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La Suisse est en retard dans la lutte contre le blanchiment d’argent

La lutte contre le blanchiment d’argent en Suisse est déficiente. C’est le constat de l’ex-responsable du Bureau chargé de communiquer les cas.

21 sept. 2020, 09:05
Les cas de blanchiment passent entre les mailles du filet.

Les mécanismes de défense mis en place par la Suisse contre le blanchiment d’argent ne sont pas efficaces. Seule une infime fraction de l’argent blanchi est interceptée, malgré la multiplication des dénonciations de cas suspects de la part des établissements financiers.

Vu la pression politique, de nombreuses banques sont devenues plus prudentes (et) signalent les cas suspects plus tôt.
Daniel Thelesklaf, ancien chef du Bureau suisse de communication en matière de blanchiment d’argent (MROS)

«Vu la pression politique, de nombreuses banques sont devenues plus prudentes (et) signalent les cas suspects plus tôt», explique Daniel Thelesklaf, l’ancien chef du Bureau suisse de communication en matière de blanchiment d’argent (MROS) dans un entretien paru lundi dans 24 Heures.

Paradoxalement, la multiplication des annonces se traduit par une surcharge pour l’autorité chargée de faire suivre les cas à la justice et au régulateur. «Fin 2019, plus de 6000 dénonciations émises par les banques n’étaient pas encore traitées», déplore l’ex-responsable, qui a brusquement quitté ses fonctions fin juin après moins d’une année en poste.

«Cela correspond à des avoirs potentiellement illégaux de plusieurs milliards de francs», poursuit-il, mettant en exergue le retard sur le plan technologique de la Suisse, qui se trouve selon lui «encore au XIXe siècle».

Alors qu’en Europe, les données sont communiquées par voie électronique, les analystes helvétiques se retrouvent à saisir «des boîtes entières de documents» à la main dans un système informatique, avec pour résultat la perte d’une «grande partie des données» et la surcharge du système.

«Lorsqu’une grande partie de la soixantaine d’employés très qualifiés du MROS doit faire du nettoyage de données, ils ne peuvent pas se consacrer à leur véritable tâche: analyser les déclarations des banques et défendre la Suisse contre le blanchiment d’argent», signale Daniel Thelesklaf.

Les grands blanchisseurs d’argent sont souvent épargnés.
Daniel Thelesklaf, ancien chef du Bureau suisse de communication en matière de blanchiment d’argent (MROS)

Selon lui, l’augmentation du nombre de condamnations pour blanchiment en Suisse ne concerne que des cas mineurs. «Les grands blanchisseurs d’argent sont souvent épargnés», lance-t-il, rappelant qu’en 2015, sur les 4,8 milliards de francs d’avoirs suspects signalés par les banques, seuls 190 millions ont été confisqués.

«L’un des deux grands piliers de notre défense contre le blanchiment d’argent – la répression – n’est pas efficace», estime l’ex-dirigeant. Il déplore également le manque de progrès réalisés en matière de prévention: «des milliards continuent d’affluer de pays qui connaissent d’immenses problèmes de corruption».

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