A force d’avoir l’esprit pollué par le Covid, on l’aurait presque oubliée. La grippe saisonnière devrait refaire parler d’elle dès la fin novembre en Suisse. Après un coup de mou l’hiver dernier, un retour en force du virus est attendu. Les fabricants ont pris les devants: ils vont mettre sur le marché un peu moins de 1,7 million de doses de vaccin. Un chiffre bien supérieur à la moyenne de 1,2 million des années précédant la pandémie de Covid-19.

«Cela devrait permettre de bien couvrir la demande cette saison», précise Katrin Holenstein, porte-parole de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). «Les cas de grippe devraient être plus nombreux, mais pas au point de former une vague très importante.»

Manque d’immunité

Du côté d’Infovac, Alessandro Diana fait remonter les préoccupations: «Il pourrait y avoir davantage de cas sérieux», prévient le médecin, expert à la plateforme d’information sur les vaccinations en Suisse. «Ce qui est le plus à craindre est le manque d’immunité résiduelle. Comme le virus a moins circulé la saison passée, il y a eu une plus faible exposition dans la population qui est donc moins immunisée.»

La population n’a pas pu se construire une défense immunitaire suffisante contre le virus car il a peu sévi l’hiver dernier. Au cours de l’hiver 2019-20, près de 228’250 personnes (2,7% de la population) ont consulté un médecin de premier recours pour une affection grippale.

Nous nous attendons à ce qu’avec moins de mesures de distanciation sociale, la circulation augmente à nouveau.

Porte-parole du fabricant pharmaceutique Sanofi

L’hiver dernier, ce sont 182’000 consultations initiales de patients atteints de syndromes grippaux avec des prestataires de soins primaires qui ont été enregistrées. Mais la majorité est vraisemblablement constituée de cas Covid, les symptômes de la grippe correspondant à ceux du coronavirus, souligne Katrin Holenstein.

«Les stratégies de lutte contre la Covid-19 mises en œuvre dans la plupart des pays, notamment les confinements, les restrictions de voyage, l’utilisation de protections respiratoires, l’hygiène des mains et les mesures de distanciation physique, ont contribué à réduire l’activité grippale», salue Patricia Boquete Suter, technicienne en biologie au Centre national de référence de l’influenza aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).

La grippe n’est pas devenue une maladie anodine avec la baisse de son activité.

Katrin Holenstein, porte-parole de l’OFSP

Toutefois, le relâchement de la vigilance et des gestes barrière observé ces derniers mois pourrait profiter à la grippe. Tout comme la levée de restrictions sanitaires. «Nous nous attendons à ce qu’avec moins de mesures de distanciation sociale, la circulation augmente à nouveau», confie-t-on du côté du fabricant pharmaceutique Sanofi.

«La grippe n’est pas devenue une maladie anodine avec la baisse de son activité», relève Katrin Holenstein. «Dans de nombreux cas, la grippe provoque des complications nécessitant une hospitalisation et entraîne parfois le décès.» Le virus est à l’origine de 1000 à 5000 hospitalisations par an à travers le pays. Si ces statistiques sont encore loin du bilan du Covid-19 en 2020 qui a envoyé dans les hôpitaux plus de 19 000 personnes, les médecins insistent sur l’importance de vacciner la population.

Qui est vulnérable

Les catégories vulnérables? Principalement les plus de 65 ans, les individus avec comorbidités (problèmes pulmonaires, immunitaires, maladies chroniques…) et les femmes enceintes, les travailleurs de la santé et les jeunes enfants. «La vaccination contre la grippe est le moyen le plus efficace pour diminuer fortement les risques de complication lors d’une infection grippale, que le virus ait beaucoup circulé ou non», souligne Patricia Boquete Suter. Même si l’efficacité diffère selon la saison et selon les personnes vaccinées: les études l’estiment entre 20 et 80%.

Le vaccin contre la grippe ne protège en revanche pas contre le Covid-19 et l’inverse est aussi valable. Ces deux vaccins sont toutefois compatibles. «Techniquement parlant, les deux injections peuvent se faire le même jour», avise Alessandro Diana, qui conseille de prendre rendez-vous dès la première semaine de novembre pour l’injection contre la grippe.

Les virus saisonniers envoient un nombre record de petits Valaisans à l’hôpital

De retour bien plus tôt que d’habitude, les virus saisonniers affectent les jeunes enfants comme jamais cet automne. La faute à un système immunitaire sous-entraîné.