D’abord, soyons clairs: le terme «musique populaire» n’a pas la même acception des deux côtés de la Sarine. Moins fourre-tout que chez les Romands et les Tessinois où elle englobe fanfares et chœurs, la musique folklorique alémanique fait historiquement référence à la musique de danse et de divertissement de la population rurale du XIXe siècle. Les styles les plus connus? La musique «Ländler» et la musique appenzelloise. Son instrument emblématique? L’accordéon schwytzois ou schwytzoise qui ne s’imposa qu’au début du XXe siècle mais éclipsa rapidement les cordes.
Des étoiles anciennes et nouvelles
Et les «stars»? «On ne parle pas trop de stars dans le milieu, c’est plutôt les médias qui le font», s’empresse de corriger Markus Brülisauer qui avance néanmoins les noms de Carlo Brunner et Willi Valotti. Avant eux, Rees Gwerder (1911-1998) et Josias Jenny (1920-1989) ont été les maîtres de la schwytzoise. La dynastie des Alder a dominé quant à elle la musique appenzelloise.
«C’est à partir de l’Exposition nationale suisse «Landi 39» que la musique folklorique a été stylisée en musique nationale et diffusée par l’émetteur radio de Beromünster (N.D.L.R.: l’équivalent de Sottens).» Dans les années 1990, les vents entrèrent en scène donnant naissance à la nouvelle musique populaire. «D’abord perçue comme une menace pour la tradition, elle a eu le mérite de susciter un nouvel engouement pour la musique folklorique.»
De nos jours, celle-ci tend à se métisser et à lorgner vers le folk avec des artistes très en vue comme Melanie Oesch ou Nicolas Senn. «Beaucoup de jeunes perpétuent la tradition tout en innovant. Quand bien même la musique populaire n’a jamais été ni ne sera jamais la musique de la majorité de la population suisse», philosophe Markus Brülisauer.
Et les Romands?
Ce ne sont pas les Romands qui diront le contraire tant il est vrai que la musique folklorique semble l’apanage des Suisses alémaniques. Alors le choix de Crans-Montana, une offensive de charme vis-à-vis de Latins largement minoritaires au sein de l’association (1381 sur 11 098 membres actifs)? Ursula Haller s’inscrit en faux. «Martigny et le Valais avaient déjà accueilli l’événement en 1987. C’est important de rappeler que la Suisse est un pays avec quatre langues, quatre cultures et un large éventail de musiques populaires dont on peut être fier.»
Parmi les instruments exclusivement suisses, on trouve l’accordéon schwytzois, le hackbrett appenzellois et le hackbrett valaisan aujourd’hui presque oublié.
Le hackbrett (littéralement planche à hacher) aussi appelé tympanon appartient à la famille des cithares de table. Ses cordes ne sont pas pincées mais frappées par deux maillets. Il peut aussi être joué à quatre mains, par deux musiciens se faisant face. Alors qu’on lui trouve des cousins tzigane, anglais ou chinois, en Suisse c’est surtout en Appenzell qu’on peut l’entendre dans une version comptant traditionnellement 25 chœurs de cinq cordes. L’un des plus vieux hackbretts helvétiques conservés, datant de 1820, se trouve au Musée de la musique à Bâle. Le hackbrett valaisan diffère de celui d’Appenzell par sa structure et sa disposition tonale. S’il a été joué à quatre mains par les frères Walpen, il a quasiment disparu de nos jours.
Fête fédérale de la musique populaire, du 19 au 22 septembre. Programme complet sous: www.cransmontana2019.ch