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116 contaminations évitées depuis fin avril en Valais grâce aux traqueurs de Covid

Une équipe de soignants traque les contacts des personnes infectées par le coronavirus. Leur objectif: casser les chaînes de contamination et empêcher sa propagation. Rencontre avec les chasseurs valaisans du virus.

14 mai 2020, 18:06
Fabienne Vuichoud est infirmière à la Ligue pulmonaire valaisanne. Elle fait partie de l'équipe qui traque les contaminations et les contacts des personnes touchées par le Covid-19.

L’équipe a repris pleinement du service le 27 avril. Le jour de l’assouplissement des mesures de protection contre le coronavirus. Sa mission n’a pas changé. Casser les chaînes de transmission et tracer les contacts pour empêcher, cette fois, une potentielle seconde vague de contamination.

«Chaque cas positif détecté motive une enquête», explique le professeur Nicolas Troillet, responsable de l’unité cantonale des maladies transmissibles. «Si on ne fait rien, chaque personne contaminée va en infecter deux à trois autres. Le but est de faire en sorte que chaque malade contamine moins d’une autre personne.» Et ainsi maintenir le taux de reproduction du virus en dessous de 1 (fin avril, il était estimé à 0,6 par les chercheurs de l’EPFL).

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Avec la sortie du semi-confinement, cette donnée sera au centre de toutes les attentions et sera déterminante pour décider de la suite des événements dans ce retour progressif à la normale.

«Jusqu’à 70 appels par jour»

Depuis fin avril, 74 enquêtes d’entourage ont été menées et ont potentiellement permis d’éviter 116 contaminations secondaires, selon le spécialiste. L’équipe chargée de tracer les contacts en Valais est constituée aujourd’hui de quatre à cinq équivalents plein temps. Mais son effectif a fluctué avec l’évolution de l’épidémie. Il pourrait être renforcé en cas de flambée de nouveaux cas. «On peut aller au besoin jusqu’à une vingtaine de personnes», indique Nicolas Troillet.

Au départ, il y avait des angoisses. Personne ne savait vraiment à quoi nous avions affaire et où on allait. Même nous.
Fabienne Vuichoud, infirmière ligue pulmonaire, unité de traçage des contacts

Tous sont des soignants et se relaient sept jours sur sept depuis le premier cas valaisan, détecté le 28 février dernier. Un véritable marathon. «Dans le rush, on effectuait 50 à 70 appels par jour», explique Fabienne Vuichoud, infirmière de la ligue pulmonaire venue prêter main-forte aux infirmières du service des maladies infectieuses. Parfois les conversations durent jusqu’à trente minutes. Mais pas question de bâcler les choses quand il s’agit d’informer, de soutenir et de rassurer face à un virus inconnu. «Au départ, il y avait des angoisses. Personne ne savait vraiment à quoi nous avions affaire et où on allait. Même nous.»

 

 

La même méthode que pour la tuberculose

L’infirmière n’en est pas à sa première enquête d’entourage. Cette méthode est en effet utilisée pour d’autres maladies connues, comme la tuberculose ou la rougeole qui apparaissent ponctuellement en Valais. Si la mission de base n’a pas évolué au fil de l’épidémie de Covid-19, le job pourrait devenir plus complexe avec le retour progressif à une vie normale qui implique de plus en plus de contacts.

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Comme durant toute l’épidémie, le travail de l’unité de traçage débute par un test positif au coronavirus. L’équipe commence par appeler la personne infectée et son entourage proche. On demande d’abord au malade de se mettre en isolement jusqu’à quarante-huit heures après la disparition des symptômes, à condition qu’au moins dix jours se soient écoulés depuis leur apparition.

«On les rappelle au moins deux fois durant ces dix jours d’isolement pour prendre des nouvelles et les écouter», relève Fabienne Vuichoud. Les autres membres du foyer sont sommés de rester en quarantaine pour dix jours.

 

Si vous avez des symptômes…
Pour les personnes présentant des symptômes du Covid-19, le canton rappelle la marche à suivre suivante. D’abord il faut faire son autoévaluation sur coronacheck.ch ou l’application EchoSOS aussi rapidement que possible. En fonction du résultat, la personne malade doit appeler son médecin traitant ou la hotline cantonale (058 433 0 144, 8 heures – 12 heures) qui l’orientera pour un frottis de dépistage dans un hôpital ou un cabinet médical.

 

C’est quoi un contact pour le Covid-19?

Puis on cherche à connaître les autres contacts que le porteur du virus a eus dans les deux jours précédant l’apparition de ses symptômes. «Dans le cadre du coronavirus, un contact c’est quelqu’un que l’on approche à moins de deux mètres, pendant au moins quinze minutes et sans protection», définit Nicolas Troillet. Les personnes potentiellement infectées sont alors averties pour qu’elles puissent également se mettre en quarantaine.

Je préfère que les règles soient bien respectées dans les établissements publics plutôt qu’on établisse des listes interminables de clients.
Prof. Nicolas Troillet, infectiologue, responsable de l’unité cantonale des maladies transmissibles

Dans les restaurants et les bars, l’équipe de traçage ne pourra pas forcément compter sur les données récoltées puisque les clients n’ont pas l’obligation de laisser toutes leurs coordonnées. «Je préfère que les règles soient bien respectées dans ces établissements publics plutôt qu’on établisse des listes interminables de clients», poursuit l’infectiologue.

«L’application de traçage n’est pas la panacée»

Quand le malade connaît les gens avec qui il a été en contact, il va pouvoir transmettre ces informations à l’équipe de traçage. Mais qu’en est-il s’il s’agit d’un inconnu côtoyé le temps d’un trajet en train? «On ne pourra pas joindre cette personne à moins que les deux aient téléchargé l’application qui sera lancée bientôt», concède le professeur Troillet. Reste que, pour lui, cette solution technologique est un maillon du dispositif mais pas la panacée. Elle ne remplacera pas l’enquête d’entourage.

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Fabienne Vuichoud rappelle: «On a eu beaucoup de chance de pouvoir juguler la vague aussi vite. Il faut espérer que les gens continuent à être prudents et à tenir les distances. Tout va dépendre de cela.» La nouvelle phase de lutte contre l’épidémie débute à peine.

 

L’application de traçage testée ces prochaines semaines
L’application suisse de traçage de proximité sera testée au cours des prochaines semaines. Le Conseil fédéral a adopté une ordonnance limitée dans le temps pour régler cette phase d’essai pilote. Si ce processus ne fait de loin pas l’unanimité tout comme l’application elle-même, le préposé fédéral à la protection des données et à la transparence estime que ces tests sont conformes à la législation sur la protection des données.
La semaine prochaine, le Conseil fédéral se penchera sur une nouvelle disposition légale pour régler l’exploitation future de l’application. Ce projet sera soumis au Parlement en juin prochain. La Confédération rappelle que «son utilisation sera facultative. Elle n’exploitera aucune information de localisation des utilisateurs. Toutes les données seront systématiquement supprimées après vingt et un jours.» Ce système de traçage des contacts devrait permettre d’alerter rapidement les personnes potentiellement infectées et ainsi endiguer la propagation du virus.
Selon ses concepteurs, l’application détermine seulement la distance et le temps d’exposition entre des personnes grâce à la technologie Bluetooth à basse énergie. Ses détracteurs dénoncent, quant à eux, un risque de surveillance généralisée de la population.

L’application va être testée dans les prochaines semaines notamment par des militaires. © Laurent Gilliéron Keystone

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