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Et si l'avenir s'imprimait sur papier?

Philippe Amez-Droz, chargé de cours au MediaLab de l’Université de Genève, étudie depuis des années les évolutions de la presse. Il nous confie son regard sur ses mutations. Et sur son avenir, avec sans doute moins de titres, mais toujours imprimés.

10 oct. 2019, 05:32
Philippe Amez-Droz est un spécialiste des médias romands et internationaux aussi reconnu qu'écouté. Et pour lui, les Suisses ne sont pas près de se passer de papier.

Va-t-il y avoir encore des disparitions de titres dans les prochaines années en Suisse romande?

C’est particulier à dire mais, aujourd’hui encore, la Suisse possède l’un des chiffres les plus élevés en matière de journal par habitant. En Suisse, 180 titres paraissent au moins une fois par semaine, et 40 en Romandie. Objectivement, il y a encore des possibilités de concentration. Il risque donc d’y avoir encore du mouvement. 

De quels types?

Cela peut aller de la fusion à la disparition ou simplement à la refonte de la périodicité de publication des journaux. Des titres pourraient ne plus paraître quotidiennement, mais deux à trois fois par semaine.

Quel avenir a le journal imprimé selon vous?

Il y a eu jadis une prédiction annonçant la fin du journal papier pour 2025. Je crois qu’il faut repousser cette date d’environ 30 ans. Et peut-être bien davantage. Car dans ce climat actuel d’instabilité et d’expérimentations des modèles d’affaires, caractérisé par une défiance du public à l’égard de l’information en général, le journal apparaît soudainement comme une valeur refuge. Les lecteurs savent comment est structuré un journal imprimé, connaissent sa hiérarchisation et son déroulé. 

La mort du «Print» pourrait donc ne jamais arriver?

Il existe une sorte d’idéologie du numérique qui travaille à la ringardisation du journal papier. Mais pour beaucoup d’éditeurs, imprimer son journal participe toujours de la crédibilité de la marque et du renforcement de son identité. Et puis il faut parler des tarifs publicitaires: les encarts sont vendus bien plus chers dans un journal imprimé que sur une plateforme numérique. 

Justement, en quoi faut-il craindre les GAFA?

Le problème, avec ces GAFA (ndlr : grands groupes médiatiques digitaux américains composés, entre autres, de Google, Amazon, Facebook et Apple), c’est qu’elles viennent désormais capter le marché publicitaire local en proposant à des PME, qui jadis collaboraient avec le journal régional, de publier des annonces à moindre coût. C’est une vraie concurrence. 

Le monde politique doit-il agir pour soutenir la presse?

Assurément! L’aide indirecte actuelle à la presse, sous forme d’abaissement des tarifs d’envois postaux, n’est plus suffisante. L’enjeu, finalement, n’est pas tellement de préserver tel ou tel titre, mais bien de sauver le métier de journaliste ! Et chacun est en passe le comprendre. Ici ou là en Suisse-romande, des villes ou des Cantons tentent de soutenir des médias de divers manières possibles, et notamment en achetant des espaces pour leur communication institutionnelle. 

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