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Être sans emploi peut entraîner des troubles psychiques et pathologiques. Rencontre avec le SeMo (Semestre de motivation)

L’insertion professionnelle n’est pas une sinécure. Quelles sont les retombées sur la santé psychique des jeunes sans emploi? Nous avons posé la question au SeMo (Semestre de motivation) de Sion.

09 oct. 2019, 20:00
Se retrouver sans emploi à un âge où l'on construit son identité est particulièrement difficile.

Ils sont entre 150 et 200 par an à bénéficier, en Valais, de l’accompagnement du SeMo (semestre de motivation). Cette mesure du chômage propose aux jeunes entre 15 et 25 ans différentes clés pour gagner en maturité et en expérience, afin de mieux entrer dans le monde du travail et d’éviter les pièges de la stigmatisation.

«Il s’agit souvent de jeunes qui ont fini leur scolarité en échec – mais pas toujours – et qui ont un contexte social ou familial qui ne leur a pas permis de trouver une formation ou un apprentissage, explique Laurence Emery, référente auprès du SeMo. Durant toute la semaine, ils suivent des ateliers pratiques, des cours (huit heures par semaine durant lesquelles ils renforcent leurs acquis, puisqu’il s’agit de cours de 3e du cycle d’orientation), font des recherches d’emploi, des bilans de compétence, de l’informatique, etc.»

En savoir plus : présentation du SeMo (Canal9)

Age de transition difficile

L’offre est très générale, pour que l’élève ait le plus de cordes à son arc. «On n’impose jamais rien, explique Laurence Emery. On suit, on encourage pour faire émerger des idées. Peu importe le genre d’activité. L’important, c’est d’acquérir les compétences de base pour le monde du travail, tout en apprenant le respect de la hiérarchie, la ponctualité, le travail d’équipe, la persévérance.»

Fortement encouragés à prendre part à des stages, les jeunes du SeMo travaillent régulièrement en entreprises. L’objectif: se familiariser avec le monde des adultes à un âge alors charnière car, comme le reconnaît Laurence Emery: «On constate parfois une peur de devenir grand.»

Une vision partagée par Ariane Salamin, psychologue spécialiste en psychologie de l’enfant et de l’adolescent FSP: «La période adolescente est caractérisée par la recherche identitaire, la distanciation d’avec les personnes de référence, des actes de rébellion, des idées révisées et idéales sur le monde et ses valeurs. C’est un moment fait d’anxiété et d’angoisses qui peuvent être massives et conduire à des symptômes pathologiques. L’estime de soi est à rude épreuve. A cela s’ajoutent des choix de vie à faire (qui dépendent de l’identité encore en construction), la mise à l’épreuve des compétences pour atteindre telle ou telle filière (bousculant davantage l’estime de soi), les conflits autour des valeurs inculquées et celles de ses pairs, la poursuite d’un idéal personnel, de celui des parents…»

 

La mise à l’épreuve de ses compétences bouscule l’estime de soi.
Ariane Salamin, psychologue spécialiste en psychologie de l’enfant et de l’adolescent FSP

 

Le monde du travail peut ainsi paraître flou et peu atteignable. «Selon ce qu’il vit, le jeune peut se lancer dans la vie professionnelle ou sciemment se mettre en échec, en rupture.»

Le sentiment d’appartenance est également primordial. Or, comment parvenir à trouver sa place dans la société lorsqu’on est sans emploi? Cette rupture, qu’elle soit scolaire ou professionnelle, ne peut qu’accentuer les fragilités déjà existantes. S’installe un sentiment d’inutilité, d’incompétence.

«Cela peut se traduire par certains comportements à risque, de l’isolement, des angoisses», énumère la spécialiste. Un cercle vicieux se met alors en place: démotivé, le jeune s’isole et devient de plus en plus passif, rendant son entrée dans le monde du travail plus ardue encore.

Une autre vision de l’emploi

Constat sociétal, les nouvelles générations ne considèrent pas le travail de la même manière que leurs aînés. «Ils ne sont que peu sûrs de trouver un travail, avance Ariane Salamin. Là où l’adulte désire donner toutes les chances au jeune (bagages scolaires, diplômes…), certains d’entre eux ont perdu l’espoir que cela serve à leur insertion professionnelle, et surtout, à leur bonheur. Ils recherchent un mode de vie plus équilibré dans lequel leur occupation professionnelle n’est pas prioritaire. Ils ne désirent plus entrer dans ce monde du travail comme ils en entendent parler ou le constatent chez autrui (surcharge, «burn-out», manque de temps pour les loisirs, la famille).

Ces différentes visions se bousculent et suscitent davantage d’angoisse chez les jeunes, qui désirent suivre leurs valeurs, et en même temps, suivre celles qui leur sont inculquées.»

Notons qu’au niveau scolaire, le monde du travail est davantage théorisé que vécu. Les mesures proposées par le SeMo semblent ainsi une solution idéale. Non contentes de soutenir les jeunes, elles rassurent également les parents qui savent leur enfant accompagné dans la construction de sa vie professionnelle et de son identité d’adulte. Des mesures particulièrement importantes à l’heure où l’accès au monde du travail s’avère de plus en plus compliqué.

En savoir plus : au sujet de la réinsertion professionnelle en Valais

 

«C’est dur d’avoir de bons bilans et de ne rien trouver»

L’accompagnement dont bénéficie Emma (nom d’emprunt), 20 ans, s’achèvera sous peu. Après un parcours scolaire conventionnel mais sans apprentissage, la jeune femme entre au SeMo. «J’en avais entendu parler par des gens qui y étaient passés. C’était aussi une suggestion de mes parents qui voulaient que je fasse un CFC, au lieu de travailler par-ci, par-là.» D’abord intéressée par la vente, Emma change d’avis à la suite d’un stage proposé par le SeMo: «J’y ai découvert le métier de peintre en bâtiment. Je n’arrêtais pas de rappeler pour prolonger le stage.» Elle a ainsi commencé les cours au CFP (Centre de formation professionnelle) sans employeur et a jusqu’à fin novembre pour en trouver un. «Je me sens à l’aise vis-à-vis du patron, mais ça me stresse de ne rien trouver. Je passe par des périodes de hauts et de bas, entre des bons stages et des moments de démotivation parce qu’ils ne débouchent sur rien. Les cours et le SeMo m’aident à rester motivée.»

 

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