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Suisse: des initiatives politiques visent les nuisances sonores dues aux motos

Le nombre de motos ne cesse d’augmenter et, avec lui, les plaintes pour nuisances sonores. Les initiatives politiques se sont multipliées. Une commission du Conseil national exige des mesures.

18 nov. 2020, 00:01
/ Màj. le 18 nov. 2020 à 06:42
Cet été, près de 200 motards avaient manifesté au sommet du col du Gothard, en opposition au projet de la conseillère nationale  Gabriela Suter(PS/AG) d’interdire de conduire des «motos bruyantes» en Suisse.

«Nous ne nous laisserons pas prendre notre liberté»: c’est le slogan qu’un groupe de motards a brandi, cet été, contre un projet d’interdiction des deux-roues produisant plus de 95 décibels (dB) déposé par Gabriela Suter, conseillère nationale socialiste argovienne. Cette dernière a, pourtant, été suivie, hier, par la majorité de sa commission, qui a adopté une motion «pour mettre fin au vacarme des moteurs.»

 

 

Cette année, près de 28 000 nouvelles motos et nouveaux scooters ont été vendus, en Suisse, entre janvier et fin octobre, 20% de plus que lors de la même période de l’année précédente. Un record absolu, s’est réjoui motosuisse, l’association des importateurs suisses de motos et scooters. Mais ces ventes ne font pas que des heureux: le nombre de plaintes pour nuisances sonores provoquées par des motos ne cesse, aussi, d’augmenter, confirme Sophie Hoehn, cheffe de la section «bruit routier» à l’Office fédéral de l’environnement (Ofev).

Sensibilité accrue

Parmi les possibles raisons à cela: «Beaucoup de personnes ne comprennent pas que l’Etat investisse des millions dans l’infrastructure – des revêtements absorbant le bruit – mais que quelques voitures ou motos réduisent ces progrès à néant», poursuit la spécialiste.

De plus, le retour du silence pendant le semi-confinement semble avoir provoqué une sensibilité plus grande au bruit, relèvent plusieurs interlocutrices et interlocuteurs. «Les riveraines et les riverains ont peut-être remarqué ensuite à quel point le calme est nécessaire», note Sophie Hoehn.

Après avoir reçu de nombreux courriers de personnes incommodées, la conseillère nationale Gabriela Suter (PS/AG) a déposé deux initiatives parlementaires: l’une exige l’interdiction, sur tout le territoire suisse, des motos de plus de 95 dB, l’autre veut une base légale pour des radars acoustiques permettant de lutter contre les véhicules, voitures comme deux-roues, trop bruyants.

Actuellement, les valeurs limites des véhicules motorisées sont échelonnées selon leur cylindrée. Mais «les valeurs limites sont homologuées, sur un banc d’essai, en laboratoire. Ainsi, une moto dont la valeur limite homologuée est, par exemple, de 90 dB peut dégager bien plus de bruit selon l’utilisation qui en est faite» Les normes suisses sont les mêmes que celles de l’Union européenne, une équivalence inscrite dans les accords bilatéraux.

 

 

Pourquoi avoir retenu la limite de 95 dB pour son initiative parlementaire? «Je me suis inspirée du Tyrol, en Autriche, qui vient de réaliser un projet pilote», explique Gabriela Suter. «Toutes les motos dépassant 95 dB ont été interdites sur certains tronçons de cols alpins. Les premiers résultats sont positifs. La grande question est de savoir si le trafic bruyant s’est déplacé ailleurs.» Cette peur du «déplacement de problème» l’a conduite à proposer une interdiction sur tout le territoire suisse.

Pour Markus Lehner, porte-parole de motosuisse, une telle interdiction reviendrait à une «expropriation.» Selon lui, entre dix à vingt pour cent des motos suisses pourraient être concernées par une telle limite. Il ajoute que «la grande majorité des motocyclistes respectent les règles. Mais un faible nombre vrombit intentionnellement, dérangeant beaucoup de monde. Il faut effectivement les sanctionner.»

Justement, les possibilités de sanctions existent déjà, rappelle l’Ofev: comme tous les élèves conducteurs l’apprennent – et l’oublient peut-être ensuite – l’ordonnance sur la circulation routière interdit les comportements bruyants tels qu’allers-retours dans une rue ou démarrages en trombe. En outre, la police peut contrôler des véhicules dont elle soupçonne qu’ils dépassent les limites sonores (lire ci-dessous l’exemple de Lausanne). Mais la procédure de contrôle est fastidieuse.

En outre, les modèles de radars existants ne sont pas encore assez sensibles pour trier entre différentes sources sonores, mais «la technique progresse», explique la conseillère nationale. Pour l’heure, plusieurs villes ou régions – Bulle, Berne, Genève ou le Tessin – testent des écrans affichant les décibels émis, pour sensibiliser.

Revendications retenues

Hier, la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie, a décidé, par 15 voix contre 10, de reprendre les revendications de Gabriela Suter dans une motion demandant au Conseil fédéral de présenter des mesures, «notamment contre les véhicules modifiés illégalement», l’instauration des radars antibruit ou encore des sanctions «plus aisément applicables» contre «la conduite excessivement bruyante», non seulement dérangeante, «mais aussi pathogène», a remarqué la commission.

«Cette motion est une très bonne chose», commente Gabriela Suter, même si le processus, jusqu’à une solution, dure peut-être plus longtemps.» D’ici là, la Suisse aura peut-être déjà adopté les nouvelles normes européennes. Une réduction de deux décibels est prévue pour les valeurs limites mais, surtout, le processus promis sera plus réaliste, tenant compte, par exemple, du bruit lors des accélérations. Ce projet est salué par tous, Ofev, motosuisse, et Gabriela Suter.

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