage», cinq titres qui racontent une mise à nu. Une introspection où la poésie et la musique sont salvatrices. Le disque est verni ce week-end à Monthey.