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Election des procureurs: les bonnes et les moins bonnes notes attribuées au Ministère public valaisan

Les procureurs valaisans seront réélus lundi par le Grand Conseil. Avec quel bilan durant la dernière législature? Le procureur général Nicolas Dubuis répond aux critiques.

05 mai 2017, 16:32
/ Màj. le 05 mai 2017 à 17:45
Nicolas Dubuis, procureur général du Valais : "nous avons obtenu la condamnation des prévenus dans la grande majorité des grosses affaires.»

L’an dernier, deux tiers des enquêtes pénales ont été liquidées en moins d'un mois en Valais. C’est bien mieux que ces dernières années qui enregistraient un pourcentage entre 40 et 50%. 

Selon un récent rapport publié par le Ministère public valaisan, qui publie ces chiffres 2016, un quart des affaires a demandé entre un mois et une année de travail. Et seulement 6% vont exiger plus d’un an de travail. Ce qui fait dire au procureur général Nicolas Dubuis : «notre bilan est plutôt bon. Et nous avons obtenu la condamnation des prévenus dans la grande majorité des grosses affaires.»

Ces chiffres sont rassurants. Pourtant, le reproche que l’on entend le plus souvent dans la rue concernant la justice, en Valais comme ailleurs, est une lenteur chronique, surtout sur les affaires complexes. Alors que le Grand Conseil s’apprête à réélire lundi les procureurs du Ministère public valaisan, comment leur travail est-il perçu par les spécialistes ? Le Nouvelliste a mené l’interrogatoire auprès d’avocats et de la commission de justice.

1. Ils donnent des bonnes notes

L’avocat UDC Michael Graber, président sortant de la Commission de justice (COJU) du Grand Conseil dresse un bilan positif. «Le Ministère public a bien travaillé ces dernières années. Il n’y a pas de souci.» Nouveau arrivé à la COJU, le PLR Xavier Mottet estime lui aussi «que le bilan chiffré est relativement satisfaisant en matière de rapidité.» 

Ce banquier de profession s’empresse d’ajouter une nuance. «Il faut plus de moyens pour traiter les délits économiques.» Un bémol auquel fait écho la nouvelle présidente de la COJU, Madeline Heiniger, du Centre Gauche. 

«S’il y a un problème de lenteur dans les dossiers complexes, il faut aussi noter qu’en 2016 les procureurs sont parvenus à liquider plus de dossiers qu’il n’en est arrivé sur leurs bureaux. Il faudra voir si le procureur supplémentaire engagé pour les délits économiques va permettre d’améliorer la situation.»

La réponse du procureur. «Dans le secteur économique, le goulet d’étranglement se situe aussi à la police cantonale dont la brigade financière ne dispose que d’un analyste financier», explique le procureur général Nicolas Dubuis. «Le Grand Conseil a déjà accepté de renforcer notre équipe, mais il faut encore au moins un deuxième analyste pour le canton pour faire face aux gros dossiers économiques.»

2. Ils dénoncent un manque d’effectif 

David Gruber, bâtonnier de l’ordre des avocats du canton, estime que si lenteur il y a bel et bien dans le traitement des dossiers, «ce n’est pas le travail des procureurs qui est pas en cause, mais un manque d’effectifs.»

Quant à l’avocat montheysan Aba Neeman, s’il confirme des lenteurs du Ministère, il se refuse à lui faire un procès d’intention. «Les magistrats sont surchargés et des dossiers avancent moins vite que d’autres plus urgents. Ces affaires secondaires peuvent durer des mois, voire des années. Mais je n’y vois pas de volonté délibérée de faire traîner certains dossiers.» Des propos corroborés mot pour mot par l’avocat Blaise Fontannaz, membre démocrate-chrétien de la COJU.  

La réponse du procureur: Nicolas Dubuis, qui confirme une surcharge chronique de travail, relève que «le Tribunal cantonal indique que les recours contre des retards injustifiés demeurent dans une proportion modeste, avec douze cas en 2016. Et cela, alors que chacun des 26 procureurs à traiter en moyenne 400 dossiers l’an dernier, chacun ne disposant que d’une secrétaire à 60%.»

>>A lire aussi: La justice valaisanne est à bout de souffle

3. Ils critiquent certains procureurs

D’autres observateurs de la vie judiciaire valaisanne sont moins tendres. Carole Ambord, vice-bâtonnière confirme ces lenteurs qui  sont un fait dans tous les offices du ministère public valaisan. Mais pour l’avocate sédunoise, «le manque de moyens n’explique pas tout. On sait dans le milieu judiciaire qu’avec certains procureurs les dossiers avancent bien plus vite qu’avec d’autres magistrats.» 

Avocat réputé du barreau valaisan, le Martignerain Michel Ducrot pointe aussi du doigt certains magistrats et propose une solution. «Il y a de très bons procureurs en Valais. Toutefois certains ne sont pas exempts de critiques. Je pense qu’un contrôle de la qualité et qu’une évaluation de l’efficience devraient être introduits».

Avocat très critique envers la justice valaisanne, Me Stéphane Riand ne fait pas dans la demi-mesure, on s’y attendait. «La lenteur de notre ministère public n’est pas linéaire, mais ciblée. Elle concerne certains dossiers choisis. Les procédures n’avancent pas de façon égalitaire.»

La réponse du procureur: Nicolas Dubuis souligne que la qualité des procureurs se mesure au nombre de contestations contre leurs décisions. Or seulement 7% des ordonnances pénales ont fait l’objet d’une opposition en 2016. C’est très peu. Je les félicite pour leur travail.»

4. Ils visent Nicolas Dubuis

Nicolas Dubuis est aussi directement visé par l’artillerie lourde de Stéphane Riand lorsqu’il lâche : «Le procureur général devrait s’occuper lui-même de certains gros dossiers et des affaires «politiques» ou sensibles sur le plan financier, tout comme celles ayant trait aussi aux avocats ou encore aux policiers.»

Un avis partagé par Alexandre Cipolla. Ce juriste parle de «manque de courage du procureur général qui délègue trop souvent les dossiers importants à ses collaborateurs.» Et cet UDC, nouveau membre de la COJU, de citer le drame de Daillon «toujours pas renvoyé devant un tribunal pour jugement, alors que pour d’autres affaires secondaires, Nicolas Dubuis est en première ligne.» 

Plusieurs observateurs rappellent qu’en 2015 le procureur extraordinaire Dick Marty avait estimé que le choix de Nicolas Dubuis de refiler rapidement le dossier Giroud à la justice vaudoise pouvait «donner l’impression qu’on a saisi l’occasion de se libérer d’une affaire délicate.»  

Et Me Riand de souhaiter que «le procureur général et ses premiers procureurs soient élus par le peuple. «Les citoyens doivent pouvoir choisir la politique pénale qui sera suivie par le Ministère public durant la législature.»

La réponse du procureur: «Je traite généralement les dossiers sensibles, notamment les enquêtes interne à la police cantonale. L’affaire Giroud : «la transmission du dossier au canton de Vaud a été avalisée par le Tribunal pénal fédéral.» Mais je ne peux pas tous les prendre et diriger le Ministère.» L’élection par le peuple : «Je ne suis pas certain que cela serait de nature à garantir son indépendance.» 

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